Le gouvernement guinéen multiplie les initiatives pour mettre de l’ordre dans les finances publiques. Le seul hic, c’est que parmi ces mesures tous azimuts prises pendant qu’il affiche une volonté de relancer l’économie en payant les créances de certains entrepreneurs locaux, certaines risquent de produire l’effet boomerang.
Dans un communiqué signé du Chef d’état-major général des armées, le colonel Sadiba Koulibaly, en fin janvier dernier, le CNRD « organe central de définition et d’orientation stratégique de la politique économique, sociale, culturelle et du développement du pays » pendant la Transition, a ordonné « la suspension de l’émission des titres fonciers et les baux emphytéotiques et les baux de construction jusqu’à nouvel ordre. »
Une mesure restrictive qui ne fixe aucune durée dans le temps et dont l’effet boomerang est quasi certain. En tout cas, de sources concordantes, les opérateurs de la filière de l’immobilier risquent de subir de plein fouet cette décision avec beaucoup de chômage à la clé.
Abordant le sujet, un ingénieur civil, requérant l’anonymat, tire la sonnette d’alarme : « ils vont nous plonger dans le chômage. » Et d’ajouter : « c’est toute une chaîne qui est ainsi bloquée. Des ingénieurs aux ouvriers en passant par les vendeurs de matériaux de construction ».
Du côté de l’ordre des ingénieurs, un interlocuteur déplore tout d’abord que le CNRD soit vague dans son communiqué. Puis de dénoncer une certaine confusion sur fond de violation du droit de propriété. En principe, rétorque-t-il, « si vous voulez par exemple bailler votre domaine pour une construction, il n’y a pas une loi qui vous l’interdit. »
Interroger sur le même sujet, un entrepreneur affirme : « ça va affecter (la filière) d’autant plus que sur la chaîne, il y a les ingénieurs (géomètres, géologues, électriciens), les notaires, les architectes, les entrepreneurs, les ouvriers des différents corps sans compter les fournisseurs des différents matériaux. Tout cela, c’est de l’emploi, ce sont les architectes, des gens qui travaillent avec des familles derrière. »
Un manque à gagner conséquent pour les populations fortement éprouvées par la double crise due à la pandémie de Covid-19 et au changement de régime, mais aussi au niveau de l’Etat qui doit percevoir des impôts et autres taxes sur toute la chaîne.