Le 23 avril 2024, le Colonel Moussa Tiegboro Camara, était le seul accusé à être confronté aux victimes des événements tragiques du 28 septembre 2009. Ces victimes ont affirmé avoir été confrontées à la violence orchestrée par le Colonel Tiegboro. Lors de son contre-interrogatoire, le Colonel Tiegboro a balayé ces témoignages d’un revers de main. Il a affirmé que les propos rapportés par les victimes étaient inexacts et a insisté sur sa version des faits.
Amadou Diallo, journaliste, ancien correspondant de la BBC en Guinée, a relaté avec précision les événements de cette journée fatidique, soulignant le rôle du Colonel dans la tentative de dissuader la foule de tenir le meeting, avant de quitter les lieux, peu avant l’intervention des forces de l’ordre.
« Mon Colonel, moi je vous suivais. Je vous ai suivi ce jour-là. J’étais à quelques mètres de vous. Mon micro était ouvert. Je vous ai observé, vous étiez en train de parler, vous étiez même en train de me regarder. Lorsque vous êtes arrivé, la foule vous a acclamé, j’étais là. J’ai dit (dans sa dépêche pour la BBC, ndlr) que vous aviez été acclamé, mais j’ai également affirmé que vous aviez tenté de dissuader, et non de sensibiliser cette foule, de ne pas tenir le meeting ce jour-là. Lorsque vous n’avez pas réussi à les dissuader, et que la foule grossissait, et que les gens commençaient à contester vos propos, cela vous a énervé et vous avez fait un geste de la tête, pas de l’épaule, comme l’a dit Me Sovogui. Peut-être que c’est un geste inconscient, mais moi je suis un journaliste, j’observe. Dès que vous avez fait ce geste, vous avez quitté. Et dès que vous avez quitté, les policiers et gendarmes ont lancé les gaz lacrymogènes », a-t-il expliqué.
Des propos que le Colonel Moussa Tiegboro a niés : « Vous êtes journaliste, et moi je suis gendarme. Mes faits et gestes sont comptés et analysés minutieusement. Quand je dis que je suis gendarme, franchement je suis gendarme. Mon frère, il faut qu’on soit là pour dire la vérité devant ce tribunal. C’est une question d’histoire. Vous-même, vous avez un geste inconscient. Un geste, dans le commandement militaire, ne signifie rien. Ensuite, si les gendarmes et policiers ont lancé les gaz après mon départ, il ne faut pas oublier qu’ils avaient lancé les mêmes gaz lacrymogènes contre les gens avant mon arrivée. Deuxième facteur, c’est que vous êtes seul dans votre propos, un peu chimérique, parce que moi je ne sais pas d’où ça vient. C’est de la fiction. Ça ne vient pas de moi. »
Amadou Diallo affirme que Tiegboro a quitté la terrasse pour se rendre vers la 2e porte de l’université Gamal afin de rencontrer les leaders qui étaient bloqués là. Il était suivi par des véhicules de gendarmes. Le Colonel réplique qu’il était seul dans sa voiture. Mais le journaliste est catégorique : « Vous avez marché de l’esplanade jusqu’à la 2e porte de l’université. Vous étiez en pieds et en tenue militaire. »
« Ça, c’est lui seul qui le dit. Ce qui m’étonne dans cette affaire, c’est que chaque élément qui vient a son propos qui est propre à lui. Comment puis-je marcher à 150 mètres alors que ma voiture est garée juste là ? Moi, je suis monté dans ma voiture. Et elle ne s’est arrêtée qu’au niveau du barrage que la police avait monté devant les leaders. C’est là que je suis descendu pour contourner le barrage et rejoindre les leaders de l’autre côté », a répondu le Colonel Tiegboro.
Les accusations de violence physique ont également été abordées. Amadou Diallo a déclaré avoir été agressé par des gendarmes, qui lui auraient confisqué ses biens et lui auraient infligé une blessure au poignet à l’aide d’un poignard.
Le Colonel Tiegboro a nié vigoureusement ces allégations, remettant en question la crédibilité du témoignage et affirmant que ses gendarmes n’étaient pas équipés de poignards : « Ça commence à être clair. Ce monsieur, je pense qu’il se trompe. Ce qu’il explique comme ça, moi je n’y étais pas. Et mieux que ça, ces gendarmes de l’anti-drogue qui étaient venus en patrouille, je n’étais pas avec eux. Ce qu’il dit, je ne peux ni l’infirmer ni le confirmer. Mais ce que je peux dire, c’est que mes gendarmes de l’anti-drogue ne sont jamais dotés de poignards. Les poignards, ce n’est pas une dotation ».