«J’ai été vendue à 3.500 euros…On nous a miroités l’Eldorado… Bons salaires, bonne condition de vie, un paradis… Mais c’était le calvaire, l’enfer… Si on ne fait rien pour les compatriotes qui sont encore à Koweït-City, ce sera la catastrophe… Elles sont actuellement dans une situation dramatique. Qu’on aille les sauver ! »
Ce cri d’alarme est celui d’une rescapée du drame Koweïtien. Après des mois d’esclavage, d’exploitation, de sévices corporels et moraux. Après avoir échappée au viol, cette malheureuse aventurière qui a accepté ce lundi 6 août de parler sous l’anonymat sur les antennes de la radio Espace, explique les conditions dans lesquelles elle a été recrutée et comment elle a été traitée par ces « bourreaux » Koweïtiens pendant trois mois.
Ainsi, interrogée par nos confrères pour savoir comment a-t-elle atterri à Koweït et comment a-t-elle traitée par ses employeurs, c’est avec des larmes aux yeux et la gorge noyée que notre compatriote a donné ce témoignage poignant.
« J’ai été approchée par les responsables d’un réseau implanté ici à Conakry. Ce réseau composé des grandes dames, des femmes d’affaires, de gendarmes m’a fait savoir qu’il a du boulot au Koweït. Que là-bas on gagne beaucoup d’argent. Qu’une fois au Koweït je peux aider mes parents. J’ai demandé les conditions à remplir pour y aller. On m’a répondu que je ne paierai rien. Les frais de billets d’avion et le visas sont pris en charge par le réseau recruteur. J’ai mordu à l’appât. Sans informer mes parents, j’ai pris l’avion et je suis partie.
J’ai été accueillie à l’aéroport à mon arrivée par une dame. A peine arrivée que j’ai été placée dans une famille pour les travaux de ménage…Mon passeport a été récupéré. Mes frais de recrutement, en quelque sorte, le prix d’achat, le salaire, le traitement… Tout a été discuté par la dame qui m’a accueilli. Me voilà donc au domicile de mon employeur ; mon poste de travail en un mot. C’est là mon malheur va commencer. On m’a logé dans un magasin exigu. Mon salaire ? Je touchais 75 dinars. Environ 1500000 francs guinéens. Les salaires vont de 75 à 80 dinars. C’est-à-dire d’un million cinq cent mille à deux millions cent cinquante mille francs guinéens »
A quoi consistait réellement le travail ? Qu’est-ce qu’elle faisait concrètement ?
A cette question précise, l’ex employée de maison à Koweït-city, égrène ses tâches tel un chapelet. « Je travaillais pendant 22 heures sans repos. C’est de 5heures à 2heures du matin. Je me levais à 5heures du matin pour me coucher à 2heures du matin. Je lavais la voiture, ensuite, je balayais la cour; je nettoyais le salon, après je passe à la cuisine avant de faire la lessive. De la lessive, je m’occupe de la vaisselle etc. Je n’avais pas de repos. C’était de l’esclavage. De l’exploitation humaine. Tous ces travaux accompagnés du manque de respect, des injures, des cris de l’humiliation…Parfois de viol. J’avais échappé de justesse au viol. Une nuit, aux environs de zéro heure, le fils de ma patronne, m’appelle d’aller nettoyer sa chambre. Quand je suis entrée, je l’avais trouvé nu comme un ver de terre. Il m’avait demandé d’avoir des relations avec lui. Je lui avais répondu que je n’étais pas là-bas pour ça. Il m’avait dit si j’acceptais, il me donnerait tout ce que je veux. J’ai refusé catégoriquement sa proposition. Le lendemain, il a demandé à sa mère de me ramener où elle m’avait prise. Sa maman lui a demandé pourquoi cette réaction de sa part… Plus les jours passaient, plus je souffrais dans ma chair. Moralement, physiquement je supportais plus. C’est ainsi que j’ai fui pour l’ambassade. Mes employeurs vont alors porter plainte contre moi. Le 22juillet, mes parents m’ont fait parvenir mon transport pour mon billet retour. Arrivée à l’aéroport, on m’a empêché de prendre le vol… Les tractations vont suivre jusqu’à ce que je me retrouve en prison. Des semaines après, la secrétaire générale de l’Ambassade de Guinée au Koweït interviendra pour me ramener à l’aéroport. Et j’ai pu prendre l’avion pour mon pays natal…. »
Comment se sent-elle aujourd’hui après être extraite de l’enfer Koweïtien ?
C’est une femme blessée, amère, touchée dans sa chair, affectée… Une femme libérée certes, mais préoccupée du sort de ses compagnons d’infortunes, ses compatriotes encore bloquées dans l’enfer Koweïtien qui appelle de tous ses vœux l’intervention des bonnes volontés, des autorités du pays à aller sauver les Guinéennes en danger à Koweït-City avant qu’il ne soit trop tard :« la situation est sérieuse et préoccupante. S’il y a des possibilités de ramener nos sœurs en Guinée, il faut le faire maintenant. L’heure est grave ! Il faut agir avant qu’il ne soit trop tard. Il faut aller sauver les Guinéennes au Koweït ! Elles subissent actuellement dans ce pays, les atrocités, l’humiliation….Elles souffrent… »
Ce cri de cœur, d’alarme de cette rescapée, interpelle les parents, les jeunes femmes, les autorités. En un mot, la conscience humaine. Le gouvernement guinéen doit se lever et multiplier les efforts pour ramener les compatriotes en détresse au Koweït…Rappeler notre ambassadeur en poste à Koweït-city pour consultation, quitte à revoir les rapports entre la Guinée et ce pays ami.