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Dossier-Arnaque sur le rachat d’or et de diamant : La Guinée est-elle devenue une plaque tournante ?

Après la Sierra-Leone, le Mali, le Ghana, le Nigéria, le Sénégal, le Cameroun, la RDC, le Burkina-Faso, la Côte d’Ivoire, le Bénin, les fraudeurs ont désormais élu domicile en Guinée. Les escrocs de poudre d’or et de métaux précieux  dupent et arnaquent des centaines de personnes, plus particulièrement des expatriés. Il ne se passe pas une semaine, sans que les services de sécurité et la justice ne soient saisis par des victimes. Et ce ne sont pas des gens pauvres et ignorants qui se font arnaquer et délester de leurs économies. Mais des hommes d’affaires nantis et instruits qui font les frais de la ruse des escrocs qui squattent dans les hôtels de luxe de la capitale. Lors de notre passage dans les locaux de la Direction Centrale de la Police Judiciaire, nous avons trouvé un homme d’affaire européen en train de pleurer à chaudes larmes dans le bureau du service investigations. Il venait d’être victime de deux faux diamantaires qui ont pris la poudre d’escampette, la veille.  Après la DCPJ, nous sommes allés à la rencontre d’une autre victime de faux diamantaires. Récit.

Lors de son séjour à Conakry en décembre dernier, Geoffroy Van A, cet investisseur Belge, désireux de mettre en place en Guinée une centrale d’achat d’intrants agricoles, a été abordé à l’hôtel Sheraton où il résidait, par Mamadi Cissé et Sékou Mohamed Fofana, deux soi-disant diamantaires qui lui parlent d’autres opportunités d’affaires en Guinée. A la suite de cette prise de contact, le nommé  Mamadi  Cissé appellera le sieur Geoffroy Van, rentré à Bruxelles, pour attirer son attention avec insistance sur une prétendue chute du prix de l’Or en Guinée. Une situation qu’avancera « le diamantaire » pour inviter l’investisseur à saisir cette opportunité. Le dimanche 2 février dernier, Geoffroy  qui veut faire son premier essai en Guinée, atterrit à l’aéroport de Conakry-Gbessia où il est accueilli par Mamadi et son compère Fofana qui lui avaient déjà réservé une chambre à l’hôtel Sheraton.

Le lendemain, un rendez-vous pris entre Geoffroy Van A. et ses fournisseurs se tient dans le bureau d’un certain Bérété à « Manquepas », dans la commune de Kaloum. Sur place, une présentation de quinze kilogrammes d’or est faite au Belge qui souhaite en prendre dix. Mais, à condition que cette quantité soit d’abord acheminée dans une fonderie spécialisée en Italie. Une étape de vérification conditionnelle à la conclusion du marché. A cette condition, les fournisseurs qui disent accepter la proposition de l’homme d’affaire Belge, lui demandent de payer 650 millions de francs guinéens, couvrant les frais d’acheminement du produit à la fonderie pour fins de vérification. L’acheteur s’exécute en toute confiance.

Dans les clauses, il était attendu à ce que les fournisseurs remboursent les 650 millions à la vérification. Reparti en Belgique pour attendre l’arrivée du colis à la fonderie, Geoffroy apprendra de ses fournisseurs que le colis a été intercepté à la BCRG pour faute d’assurance. Encore, ses prétendus fournisseurs basés à Conakry lui demandent des sous pour débloquer la situation. Entretemps, M. Geoffroy Van qui a pris le soin de vérifier le bienfondé des allégations de ses fournisseurs, se rend compte qu’il avait affaire à un réseau de faussaires. Depuis, le lien est coupé et Geoffroy peine à retrouver ses bourreaux. Très rapidement, il prend attache avec un cabinet d’avocats de la place, afin de rentrer dans ses droits. Depuis le 10 février dernier, une plainte de Geoffroy pour « escroquerie, faux et usage de faux et association de malfaiteurs » a été déposée au Tribunal de Première Instance. C’est donc l’histoire de cet investisseur Belge freiné dans son élan.

Si pour Geoffroy qui veut investir en Guinée, d’abord avec son projet d’une Centrale d’achat d’intrants agricoles en cours d’étude avec les autorités, le milieu est profitable, il s’avère tout au moins que l’insécurité règne dans les milieux d’affaires pour se prémunir des risques, il faut dire que les autorités doivent redoubler de vigilance pour protéger les investisseurs qui sont quelquefois victimes des escrocs. Un autre obstacle qui ne rassure pas les investisseurs.

Espérons aussi que la Justice vers laquelle les yeux sont rivés, fasse en sorte que force reste à la loi en mettant le grappin sur tous ces escrocs qui pullulent à Conakry, plus particulièrement dans la commune de Kaloum. Bien que ceux-ci bénéficieraient de complicité au sein de l’appareil d’Etat. Comme c’est souvent le cas.

 Deux Guinéens mis en examen à Paris dans une affaire d’or

 Aux Affaires Etrangères où nous sommes passés, on nous a raconté l’histoire de deux Guinéens qui ont escroqué un retraité suisse en lui promettant un important stock de lingot d’or d’une valeur de 10 millions d’Euros. Le vieux retraité a été floué de près de 3millions d’Euros, alors qu’il espérait récupérer 250 kg d’or auprès d’une mystérieuse ressortissante Guinéenne.

Selon nos sources, ces deux hommes, soupçonnés d’avoir mis au point le scénario alambiqué de cette arnaque dite à la nigériane, viennent d’être interpellés par les enquêteurs de la brigade de recherches et d’investigations financières (BRIF) de la police judiciaire parisienne, à Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis) et Caen (Calvados). Ils ont été mis en examen pour « escroqueries en bande organisée », avant d’être placés en détention provisoire.

