El hadj Chaloub Riad est auteur compositeur musicien, spécialiste en droit de développement culturel, membre de l’orchestre Camayenne Sofas.
Il est fils de feu El hadj Moustapha et de Hadja Sanié Ezédine. Marié, il est père de 6 enfants dont 4 garçons et 2 filles.
Il a commencé à recevoir les enseignements préscolaires à Bouramaya Wassou, dans la Préfecture de Dubréka. Arrivé à Conakry, il a débuté à l’école élémentaire de Coléah 1 où il partagera les mêmes classes dès le primaire avec son ex-sociétaire des Sofas de Camayenne, le regretté Youssouf Bah.
Chaloub Riad continuera ses études du collège et du lycée au CER 2ème et 3ème cycles de Coléah, profil Agro-pastoral.
Après l’obtention du bac, il fera la 13ème année pour ensuite être orienté à l’Ecole Nationale des Arts et Métiers de Conakry (ENAM), option Chimie.
Pour autres formations obtenus, pendant 5 ans, il apprendra le solfège, les compositions d’écritures musicales avec l’appui des experts de la République Démocratique de Corée. Après cette formation, Chaloub Riad se rendra à Pyong Yang pour la consolidation de ces différents modules de formation.
A noté qu’il a occupé plusieurs hautes fonctions au niveau du département de la culture, actuellement fonctionnaire de ce dit département et non posté, très ouvert, assez communicateur et pieux de par les salutations d’usages (Assalamoualaikoun), Chaloub Riad s’est prêté et s’est livré à l’interview de votre site électronique Guineenews, au quartier Yataya dans la commune de Ratoma.
Lisez l’interview
Guineenews : comment ce virus de la musique qui vous élève aujourd’hui à plusieurs autres titres ou fonctions notamment, auteur compositeur musicien, spécialiste en droit de développement culturel, a pu vous gagner ?
Elhadj Chaloub Riad : il est bon de reconnaitre qu’à notre temps existaient des cahiers de chants et de récitations qui faisaient partie des épreuves d’examens. J’ai eu aussi l’avantage d’avoir à l’enfance une bonne discographie à travers ma grande sœur qui était mélomane. J’ai été très fortement influencé par tous ces disques dont nous écoutions.
Proprement parler comment je suis venu à la musique, ce virus certes m’a piqué à travers l’harmonica en 1969 dont pratiquais un de mes cousins à Tondon Labaya.
Quand ce cousin et amis partaient pour des randonnées ou au football, couché dans le hamac de mon grand-père, je m’essayais à reprendre les airs qui m’étaient restés. Quant à l’apprentissage de l’harmonica pour revenir à votre question, j’ai appris avec Mohamed Lamine Camara qui était un ainé de près de 3 ans et ami à mon grand frère et qui fut commandant du Camp Boiro. Cet ami de la famille m’a inspiré et m’a conduit à connaitre assez de genres musicaux.
Guineenews : votre vie musicale est intimement liée aux Sofas de Camayenne dont l’on connait les circonstances qui ont conduit à sa naissance. Comment Chaloub Riad s’est retrouvé dans cet ensemble ?
Elhadj Chaloub Riad : c’est à partir de 1974 au moment où je passais le bac, que je me suis joint au groupe. Aussi facile de les citer aujourd’hui avec un cœur meurtri pour nos devanciers, Pierre Fernandez, François Dominique Koivogui, Pierre Koivogui, Youssouf Bah et autres. Pour ceux qui vivent aujourd’hui, les Sofas de Camayenne ont connu des dures traversées.
A l’origine je ne suis pas membre fondateur des Sofas de camayenne. Pour rendre hommage au Dragon de la chanson africaine Aboubacar Demba Camara, le sextet s’est constitué par le biais de feu Papa Kouyaté et le frère Justin Morel Junior. Cette composition est connue.
La présentation en tant qu’orchestre après le recrutement et ayant ses propres éléments, a été faite au mois de février 1974, à la permanence de Mangué Gadiri, et là, j’étais membre.
Guineenews : le parcours des Sofas jusque-là est celui extrêmement rattaché à celui de Riad Chaloub. Sur ce parcours qu’est-ce qui vous vous rends joyeux ou triste ?
Elhadj Chaloub Riad : le plus beau souvenir c’est d’avoir appartenu à une délégation culturelle constituée bien sûr par cet orchestre, qui était accompagné par les structures du parti à l’époque et qui a offert un voyage sur la Sierra Léone. Nous avions constaté que nous étions chéris par un public bien étant Anglophone, qui a apprécié ce que nous produisions. Et par la suite les Sofas ont fait sept fois le tour de ce pays limitrophe dans les années qui ont suivi. C’est un beau souvenir qui me reste et c’était à la foire de cacao.
