Dans le débat en cours sur la nécessité ou non d’un dialogue politique, le cas des prisonniers politiques revient souvent. Notamment du côté de l’opposition où certains considèrent la libération des détenus comme un préalable. Parmi les acteurs politiques en détention, trois viennent de signer une tribune. Dans ce document dont Guineenews a reçu copie, si Chérif Bah, Ousmane Gaoual Diallo, Cellou Baldé n’ont pas tranché sur la question, ils n’excluent pas la libération. Mais le moins qu’on puisse dire c’est qu’ils l’attendent dans le cadre d’une décision de justice qui pourrait être le point de départ d’un « processus d’apaisement par le dialogue et la concertation dans le souci de renforcer l’unité nationale et la cohésion sociale ». En attendant, les pensionnaires de la maison centrale rejettent les accusations qui sont portées contre eux, clament leur innocence et réitère leur attachement aux principes démocratique et à la conquête du pouvoir par les urnes.
« Chers compatriotes,
Comme vous le savez, nous sommes incarcérés à la Maison Centrale de Conakry depuis plusieurs mois.
Prisonniers politiques pour les uns, prisonniers d’opinion ou otages politiques pour les autres, prisonniers tout court pour certains. Une chose est incontestable, nous sommes avant tout des Guinéens dont l’engagement et la lutte politique n’ont jamais été dirigés contre un individu ou un quelconque groupe de Guinéens.
Nous avons toujours mené notre combat avec le strict objectif de servir la démocratie, le respect de l’État de droit et la recherche du bonheur de nos concitoyens.
Il est important de rappeler que nous avons exclu, dès les premières heures de notre engagement politique, la conquête du pouvoir par la violence en choisissant, la voie des urnes qui demeure encore notre unique option. Ce choix démocratique est motivé par le fait que chacun d’entre nous considère que la violence ne peut être la solution et lorsqu’elle survient, nous l’avons toujours condamnée sans aucune ambiguïté. D’autant plus que c’est parmi nos amis du parti que le plus lourd tribut a été payé du fait des violences politiques et sociales ces dernières décennies en affectant directement de nombreuses familles et la cohésion sociale.
Pourtant, on nous accuse d’atteintes aux institutions, de pillages et même de participation à des mouvements insurrectionnels, etc. Quel fut notre stupeur à s’entendre dire être mêlés à de tels actes. Persuadés de notre innocence, nous nous sommes tous rendus volontairement devant les instances judiciaires espérant qu’elle agira avec impartialité et objectivité. De fait, nous n’avons opposé ni résistance, ni violence aux forces de défense et de sécurité, qui sont venus interpelés l’un de nous à son domicile.
Il est clair que notre probité, mais aussi les responsabilités que nous avons assumées à divers niveaux, nous empêchent tout comportement ou attitude incivique.
On comprendra aisément qu’il est impossible de remettre en cause notre engagement politique ; l’idéal qui les fonde et les nourrit. C’est pourquoi nous rejetons toutes les accusations de violence car cela ne nous ressemble pas. Et nous aurons l’occasion avec nos avocats de dire en détails notre vérité.
S’il est établi que le procès d’hommes politiques permet de juger un État sur le plan de la démocratie et du respect des libertés fondamentales, nous souhaiterions que ce défi soit relevé par l’institution judiciaire. Que peu d’entre nous puissent croire et miser sur le succès de cette volonté n’enlève aucunement notre foi en la justice. Il revient aux autorités de notre pays et, si nécessaire, avec l’appui des pays amis, d’en être le garant ; de veiller à l’équité et l’impartialité de l’institution judiciaire ; mais aussi à la neutralité de l’Exécutif.
Bien évidemment, c’est aux magistrats de mesurer l’importance et la portée des actes qu’ils sont appelés à engager dans le cadre de « l’affaire » nous concernant. Qui pourrait douter que son déroulement et l’issue qui en sortira constitueront un jalon essentiel dans la volonté de décrispation du climat politique récemment exprimée par tous les acteurs politiques, les ONG de défense des Droits humains, les pays partenaires de la Guinée et d’une certaine manière les autorités guinéennes. Dès lors un consensus s’est dégagée pour considérer que ce serait -là, un des premiers gages d’ouverture d’un dialogue constructif, consensuel et inclusif.
Pour nous, il est fondamental d’œuvrer dans ce sens afin d’amorcer le processus d’apaisement par le dialogue et la concertation dans le souci de renforcer l’unité nationale et la cohésion sociale. Nous espérons pouvoir apporter notre contribution en continuant de jouer encore notre rôle sur la scène politique au service de notre pays. Nous sommes persuadés que cela est possible si chacun veillait au respect des règles d’impartialité de nos institutions et des représentants qui exercent au nom du peuple.
Ibrahima Chérif BAH
Vice-président, membre du Conseil politique.
Ousmane Gaoual DIALLO
Directeur de la Communication, Membre du Conseil politique, ancien Député.
Mamadou Cellou BALDÉ
Coordinateur des fédérations de l’intérieur, Membre du Bureau Exécutif, ancien Député. »