Au vu de sa mission, la direction générale du casier judiciaire a un rôle essentiel au sein de l’administration judiciaire guinéenne. Seulement, en dépit de la volonté affichée des autorités, la digitalisation qui est un passage obligé pour que le service joue pleinement sa partition, tarde à se mettre en place.
Pour rappel, un décret datant de février 2019 avait fixé les modalités, l’organisation et le fonctionnement du service du casier judiciaire central érigé en direction générale au sein du ministère de la Justice.
Dans cet acte, selon le directeur général, Boubacar Baldé interrogé par Guineenws, il est clairement dit que « ce service est l’autorité nationale du service du casier judiciaire en République de Guinée ».
A ce titre, explique-t-il, « elle est censée coordonner avec toutes les juridictions du pays en matière de casier judiciaire ».
Et d’ajouter que « si tout se passe comme il est prévu, après la digitalisation, cette direction est censée avoir le bulletin de tous les guinéens nés à l’étranger et celui de tous les étrangers, via le ministère des affaires étrangères. »
Puis, d’informer que dans ses activités, il y a la collecte des données. C’est pourquoi, explique-t-il, « cette direction a des agents de saisie pour recenser toutes personnes défensivement condamnées et ces informations sont logées dans la base de données. »
Le plus difficile reste à faire
De très bonnes intentions, certes. Mais comme c’est souvent le cas sous les tropiques, le processus en cours est handicapé par un double mal presque congénital. D’abord, « le contrat n’a pas été bien ficelé », révèle l’actuel DG. Sans compter que « le contrat a été signé par le directeur seul ».
Alors que, rappelle-t-il, « le Directeur du casier judiciaire seul ne peut pas engager l’Etat. Il faut qu’il y ait le ministère de l’Economie et des Finances ». Des faits « dénoncés » par la direction actuelle « sur instructions du ministre », confie monsieur Baldé.
Les anomalies identifiées, il faut désormais s’atteler sur la suite qui ne sera visiblement pas du beurre à couper. Parmi les options sur la table, une discussion avec « l’adjudicataire » actuel « pour établir un nouveau contrat avec les services compétents », informe notre interlocuteur.
Parce que « le partenaire a fait beaucoup de choses. Même ces serveurs-là, c’est lui qui les a livrés », avoue-t-il. Et d’argumenter que « vouloir chercher un autre, le temps que celui qui doit venir puisse s’implanter, ça risque encore de prendre du temps ». Sans compter qu’il faudrait se préoccuper de ce qui est légalement possible.
Situation actuelle et changement espéré
En attendant, au niveau des six (6) juridictions pilotes situées initialement à Conakry, Coyah, Dubréka et Kindia, il n’y a que le département et les tribunaux de Kaloum et Dixinn qui sont dotés du système mis en place par ‘‘le vrai faux adjudicateur’’.
A Mafanco, l’on se serait heurté à un problème de local pour abriter les équipements.
D’ailleurs, selon M. Baldé à Dubréka, Coyah, Kaloum, Mafanco et Dixinn, les juridictions utilisent les services d’une société de la place pour établir une base de données, via un logiciel, « mais à leurs propres frais ». Une solution palliative grâce à laquelle, « tout ce que ces services délivrent comme acte, que ce soit casier judiciaire, certificat, tout ce qui est actes judiciaires, c’est sécurisé avec le code QR», rassure-t-il tout de même.
Pourtant si cette digitalisation intervenait, selon le directeur général, elle pourrait offrir la possibilité aux citoyens nés en Guinée mais en dehors de Conakry, de demander et obtenir leur bulletin de casier judiciaire à partir de la direction générale, sans se rendre à leur lieu de naissance.
Avec un paiement mobile qui sécurise les recettes en mettant les responsables des services déconcentrés à l’abri des risques liés aux déperditions enregistrées pendant l’impression par exemple… Surtout que, grâce à une programmation intégrée, la tutelle « est censée connaître par jour, par semaine ou par mois, le nombre de casiers judiciaires livrés sur le territoire national. »
Egalement, « si le travail est fait comme il faut, à partir d’ici, on peut savoir si un Guinéen est condamné ou pas, même à l’étranger. Idem pour un étranger résident ici (…) », toujours selon notre interlocuteur.
« En attendant ce jour », comme disait le célèbre ragea-man ivoirien, Alpha Blondy, les juridictions et autres services concernés délivrent les casiers judiciaires dans les conditions classiques. Même si, à en croire M. Baldé, c’est « sur des bulletins sécurisés. Pas comme sur des feuilles volantes. »
Et de son côté, au niveau de l’administration centrale, il y a un projet d’arrêté de tarification des services judiciaires, le règlement intérieur du service et son organigramme, le plan d’action 2024 est en cours d’élaboration. Comme pour dire qu’on n’y dorme pas sur ses lauriers. Bien que cela ne change en rien, le fait que le chemin de la digitalisation annoncée du service du casier judiciaire soit encore long.