Les deux escrocs seraient parvenus à faire croire à leur victime, domiciliée à Berne, en Suisse,  qu’il allait pouvoir mettre la main sur un impressionnant stock de lingots d’une valeur de plus de 10 millions d’Euros. « Au départ, un des deux suspects a pris attache avec la victime, expert-comptable à la retraite, avant de lui expliquer qu’elle pouvait espérer d’importants dividendes sur la vente de 250 kg d’or », confie le diplomate guinéen qui a été mis au courant du dossier. « Cet or était censé provenir d’un héritage d’une femme, résidant à Conakry. Pour mieux assurer leur victime du sérieux de l’affaire, les deux complices ont imaginé l’intervention d’un faux diplomate. L’un des deux a endossé ce rôle. »

C’est alors qu’entre en scène un certain « M. Souleymane C », représentant de l’Etat Guinéen. L’homme assure au vieux Suisse que l’or sera « rapidement acheminé en Suisse », à condition que les droits de succession soient réglés. Le piège se referme alors. « L’expert-comptable a versé plusieurs importantes sommes aux deux escrocs, pensant avoir affaire à des intermédiaires »,  poursuit la même source. « Ces derniers lui ont également fait miroiter le versement d’une première commission d’un million de dollars. Evidemment, il n’a jamais vu la couleur de cet argent, ni les lingots tant promis… »

Selon toujours notre source, pour faire patienter leur victime et lui soutirer un maximum de fonds, les deux malfrats l’ont fait venir à Conakry, avant de lui présenter de la poudre d’or, issue du même stock que les lingots.

C’est seulement en se présentant, au mois d’octobre, auprès des services de la douane en France, en possession d’un document lui assurant la propriété de cet or, que le retraité Suisse a fini par comprendre avoir été l’objet d’une vaste supercherie… Forts de la description des deux suspects et de leur mode opératoire, les enquêteurs ont rapidement remonté leur piste.

 « Plusieurs faux lingots d’or ainsi que de la fausse poudre et une mallette remplie de billets noircis ont été saisis chez un des suspects », révèle le diplomate guinéen qui s’est approché de l’affaire.

 « Ces billets devaient servir à une autre arnaque connue sous le nom de wash-wash. Cette escroquerie consiste à soutirer plusieurs dizaines de milliers d’euros à une victime qui croit acheter un produit, capable de laver de l’argent noirci d’encre… »

Modus operandi des escrocs

Pendant nos enquêtes, il nous  a été rapporté que ces escrocs sont de vrais professionnels. Ils utilisent toujours les numéros de téléphone qui ne sont pas traçables. Les victimes viennent généralement à travers de telles arnaques par des e-mails non sollicités et par des faux sites internet. Où les escrocs utilisent Facebook ou LinkedIn comme prisent de contact. Les acheteurs pensent souvent à tort avoir des connaissances suffisantes  ainsi que de bonnes relations en Guinée.

Aux dires de nos interlocuteurs, lors de nos investigations sur le terrain, les arnaqueurs déclarent qu’ils sont en possession de la poussière d’or ou de l’or en lingot ou d’autres métaux précieux qui seront vendus à près de 20 % à 50% moins cher que le prix de marché.  De manière à faire croire à l’acheteur qu’il a la possibilité de réaliser des bénéfices extraordinaires. De plus, ils annoncent la plupart du temps des quantités importantes. Or, il faut bien être conscient que de grandes quantités d’or ou de métaux précieux  sont difficiles à extraire, à stocker et à thésauriser. Cela demande beaucoup de travail, d’énergie et d’argent.

 C’est vrai. Les hommes d’affaires expatriés atterrissent à Conakry avec des moyens et des facilités logistiques qui n’ont aucune difficulté à réaliser des affaires et à les contrôler. Mais les fraudeurs fournissent toutes les certifications, les licences, les assurances papiers, certificats, factures aux vendeurs qui sont tous des faux. Rien d’autre qu’une création « Photoshop » de ces documents. Ils mettent de l’entrain à faire croire à l’acheteur que le vendeur est une personne réelle et que l’or ou la matière précieuse existe bel et bien. Ils font donc des photos de faux lingots parfois même sur balances.

Le but des soi-disant vendeurs est de faire courir après l’or, même si au départ les clients sont fermes sur l’argent. Un mois plus tard, la résistance à mettre des fonds sera bien amoindrie et la tentation de mettre quelques milliers d’euros dans l’affaire sera là.  Il y a toujours un montant initial (ou plus tard) que l’acheteur devra payer pour une inscription, un impôt, les formalités administratives, etc…, qui peut être très variable, de quelques milliers de dollars à des montants parfois hallucinantes. Cet argent ne sera jamais retourné à l’acheteur et, finalement, l’acheteur ne verra jamais l’or ou alors une fois en douane en Europe, l’or une fois dédouané sera tout simplement faux.

Les autorités érigent des garde-fous contre les escrocs

Les arnaques sont une source de stress pour bon nombre de personnes qui se rendent en Guinée. D’après des études et sondages, les étrangers et expatriés sont les principales victimes d’escroquerie ou de fraude. Les cas d’arnaque sont nombreux surtout ces derniers temps. Dans les couloirs de la Banque Centrale, on apprend que   des dispositions sont prises pour permettre aux étrangers et autres investisseurs de profiter pleinement de leur séjour sans tomber dans la déprime. Ces dispositions concerneraient l’achat de l’or, du diamant et tous les autres métaux  précieux en République de Guinée.

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