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Impact du Covid-19 en Guinée : quand les prostituées tirent le diable par la queue

L’apparition du coronavirus a pratiquement mis au ralenti tous les secteurs de la vie économique et sociale du pays en plus d’avoir changé certaines habitudes. Ceux qui s’activent dans le plus vieux métier du monde en subissent les contrecoups avec l’état d’urgence et le couvre-feu instaurés par le Chef de l’Etat sur le territoire guinéen en vue de contrecarrer la propagation de la pandémie. Ces travailleuses du sexe qui préfèrent offrir leur service la nuit,  traversent actuellement une période difficile faute de clients, lesquels sont confinés. Les bars, dancings et trottoirs, lieux de racolage, étant quadrillés par la police.

L’épidémie du Coronavirus n’a pas seulement mis en chômage les travailleurs de certaines sphères de l’administration publique ou privée, les commerçants du secteur informel et autres. Son impact se ressent également sur les belles de nuit appelées péjorativement prostituées. Rien ne semble dorénavant marcher pour elles. Les clients et autres mecs à déplumer ayant fondu dans la nature à cause du coronavirus. Et les choses se sont beaucoup plus compliquées avec le couvre-feu instauré depuis le mardi 31 mars dernier par le président de la République. Plus personne n’ose circuler dans les rues de Conakry au-delà de 21 heures. Ce qui fait que les trottoirs sont déserts et les belles de nuit ne peuvent plus exposer leurs charmes. Rencontrées dans leur retranchement à l’intérieur des quartiers,  certaines ont accepté de parler sous le couvert de l’anonymat.

C’est le cas de Yariatou. B. une de ces jeunes femmes qui a choisi le commerce du sexe. Elle le pratique depuis l’adolescence, malgré qu’elle ait maintenant franchi le cap de la trentaine. « Ces temps-ci, les  choses  ne  marchent  plus  pour  nous  à cause du Covid.19. Tous les clients qui venaient me  voir    pour  solliciter  mes  services  ont fondu dans la nature. Ils refusent même de répondre à mes appels. Actuellement, je suis complètement fauchée et  je n’ai rien pour subvenir  à mes besoins et ceux de mes 4 enfants    que  je  dois  nourrir.  Je  suis  obligée d’emprunter  de  l’argent  à  un  de mes  voisins», a-t-elle dit.

Selon elle, l’apparition du coronavirus a eu beaucoup de conséquences sur son travail dès lors qu’elle pouvait se retrouver avec 250000 guinéens ou plus par jour. Et avec la présence du Covid 19 où chacun cherche à se prémunir, elle peut rester toute une journée sans avoir la somme de 30.000 GNF. N’ayant que ce métier pour nourrir sa famille, elle reste stoïque à la maison, priant que l’épidémie disparaisse le plus rapidement possible pour que les choses redeviennent à la normale et que son business recommence à marcher. Mais l’arbre ne doit pas cacher la forêt. Malgré l’état d’urgence, le commerce du sexe prolifère en douceur. Cette fois-ci, pas pendant la nuit, mais en plein jour dans les lieux qui échappent à tout contrôle. Tels que les motels dans les quartiers périphériques de Conakry.

Les prostituées adaptent leur travail au contexte

Ainsi, contrairement à ses collègues, Mabinty S. continue toujours de recevoir sa fidèle clientèle chez elle au quartier Yattaya-marché, dans la commune de Ratoma.  «  Le  Covid-19  ne  peut  pas m’empêcher  de  travailler  car  c’est  mon gagne-pain.  Tout ce que j’ai réalisé dans la vie, je l’ai eu en vendant mon magnifique corps », a-t-elle déclaré sans gêne. Avant de préciser : « mes amis (fidèles clients Ndlr) viennent me voir dans mon appartement  où  je  reçois de temps en temps.  Mais comme tous les Guinéens, je respecte les mesures d’hygiène en me lavant les bien mains, en y mettant les solutions hydro alcoolisée. Cette disposition est également valable pour mes visiteurs. Et après chaque contact avec un client, je prends le soin de bien me nettoyer par mesure d’hygiène », a-t-elle conclu Raby.

« Sans être une prostituée se désole qu’elle ne voit plus les nombreux hommes qui lui rendaient visite depuis la présence du covid-19 dans nos murs. Certains  hommes que    je  recevais  souvent    dans    la  soirée m’ont  clairement    dit    qu’ils  ne    pourront plus venir.  D’autres  m’ont  même  prié  de ne  plus essayer de les  joindre », fait-elle savoir, dépitée de ne plus avoir de mecs à déplumer. Ça aussi, c’est le coup fumant du méchant Covid-19.

L’envie plus forte que la peur ?

Ça a tout l’air. Sinon, bien que les bars qui les hébergent habituellement soient fermés, les prostituées continuent à travailler. Les prestations se font à domicile ou en des lieux sûrs (motels des quartiers de la banlieue). Ainsi, si de nombreux métiers sont impactés par la pandémie de coronavirus, la prostitution, elle ne chôme pas trop en ces temps d’état d’urgence. Après seulement quelques jours d’état d’urgence, nous constatons que la peur a laissé place à l’envie et des maisons de passe sont toujours ouvertes à Conakry. Pour éviter le chômage technique, les prostituées continuent à vendre leur charme malgré l’appel national au confinement.

