« Pour moi il y a trop d’acteurs qui ne participent pas à la construction de la vision de l’éducation en Guinée ».
C’est un secret de polichinelle. Le système éducatif guinéen a du plomb dans l’aile. Il est gangrené entre autres, par le déficit d’enseignants dans les établissements scolaires surtout en milieu rural, le faible niveau des élèves et même de certains encadreurs ou encore par le faible taux d’admission aux différents examens nationaux.
Face à toutes ces situations, Guinéenews a recueilli l’avis de l’ex-ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique. Sans complaisance, M. Baïlo Teliwel Diallo a fait le diagnostic du système éducatif guinéen tout en situant les responsabilités et en proposant des pistes de solutions.
A la question de savoir quel est le regard que Baïlo Teliwel Diallo porte sur le système éducatif guinéen, l’ancien ministre sous Alpha Condé répond avec mesure.
« C’est une question extrêmement complexe et difficile. Parce-que, premier contexte, chacun peut légitimement parler de l’éducation. (…). Les parents d’élèves doivent parler de l’éducation, les enseignants, les élèves, premier bénéficiaire doivent parler de l’éducation. Les organisations de la société civile, les structures techniques, les ministères en charge de l’éducation, le gouvernement et les partenaires au développement doivent tous parler de l’éducation. Et tout ça c’est légitime.(…). Sauf que si on ne
parle pas avec une perception plus ou moins objective, une vision plus ou moins claire, chacun va exprimer son opinion de façon plus ou moins fondée. Et parfois, c’est une opinion purement instinctive ou émotionnelle ou même politisée…. et quand tout ça se mélange, ça devient un problème. Pour moi c’est d’ailleurs le premier problème.
Pour moi, c’est comment on va construire ensemble une vision commune, acceptée, pertinente de l’éducation afin de dire voilà ce que nous voulons et c’est comme ça que nous allons faire. C’est à dire, construire la vision. Si on est d’accord, quelle est la part de responsabilité de chacun. Et comment il va l’assumer. (…). Tirer les leçons et aller sur des bonnes bases. Parce-que pour moi il y a trop d’acteurs qui ne participent pas à la construction de la vision de l’éducation en Guinée. Pour moi, la construction d’une vision est un élément clé pour résoudre tous ces problèmes liés à l’éducation, » explique à l’entame l’enseignant – chercheur.
Poursuivant M. Teliwel se rappelle que lors du premier régime » il y avait cet outil de la construction d’une vision. C’est ce qu’on appelle le conseil supérieur de l’éducation . Ça se préparait d’abord à la base. On se retrouvait au niveau central, au palais du peuple. Il y avait un discours d’orientation qui disait les grandes lignes. Toutes les entités étaient représentées. Et là, on en discutait. (…). On avait l’avantage d’avoir cet organe de pilotage et d’évaluation qui malheureusement a été jeté avec l’ancien régime. (…). Les sciences dures ont perdu de leurs attraits. On a mis beaucoup de droit, de miage, de banques et assurances. Du coup, nous avons perdu ce primat qu’on avait dans notre pays. On était le pays le plus avancé dans le domaine des sciences en Afrique de l’Ouest. Au point que quant les étudiants quittaient ici, c’était pour aller être professeur de maths, physique, chimie. Et ce, même s’ils avaient quitté les sciences sociales. L’autre problème, c’est là. On a abandonné presque les sciences exactes. Ensuite, on instaure le système LMD ( Licence- Master- Doctorat). Là aussi, on s’aligne sur le modèle canadien sans tenir compte de nos réalités » déploreTeliwel Diallo.
Pour remédier à toutes ces difficultés liées à l’éducation en Guinée, Baïlo Teliwel Diallo propose : « il faut remettre en place un système de pilotage national de l’éducation pour que cette question, à savoir : que faut -il aujourd’hui pour qualifier davantage l’éducation en Guinée ? Pour que cette question soit répondue là-bas.(…). Et qu’on dise voilà ce que les Guinéens pensent de la façon de redresser et de soigner l’éducation. Que cet avis soit partagé et discuté (…). Si on est d’accord sur ça, il n’y a pas un problème de l’éducation qu’on ne peut pas résoudre ».
Il faut aussi signaler que Baïlo Teliwel Diallo prône pour le retour et l’instauration des langues maternelles dans l’enseignement de base au sein de notre pays