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Secteur minier guinéen : Le prix de référence et les autres défis et ambitions

Fixé jusque-là de façon disparate, le prix de la bauxite guinéenne va désormais connaître une harmonisation. C’est l’idée qui sous-tend le prix de référence applicable à la vente de la bauxite en Guinée, qui prend effet « à compter du 1er septembre 2022 ». Dans une interview réalisée par le service de communication du département de tutelle, le conseiller économique et fiscal du Ministère des Mines et de la Géologie, M. Yakouba Kourouma, explique les tenants et aboutissants de la décision.
A l’entame, le spécialiste aborde tout d’abord la question sur la motivation de l’administration minière, en prenant l’initiative. « L’idée est partie d’un constat très pertinent sur lequel, Monsieur le Ministre des Mines et de la Géologie a été très vigilant », affirme-t-il. Et de rappeler « qu’en effet, dès janvier 2022, le Ministre des Mines et de la Géologie avait instruit de faire une analyse sur les exonérations fiscales accordées aux sociétés minières en production ». Puis, d’expliquer, « qu’en exploitant les données minières et économiques que nous avons obtenues, nous avons très vite compris qu’il y avait un sérieux problème sur le niveau de prix pratiqué par les sociétés minières. Sans citer le nom d’une société, les données révélaient par exemple que la A pratiquait un prix de 9 dollars US la tonne, la société B pratiquait un prix de 11 dollars US la tonne, la société C pratiquait un prix de 13 dollars US la tonne, la société D pratiquait un prix de 26 dollars US la tonne, jusqu’à la société X qui pratiquait un prix de 42 dollars US la tonne. Donc le niveau de prix était très disproportionné et très variable d’une société à une autre ».
Poursuivant le diagnostic, M. Kourouma révèle « qu’en prenant en compte la sous-évaluation du prix de la bauxite, combinée aux exonérations fiscales accordées aux sociétés minières qui étaient la base de mon analyse, les pertes de recettes étaient estimées à environ 250 millions de dollars US au titre de l’exercice 2019 et d’environ 350 millions de dollars US au titre de l’exercice 2020 ». Et de rappeler que sur la base de ce constat, « trois (3) recommandations ont été faites dans le rapport d’analyse : (i) Premièrement, il était question d’exiger aux sociétés minières d’appliquer le prix du marché pour la vente de la bauxite. (ii) Deuxièmement, de catégoriser les exonérations en fonction du niveau d’investissement dans le projet. Là également, quand on fait la cartographie des exonérations fiscales accordées aux sociétés minières, on constate aisément qu’on a été trop généreux dans l’octroi des exonérations alors que cela devrait être basé sur des analyses rigoureuses de la rentabilité économique des projets. (iii) Et troisièmement, de faire un audit fiscal et règlementaire dans le secteur minier ».
Dans la même logique, toujours selon le conseiller économique et fiscal, « Monsieur le Ministre des Mines et de la Géologie a pris les conclusions de ce rapport d’analyse sur les principales causes de pertes de recettes minières en Guinée avec beaucoup de sérieux et d’attention ». Ainsi, explique-t-il, « c’est pourquoi, à la suite du passage de la mission du FMI au titre de la revue sectorielle du deuxième trimestre de l’année 2022, il a été décidé au Conseil des Ministres, sur instruction du Président de la République, Chef de l’État, Chef suprême des forces armées, Colonel Mamadi DOUMBOUYA, d’élaborer une note technique et un projet d’arrêté sur le prix de référence applicable à la vente de la bauxite en République de Guinée ».
Le principe établi, commence une démarche concertée
C’est sur cette base que « les différents Ministères concernés, notamment le Ministère en charge des mines, le Ministère du Budget et le Ministère en charge de l’Économie ont travaillé durant des semaines et de manière intense pour produire une version plus aboutie du projet d’arrêté sur le prix de référence applicable à la vente de la bauxite en Guinée », confie le conseiller économique et fiscal, M. Yakouba Kourouma. Et d’expliquer que « cette version aboutie du projet d’arrêté a fait également l’objet de circulation auprès des PTF pour recueillir leurs avis afin de s’assurer que tous les éléments pertinents ont été pris en compte pour mieux sécuriser les dispositions règlementaires prévues dans le projet d’Arrêté conjoint sur le prix de référence de la bauxite en Guinée ». Puis, ajoute-t-il, « la version stabilisée dudit projet d’Arrêté a fait l’objet de signature par les Ministres des mines, du budget et des finances en date du 06 juillet 2022, sous une attention particulière du Chef de l’État, Colonel Mamadi DOUMBOUYA ». Et d’informer que « l’arrêté conjoint signé et validé par l’État a également fait l’objet d’une présentation officielle devant les responsables de toutes les sociétés minières opérant dans le secteur de la bauxite en Guinée, et en présence des hautes autorités de l’État, notamment le Ministre Secrétaire Générale à la Présidence de la République, Colonel Amara CAMARA et le Ministre Directeur de cabinet à la Présidence de la République, Monsieur Djiba DIAKITÉ ».
Pour l’application de la nouvelle mesure, « à date, un courrier de notification est adressé à toutes les sociétés minières concernées pour les informer de la prise d’effet de l’arrêté conjoint sur le prix de référence de la bauxite à compter du 1er septembre 2022 », rappelle-t-il, avant de souligner que « cet arrêté conjoint est une innovation importante dans le secteur minier qui va apporter une sécurité juridique accrue à l’industrie minière de la Guinée, car par le passé, il n’y avait aucune base juridique à l’approbation du prix déclaré ou soumis par les sociétés minières pour la vente de la bauxite ». Surtout, que « les premières simulations économiques montrent que l’arrêté sur le prix de référence de la bauxite a un potentiel de mobilisation d’environ 1 milliards de dollars US de recettes minières en 2023 », toujours selon le conseiller chargé des questions économiques et fiscales au Ministère des Mines et de la Géologie.
