De toutes les mesures sociales complémentaires incluses dans le plan de riposte à 3 000 milliards de francs guinéens du gouvernement au Covid-19 en Guinée, celle concernant les loyers reste la plus confuse. Cette confusion s’amplifie et génère à sa suite des interprétations les plus contradictoires au sein de l’opinion nationale. Vu la cacophonie qui s’installait, la Primature se voit dans l’obligation d’apporter quelques clarifications par rapport à cette annonce du Premier ministre. D’après un conseiller du Chef de gouvernement ce blocage des loyers n’est synonyme d’une suspension ni de la gratuité pour les locataires. Il s’agit du blocage de toute augmentation du loyer à compter de ce mois d’avril jusqu’au mois décembre. Cela est valable aussi bien pour les bâtiments publics (Dieu seul sait combien ils en existent encore en Guinée) que pour ceux des particuliers.
C’est quoi bloquer un loyer ?
Le terme même ne fait pas l’unanimité et reste incompris même au sein des intellectuels. « Il faut d’abord qu’il nous explique c’est quoi bloquer un loyer. C’est vraiment flou », nous a indiqué Me. Pépé Antoine Lama, avocat.
« Monsieur le Premier ministre, je veux savoir en français facile ou en soussou le sens de ces mots : geler, bloquer, suspendre etc. Sinon, gratuit on connaît, réduit aussi, mais le reste Walayi mou ma Kolon féwou (SIC) », a écrit avec une dose d’ironie l’activiste de la société civile Dansa Kourouma sur son compte Facebook. Comme lui, les réactions sur l’incompréhension du terme sont nombreuses sur les réseaux sociaux.
‘’Une simple annonce’’
Même expliqué, le blocage du loyer pose un problème juridique sur le fond. « Pour bloquer le loyer, il faut nécessairement une loi. Selon le Code civil, le loyer est librement négocié entre le propriétaire et le locataire. Pour faire une exception à ce principe, il faut prendre une loi qui dira que le niveau de loyer est bloqué à tel niveau de telle période à telle autre », indique un juriste consulté par Guinéenews et qui a requis l’anonymat. Et de déplorer : « malheureusement, j’ai comme l’impression que le niveau des conseillers juridiques à la Primature n’est pas… »
« Le fait, c’est que le locataire ne peut pas empêcher son bailleur d’augmenter le loyer parce que tout simplement le Premier ministre a parlé. La parole du Premier ministre ne peut pas remplacer une loi », renchérit Souleymane Camara, un autre juriste. En attendant donc une éventuelle loi sur le blocage du loyer au niveau actuel – les loyers sont fixés selon les bailleurs –, la mesure du Premier ministre reste donc une simple annonce et très confuse.