«…La Guinée doit aller vers des réformes électorales ou légales plus sérieuses qui ne soient pas dictées ou téléguidées par des arrangements politiques...»
En mission à Conakry, le représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et du Sahel, Mohamed Ibn Chambas, a rencontré les acteurs sociopolitiques de la Guinée pour une éventuelle sortie de crise. Pour connaître les dessous de cette « rencontre habituelle », nous avons joint au téléphone Dr Dansa Kourouma qui est l’un des acteurs de la société civile que le Ghanéen a rencontré lundi à Conakry. Ce tête-à-tête fait partie du « volet consultation de la société civile. Ce n’est pas une spécificité liée à cette crise. Chaque fois que des missions de bons offices sont initiées, il y a toujours un volet rencontre et consultation de la société civile », précise l’activiste de la société civile guinéenne.
L’objectif de la rencontre entre Chambas et les représentants de la société civile guinéenne «était de recueillir non seulement l’avis de [cette dernière] par rapport à la crise actuelle mais aussi son analyse pour aider la mission à comprendre un peu avec un autre langage, un autre regard sur la situation sociopolitique du pays.»
Dans un premier temps, explique le président du Cnosc, il était question de notre regard sur la situation sociopolitique mais aussi avec un focus sur la crise politique actuelle, la situation des droits de l’homme, des libertés sans oublier les agendas électoraux.
A cela, il faut dire que la crise née des élections locales a occupé une part importante de la discussion, rapporte notre interlocuteur. Selon Dr Dansa Kourouma, il a été question de « l’agenda électoral [qui prend] en compte les élections locales, ensuite les perspectives des élections législatives et tout ce qui est lié au processus électoral dont la dimension audit du fichier et tous les autres aspects qui sont nécessaires aujourd’hui pour aller à des élections crédibles ».
Auparavant, révèle le président du Cnosc, « la mission [conduite par Ibn Chambas, ndlr] avait déjà rencontré le chef de file de l’opposition, Cellou Dalein Diallo et d’autres acteurs politiques mais aussi le gouvernement ». Pour lui, « cette mission est venue au bon moment. Nous n’avons pas hésité de lui dire certaines indications pour lui permettre de proposer des solutions aux parties notamment au gouvernement ».
Aujourd’hui, estime cet acteur de la société civile, « la Guinée doit aller vers des réformes électorales ou légales plus sérieuses qui ne soient pas dictées ou téléguidées par des arrangements politiques parce que tout le gros problème de la Guinée, ce sont les lois et leurs applications ». La résolution de ce problème donnera « une certaine solidité et une certaine longévité des institutions ». Mais, prévient-il, « si les lois sont mauvaises et sujettes d’interprétations parfois partisanes, il sera difficile d’organiser avec sérénité des consultations électorales qui puissent être acceptées et apaisées ».
Autres sujets abordés…
La rencontre entre Ibn Chambas et la société civile s’est également portée sur « la question des droits humains ». A cet effet, la société civile s’est exprimée sur l’installation des PA (Poste d’Appui) et « la décision du gouvernement de restreindre les droits de manifestations ».
Pour cela, Dr Kourouma dira : « nous étions porteurs de message pour dire aux autorités qu’on ne peut pas interdire systématiquement les manifestations mais l’Etat qui détient la puissance publique doit les réglementer. Parce que le code pénal a quand même des dispositions pertinentes qui permettent de réglementer les manifestations ».
Mais, l’activiste de la société civile pense que « nous sommes dans une situation où l’autorité publique ne veut pas appliquer la loi. Entre les gains politiques faciles à gagner et l’application de la loi qui est difficile, le bon visionnaire politique, le bon stratège politique, a tout à fait l’obligation de choisir la voie qui est celle de la loi. Malgré les difficultés que cela peut constituer parce qu’elle est plus durable et plus légitime ».
Sur ce, la société civile guinéenne suggère que l’interdiction de manifester « soit revue parce qu’on ne peut pas du tout bâillonner les libertés individuelles. Cela ne peut pas rester impuni ».
Aujourd’hui, martèle Dansa Kourouma, « nous sommes dans une situation globale où l’Etat a beaucoup à faire pour construire une stabilité globale ». Avant de mettre en cause le code électoral qui arrange les ‘’grands’’ partis au détriment des citoyens.
Enfin, le président du Cnosc pense que « Ibn Chambas connaissant la Guinée et jouissant d’une crédibilité pourra amener le pouvoir et les acteurs politiques vers des meilleurs sentiments ».