Comme une épine dans le pied du gouvernement guinéen, la problématique énergétique se pose encore avec acuité. En dépit des investissements importants faits notamment dans la construction des barrages hydroélectriques de Kaléta et Souapiti. Sans oublier l’option de l’interconnexion avec certains pays voisins et les multiples solutions thermiques envisagées ou essayées. Le tout dans une gouvernance qui ressemble à une véritable nébuleuse.
L’arrivée jeudi dernier au port de Conakry de la centrale flottante turque Powership Ibrahim Bey relance le débat sur le casse-tête des délestages électriques en Guinée. Même si elle suscite de l’espoir aux yeux des populations de la capitale fortement éprouvées par la détérioration brutale du niveau de la desserte en électricité depuis l’incendie à Conakry du principal dépôt des hydrocarbures en décembre 2023.
Par expérience, il faut rester optimiste sans crier victoire avant le lancement de la nouvelle centrale prévu ce 25 août. Contrairement à une première version donnée par nos sources au ministère de l’Energie. D’autant plus que, selon une analyse reçue de l’administration centrale, cette solution bien que potentiellement salutaire, reste partielle.
« Le défi reste de taille pour le gouvernement guinéen », admet notre source. Il s’agit de « transformer le secteur énergétique guinéen pour en faire un modèle durable et économiquement viable », lit-on dans un document du département en charge de l’Énergie sur la question.
« La gestion des coûts d’achat et la mise en œuvre des réformes nécessaires détermineront l’avenir énergétique de la Guinée, un enjeu crucial pour le développement socio-économique du pays ».
Du coup, la question qui taraude les esprits des dirigeants, opérateurs et autres observateurs du secteur, est celle de savoir comment réussir le business sans se heurter aux contraintes liées aux habitudes et à la précarité ? Une équation dont la résolution n’est pas une option, mais un passage obligé pour peu qu’on envisage l’avenir avec sérénité. Surtout que le constat est unanimement fait dans l’analyse : « le prix d’achat de l’électricité en Guinée reste un modèle économique à perte. »
La grande inconnue demeure donc autour de la solution. Surtout qu’il ressort du document d’analyse, que « le pays, bien qu’assez doté en ressources naturelles, est contraint d’acheter l’électricité à diverses sociétés, avant de la revendre à perte aux populations, avec à la clé, une situation qui pèse lourdement sur les finances publiques ».
Une réalité d’autant plus préoccupante que le fait de diversifier les fournisseurs n’a pas été la panacée. En tout cas pour l’instant. A titre illustratif, « le gouvernement guinéen s’approvisionne en électricité auprès de plusieurs sources, avec des coûts différents », rappelle le document. Énumérant parmi les principaux fournisseurs, Tèpower qui vend le kilowattheure à 2 900 GNF, contre 1 200 GNF chez la Société de Gestion de Souapiti (SOGES) et 1 900 GNF à Sénélec.
Le dernier en date étant le Bateau Turc (fournisseur mobile) arrivé à Conakry le 15 août 2024, qui « négocie le kilowattheure à 1 700 francs guinéens, un prix plus favorable comparé aux 2 900 francs guinéens pratiqués sous la présidence d’Alpha Condé », indique ce document du ministère de l’Energie, lu par Guinéenews. Même si le manque à gagner reste lourd à supporter.
Les limites de la vente à perte, les réformes en cours
Pour rappel, « malgré ces prix d’achat élevés, l’électricité est revendue aux populations à un tarif subventionné de 800 francs guinéens le kilowattheure (en deçà des 1050 GNF qu’avait proposés l’ex-ministre Ibrahima Abé Sylla, ndlr), sur recommandations du gouvernement », insiste le document. Avant de déduire de «la nécessité d’opérer des réformes profondes dans le secteur de l’énergie » dans lequel, il faut noter que les termes des contrats, s’il y a eu appel d’offres, n’ont pas été divulgués au grand public.
Cela dit, confie notre source, « face à l’insolvabilité croissante des ménages et des institutions publiques sans oublier les industriels, le Président de la Transition, le général Mamadi Doumbouya, a donné des directives strictes pour l’installation de compteurs prépayés, à commencer par les départements ministériels, désormais tous équipés». Une sorte de serpent de mer. Car, les compteurs prépayés sont à l’ordre du jour depuis des années. Mais l’idée s’est toujours heurtée à une résistance, à cause des pratiques frauduleuses qui minent le système.
Poursuivant, le document informe que « cette première étape sera suivie de l’installation des compteurs dans les ménages, avec pour objectif une réforme en profondeur de l’EDG ». Ajoutant dans le même registre que « le ministère de l’Énergie a un an pour installer des centrales solaires dans les chefs-lieux des régions naturelles du pays ».