Interrogés, beaucoup de personnes friandes de la « bonne chair » soutiennent ne pas pouvoir tenir face à la donne: l’état d’urgence qui les empêche de faire les tours des night-clubs et arpenter les rues censées être les nids des filles de joie. « La vie n’existe plus. Il n’y a plus de plaisir. On ne peut plus prendre un pot après le boulot. Les « nanas » se gaspillent les nuits …Cette nouvelle situation nous oblige à changer de tactique. On se débrouille dans la journée et le soir on se terre à la maison si comme de rien n’était. Mes amis et moi, avons des coins à Sonfonia et l’autre à Yattaya-plateau. Puisque d’ailleurs le service n’est plus ça. Les matins nous prenons la direction de nos lieux de plaisir où on se retrouve entre copains et bien sûr avec des filles de joie pour passer les journées avec elles. Nous sommes des êtres humains ! Le plaisir et l’envie peuvent l’emporter sur la peur ! D’ailleurs on est né pour mourir », tranche Younoussa B, un cadre d’une entreprise privée de la place.

Evidemment cette réaction qui représente en quelque sorte une mine d’informations nous a guidés vers certains motels des quartiers situés au périphérique de la capitale. Ainsi, voulant se désaltérer dans les environs de 11 heures, dans un hôtel de passe à Kaporo-cité non loin du marché, quelle ne fut pas notre surprise de voir ce petit bled rempli de monde ! Les prostituées, les proxénètes et les clients qui attendent leur tour pour entrer dans la chambre se saoulent à merveille au son d’une musique légère, dans une ambiance sourdine à ne pas attirer l’attention des passants. « Vous êtes là pour la remontada ? (Ce qui signifie si nous étions sur les lieux pour se rattraper Ndlr). Asseyez-vous et mettez-vous à l’aise », nous invite le tenancier à prendre place, avant de nous annoncer que dans ce temple de plaisir, la journée s’est transformée en soirée : « On ferme à 20 heures. Mais d’ici là, vous pouvez-vous réjouir ».

Partout où nous sommes rendus ce samedi 4 avril, c’est la même scène et la même ambiance en plein jour. Les maquis, les bars, les motels de passe ne désemplissent pas en cette période de confinement et d’état d’urgence.

Comment être amoureux en cette période du Covid-19?

Rester loin les uns les autres, ne pas sortir de chez soi, éviter de se rendre dans des lieux publics, l’épidémie de coronavirus bouleverse nos relations sociales, jusqu’aux plus intimes. Comment continuer à avoir des relations amoureuses, s’interrogent beaucoup de personnes. Comment témoigner de l’affection pour ceux qu’on aime, en gardant une distance réglementaire ? “Faire l’amour, dans une chambre ou n’importe où ailleurs prend une autre dimension lorsqu’on craint que ce contact fasse de nous le nouveau contaminé”, constate notre interlocuteur. “On nous ordonne de nous tenir à 1,80 m de distance les uns des autres pour ne pas risquer de transmettre la maladie. Mais alors, est-ce que cela veut dire que les célibataires ne doivent plus aller à des rendez-vous galants ? Les coups d’un soir sont-ils à proscrire ? Et pour les couples installés, le Covid-19 doit-il changer quelque chose ?”s’est interrogé Soul, un gérant de boite de nuit de la place.

En effet, si le Covid-19 n’est pas une maladie sexuellement transmissible, dès lors qu’elle peut se transmettre par la salive, s’embrasser est tout simplement le meilleur moyen de contracter la maladie.

Pour les restaurants, bars, commerces, c’est le coup de massue

Depuis quelques semaines, les restaurants, les bars, les cafés, les night-clubs, les commerces et autres lieux de vie ont presque fermé leurs portes jusqu’à nouvel ordre. Sont restés ouverts les magasins et marchés alimentaires, les pharmacies, les stations-services, les banques et les kiosques à tabac. C’était la décision prise par le gouvernement guinéen.

Juste après décision, les restaurants que nous avions contactés se disaient déjà inquiets : « On ne sait pas trop où on va ni comment ça va se passer », déplore M’mah Touré, patronne du restaurant « Moryatoundé », situé à Koulewondy dans la commune de Kaloum. En effet, depuis le début de la pandémie du Coronavirus qui progresse dans le monde et notamment à Conakry, l’inquiétude grandit chez les tenanciers. Et à juste raison. Les clients ne se bousculent plus. Conséquences beaucoup ont fermés.

Au niveau donc des restaurants qui résistent encore au temps, la baisse de la fréquentation est aujourd’hui flagrante, constat réalisé dans le restaurant « Morya Toundé » où la veille encore, la tenancière disait : « Tant qu’on ne nous demande pas de fermer, on travaille. Il y a des salariés à payer donc nous n’avons pas le choix »,

Une situation complexe que l’on retrouve aussi dans le secteur hôtelier. En cette période de l’année, les annulations sont quatre fois plus importantes que l’année dernière à la même date, constate un responsable d’un hôtel quatre étoiles de la capitale  Pour ce mois d’avril, beaucoup des établissements prévoient entre 1% et 10% de taux d’occupation seulement. Et pour le moment, les solutions restent floues. Alors que certains craignent la fermeture de leur restaurant, Mme Touré, citée plus haut confie : « On est comme tout le monde, on écoute les infos. Il y aura peut-être une aide ou un report des charges mais on en sait pas plus ».

Même scénario pour Babacar Seck, restaurateur qui possède deux établissements, « Keur Samba » à Kaloum et « Les Délices des îles ». Depuis le début du mois de mars, il avait enregistré une baisse de 25% sur son chiffre d’affaires. Malgré les nombreuses mesures d’hygiène mises en place dans ces restaurants, la fréquentation n’est pas au rendez-vous. « C’est très dur financièrement. Si l’Etat n’intervient pas, d’ici un mois sans indemnités, je vais fermer, c’est mort, je ne pourrais pas remonter ».

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