Depuis l’effondrement de l’immeuble en construction de Coronthie, le ministère de l’Urbanisme, de l’Habitat et de l’Aménagement du Territoire s’est réveillé contre les constructions anarchiques et contre celles qui ne respectent pas les normes de construction. Mais les mesures et dispositions élémentaires prises laissent à redire. Parce que la compétence des maîtres d’œuvre et la qualité des matériaux de construction employés en Guinée ne sont pas mises en question, alors que…
Sur le marché, deux sortes de fers à béton sont proposées avec différence de prix: le fer importé coûte plus cher que l’autre. Fer n’est pas fer. Mais si les fers importés sont de meilleure qualité, cela est indéniable, rien ne dit qu’ils sont dans toutes les normes et exigences requises, puisqu’aucun test de résistance connu ne les certifie pour de tel et tel emploi.
Dans le besoin morbide de faire des économies, les utilisateurs font aveuglement confiance aux données des fabricants et importateurs, tout en sachant que les industries d’acier et de ciment sont les plus véreuses en malfaçons.
Dans les années 2000, on entendait des effondrements en cascade d’immeubles au Caire, en Egypte. La vétusté était en cause, mais que des dizaines d’immeubles s’écroulent dans un intervalle de temps aussi rapproché, la qualité des matériaux et les expertises dans leur mise en œuvre ne sont pas hors de cause.
Au Sénégal, dans la même période, des constructions en cours d’édification s’écroulaient, la qualité des matériaux et la compétence des exécutants des travaux étaient indexées, mais on n’a plus entendu les conclusions pour déterminer les véritables causes.
La piraterie et les malfaçons dans les industries de production des matériaux de construction sont connues depuis toujours, il n’y a pas que ça, il y a des imposteurs qui prétendent être des ingénieurs, architectes et entrepreneurs dans le bâtiment, ils sont à démasquer.…
Ce qui est scandaleux, c’est le laxisme, le fait de laisser les gens engager toutes leurs économies pour édifier des immeubles de plusieurs niveaux, ou des usines à grande pollution, dans des quartiers primitifs, entre des petites masures. Les zoning et zonage ne sont pas de rigueur. On a vu ce qu’un immeuble de plus de cinq étages peut causer comme dégâts collatéraux…
Dans le sillage de l’habitat, les architectes de Guinée sont très morveux après l’effondrement spectaculaire de Coronthie, qui n’est pas le premier, puisqu’un autre immeuble en construction avait fait patatras à la Minière, il y a 3 ans. L’association des architectes s’est réunie pour extirper de leur rang les imposteurs. Pour se faire, il aurait fallu se préoccuper d’abord d’un service de contrôle et d’inspection de sécurité de travail avec des lois et règlements ? Dans des chantiers de construction à risque, que vaut telle ou telle infraction ? Il y a un cahier plein de charges à mettre à la connaissance des professionnels du BTP.
En outre, a-t-on pensé aux mesures antisismiques pour les immeubles? La Guinée est sur une ligne sismique. En 1984-85, il y a eu le tremblement de Koumbia, au nord du pays. On parlait de 200 ou 300 morts en zone rurale; dans les années 90, il y a eu une violente secousse partant de l’océan vers l’intérieur. A la ferme du CFP de Ratoma, on a vu une faille profonde de 10 centimètres de large, qui allait à l’infini vers Kaporo-rail, en direction de Koumbia, vers le Nord.
A présent, la question nous vient à l’idée que le plateau de Koloma, qui est réservé pour transférer le centre directionnel de Conakry avec de grands immeubles, est sur cette ligne sismique. Mieux vaut prévenir que guérir.
Il faut une vision politique dans l’urbanisation
Hormis tous ces ‘’gnimi-gnama’’ sans grande importance, il faut dire que la Guinée est un pays à démographie galopante. En 1960, l’on avait entrepris de construire un stade de football avec la collaboration de l’URSS pour 25 mille places, Conakry comptait moins de 200 mille habitants… Le Stade du 28 Septembre est devenu trop petit ; celui de 50 mille places de Nongo, don de la Chine, sera petit, demain.
Dans la même lancée, l’on cherche encore à prioriser les constructions simples ou spéciales, au détriment des constructions en masse des HLM à cinq étages, alors que l’on est préoccupé du manque de logement pour tous les Guinéens. Dans 20-30 ans, la démographie aura triplé ou quadruplé que c’est encore peu dire. En 2012, on venait d’arriver, là où on est. Il n’y avait aucun bruit ; six ans près, les nouveaux arrivants mis de côté, il y a eu plus de 10 baptêmes célébrés et plus d’une vingtaine de marmots bruyants. Le problème de logement risque de l’être plus encore par le manque d’espace, parce qu’on aura tout occupé pour construire des logements simples…