D’autres souvenirs se sont suivis, tel le voyage au Sénégal, où j’ai eu l’avantage de jouer à Daniel Sorano et au stade Ibamar Diop. Le public sénégalais fut émerveillé et avait eu plaisir de savoir que ces artistes n’étaient qu’élèves et lycéens. A l’époque, le seul étudiant était Justin Morel Junior.
Les plus mauvais souvenirs, c’est la disparition de mes amis. Ils sont nombreux et du primaire au collège, nous nous sommes retrouvés dans cet ensemble orchestral. D’aucun plus récents sont aussi partis et avec lesquels, j’ai savouré la joie.
Guineenews : plusieurs hauts postes occupés, quels sont les actes concrets posés par vous ?
Elhadj Chaloub Riad : Cela dépend des positions ou des postes dont j’ai occupé.
Quand je suis arrivé en 1997 au BGDA en qualité de Directeur Général, j’ai eu la possibilité, la chance d’avoir fait des grandes formations, puisque diplômé de l’académie mondiale en propriété intellectuelle de Genève.
Pendant les 12 ans à ce poste, j’ai été formé dans tous les domaines de la propriété littéraire et artistique.
J’ai donc eu la chance de découvrir le travail que je faisais en tant qu’artiste sous d’autres formes. J’étais arrivé à inventorier que je suis compositeur donc, je crée des mélodies. Auteur, je crée des paroles, je suis arrangeur et d’ailleurs, j’ai eu l’opportunité d’arranger le premier album ‘’Mathowé’’ de feu Momo Wandel.
J’ai pu classer tous ces gens, savoir de quelle catégorie ils relèvent et après faire apprendre la gestion de toutes les expressions artistiques et littéraires. J’avais appris la gestion des domaines dont je ne pratiquais pas. Je ne suis pas un compositeur de Ballet, mais j’avais appris et mis en exergue la gestion des œuvres théâtrales, des œuvres dramatiques, des œuvres musicales, des œuvres littéraires dans la gestion collective. J’ai pu facilement administrer tous ces volets. Ensuite, j’ai eu la chance d’apprendre la gestion des droits connexes. Autrement dit, dans le domaine de la musique, vous avez un auteur, un compositeur, un arrangeur, un éditeur mais vous n’avez pas l’artiste interprète, que vous ne connaissez pas et que vous rencontrez tous les jours. C’est là, où j’ai compris qu’il y a ceux qui font la création, et ceux qui donnent corps et vie à la création.
Ce chanteur interprète n’est pas forcement, l’auteur ni le compositeur et pourtant son interprétation fait tilt. Sans lui, l’œuvre n’a pas d’existence. Ils font légion dans la culture guinéenne, ceux qui ont la double casquette d’être compositeur et interprète.
Alors m’apprendre, m’enseigner à gérer les droits de toutes ces catégories, y compris les droits des producteurs, des éditeurs, des sous éditeurs, je me suis dit, sans hésitations que je suis arrivé à un niveau de compétence qui fait que, deux fois, j’ai été recensé par le système des nations Unies pour participer à la formation des Gabonais, afin de les aider à réorganiser le secteur de la propriété artistique et littéraire. Ils ont pu créer et améliorer le Bureau Gabonais du Droit d’auteurs.
Plusieurs autres jalons ont été posés et je laisse à la postérité d’e juger.
Guineenews : vous n’êtes pas loin de la retraite et nous pensons qu’après tout, vous êtes encore en fonction ?
Elhadj Chaloub Riad : Je suis fonctionnaire actuellement non posté. Vous l’aviez précisé que j’ai occupé plusieurs postes au niveau de ce secteur. Secrétaire général, j’avoue que par la confiance des uns et des autres, j’ai appartenu à la Direction de l’élaboration de la nouvelle politique culturelle de la République de Guinée. Aux côtés de nos ainés, le Professeur Bailo Téliwel Diallo et Monsieur Bandian Traoré conseillé du Département et tant d’autres, j’avoue que je suis fier d’avoir contribué au développement de la culture guinéenne à travers la rédaction de la nouvelle politique culturelle.
Guineenews : aujourd’hui fonctionnaire non posté et peut-on savoir quelles sont vos sources de revenus ?
Elhadj Chaloub Riad : qu’est-ce que je peux dire, que mes droits d’auteurs sont extrêmement importants là dans, non je dirais pour la simple raison, que nous sommes dans des pays où on ne génère pas autant de ressources de droits d’auteurs. J’en bénéficie néanmoins régulièrement. A cela s’ajoute mon salaire mensuel de fonctionnaire, mes rétributions au moment des spectacles en compagnie des Sofas de Camayenne et bientôt d’autres projets en voie qui verraient jours, seraient certainement autres sources de revenus.
Guineenews : nous assistons aujourd’hui au déclin de toutes nos célèbres formations nationales et fédérales. Des artistes de renoms sont encore en vie et si l’on vous proposait la création d’un orchestre national de Guinée, quelle serait votre réaction ?
Elhadj Chaloub Riad : écoutez, j’ai deux avis là-dessus. D’abord par rapport au passé, je dirais que créer un orchestre national en République de Guinée, c’est un recul. Nous avions eu des orchestres nationaux et fédéraux, des orchestres para militaires et même au niveau des universités. Il y avait une diversité, toutes les expressions de nos régions étaient représentées.
Tous ces ensembles en reprenant un morceau du terroir y mettaient chacun, sa touche particulière. Aujourd’hui parler de la création d’un orchestre national par rapport à ce riche passé, je dis c’est un recul.
Le second aspect, je dirais oui, si cet aspect de création est considéré comme étant un cercle d’apprentissage, de transmission. Parce que le grand problème aujourd’hui, c’est que les gens ne croient même pas que la musique guinéenne a atteint les sommets les plus novateurs en Afrique. La Guinée de par le monde est reconnue à travers sa musique, sa culture en général.
Aujourd’hui, ce que nous déplorons ou qui nous pousse à soutenir notre seconde position, est que cette jeune génération, ne tende plus l’oreille pour écouter les anciennes bouches. Ce passé glorieux de la musique guinéenne est nettement oublié ou ignoré par cette jeune génération. Tout y est pourtant pour apprendre ces vieilles leçons, écouter ce précieux trésor dont nous possédons et qui a servi. Donc réunir un certain nombre d’anciens pour recadrer cette jeunesse est salutaire pour mieux exploiter notre riche folklore.
Guineenews : très sentimental dans vos compositions et interprétations. À revoir votre clip dans le titre ‘’I bèlè’’ (Repose en paix), des larmes ont coulé sur vos joues. Du théâtre ou c’est l’état d’âme qui s’est échappé ?
Elhadj Chaloub Riad : oui c’est vrai, c’était réel. D’abord le texte en tant que tel, bien qu’il soit inspiré de la poésie, des écritures qui soient dans le coran, mais il y’ a des appels là dans, qui sont évidents. En plus c’est l’émotion, la compréhension, j’ai été saisi par le contenu du texte. Si on m’avait dit qu’un jour, j’arriverai à chanter une telle chanson, à créer de telles œuvres, certainement cela arriverait. Mais je n’étais pas sûr de pouvoir toucher à quelque chose qui a marché. L’émotion a vraiment dominé lors de l’enregistrement de ce clip.
Guineenews : ‘’L’histoire continue’’ c’est le titre du dernier album des Sofas de Camayenne. Peut-on croire à cette continuation ?
Elhadj Chaloub Riad : nous avions eu l’occasion de le prouver à chaque instant, bien que démembrés par suite à tous ces décès, les Sofas ont prouvé à travers ses répertoires, qu’il y a possibilités de revenir sur scène. Cet ensemble a eu l’opportunité de revenir dans son temple à l’hôtel camayenne pendant six mois et cela une fois par mois, pour le plaisir de ses fans.
Si le temps permet, je peux affirmer que nous serions encore par la grâce de Dieu apte à revenir sur la scène.
Kiridi Bangoura a aussi eu l’initiative de réunir tout ce monde avec qui, il a eu l’occasion et la complicité majeure d’écouter les répertoires des Sofas.
Dans le même ordre d’idées, Jean Baptiste Williams me propose de réaliser des clips de certaines de nos chansons bien que préexistantes et qui ne soient pas sur vidéo. ‘’Ces enfants’’, est ce titre déjà visé et qui a une portée et un contenu universel.
Guineenews : quels conseils avez-vous à léguer à cette génération pour laquelle vous ressentez un souci ?
Elhadj Chaloub Riad : elle n’a qu’à commencer et continuer à valoriser ce que nous avons. Ce n’est pas la peine d’aller chercher à gauche ou à droite, pendant que le trésor n’est pas profondément enfoui, il est à portée de main, à ciel ouvert. Paix à l’âme de Ansoumane Camara ‘’Petit Condé’, dont le groupe ‘’Stantard’’ s’est engagé pour faire revenir au jour la musique guinéenne.
Il faut valoriser ce que nous avons, en même temps c’est à notre possession et les autres cherchent à l’apprendre.
Entretien réalisé par LY Abdoul