Sur le choix de CBIX comme indice de référence
Selon M. Yakouba Kourouma, conseiller économique et fiscal du Ministère des Mines et de la Géologie, trois (3) raisons expliquent le choix de CBIX comme indice international de prix de référence de la bauxite en Guinée. Tout d’abord, « c’est un indice qui est internationalement reconnu et largement cité par les Experts en la matière. Il fournit au quotient les tendances des prix de vente de la bauxite sur le principal marché mondial de commercialisation de la bauxite, qui est aujourd’hui la Chine », affirme notre source. Ensuite, rassure-t-il, « l’Index Guinea LT créé par CBIX sur le marché chinois reflète bien la composition chimique de la bauxite de type guinéenne, notamment une teneur de 45% en Alumine et de 3% en Silice ». Précisant que « sur le même point, il faut rappeler que l’Australie et l’Indonésie qui font partie des plus grands producteurs de bauxite au monde ont également leur propre index au même titre que la Guinée, coté sur CBIX en Chine ». Avant de terminer en mentionnant le fait que « la majorité des producteurs de bauxite en Guinée, soient les 80%, vendent leur bauxite sur le marché chinois ».
C’est pourquoi, tranche-t-il, « le prix de vente s’applique à toutes les sociétés évoluant dans le secteur de la bauxite en Guinée, peu importe le marché de commercialisation de la bauxite ». Avant d’argumenter « ce qui reste clair, les 80% des sociétés minières évoluant dans le secteur de la bauxite en Guinée vendent leur bauxite en Chine, qui est devenue aujourd’hui le principal marché de commercialisation de la bauxite au monde ». Révélant que « même la CBG qui vend sa bauxite dans un marché différent de la Chine, renvoie une partie de sa bauxite vers la Chine ». Et d’insister sur le fait que « CBIX est l’index le plus transversal et le mieux adapté à la majorité des sociétés minières évoluant en Guinée pour refléter les conditions actuelles du marché de vente de la bauxite provenant de la Guinée ».
Une dose de flexibilité tout de même
À la question de savoir si « les sociétés sont tenues de vendre leur bauxite, exactement, au prix de référence ou si elles peuvent la vendre à des prix plus élevés pour faire plus de profit », M. Yakouba Kourouma répond sans équivoque que « la réponse est oui ». Avant d’expliquer que « le prix de référence, si vous voulez, c’est un prix planché, c’est-à-dire le minimum qu’une société minière évoluant dans le secteur de la bauxite ne doit pas franchir ». Néanmoins, « les sociétés minières peuvent vendre leur bauxite à des prix plus élevés pour faire plus de profit », admet-il.
Ce n’est pas tout. En tout cas, « toute société qui estime que sa bauxite peut être vendue à un prix inférieur au prix de référence, doit fournir à la Direction Générale des Impôt, avec copie transmise au Ministère des Mines et de la Géologie, l’ensemble de la documentation complète justifiant un tel niveau de prix ». Seulement, indique-t-il, « il reviendra à la DGI à la suite d’une analyse rigoureuse de la requête formulée par la société d’approuver ou non le prix de vente de la bauxite déclaré par la société ».

Autres acquis, améliorations et ambitions affichées
Dans les travaux en cours au niveau de l’administration, il y a déjà des résultats obtenus et d’autres améliorations annoncées. Tout d’abord, le Conseiller rappelle que « le Ministère des Mines et de la Géologie, sous la clairvoyance de M. Moussa MAGASSOUBA, Ministre des Mines et de la Géologie et le leadership du Président de la République, Chef de l’État, Chef suprême des forces armées, Colonel Mamadi DOUMBOUYA, a pu réaliser 2 succès ou victoires historiques dans le projet Simandou ».
Et de préciser que, toujours selon le Conseiller : « (i) La première victoire a été le fait de ramener les deux (2) sociétés sur la même table de négociation, qui a abouti à la signature de l’accord-cadre en date du 25 mars 2022 pour la co-entreprise, c’est-à-dire le co-investissement et le co-développement dans les infrastructures, et cela, avec l’insistance du Président de la République, Colonel Mamadi DOUMBOUYA, car par le passé, selon le Conseiller, les deux (2) sociétés n’avaient jamais accepté de discuter ensemble pour la mise en œuvre du projet Simandou. (ii) Et la deuxième victoire a été de faire obtenir pour l’État, à travers la signature du statut de la co-entreprise en date du 27 juillet 2022, une participation gratuite de 15% dans les infrastructures ferroviaire et portuaire du projet Simandou et cela, malgré le caractère sensible qui était lié à certaines décisions portant sur l’arrêt des travaux des deux (2) sociétés minières Rio Tinto et Winning Consortium Simandou ».
Pour M. Yakouba Kourouma, « il s’agit d’une victoire historique et inédite dans la gouvernance minière du pays, qui marque une étape importante pour la mise en œuvre du projet Simandou dans l’intérêt supérieur de la Nation », souligne-t-il.
Sur le plan du suivi des projets miniers, le Conseiller rappelle également que « grâce au leadership du Colonel Mamadi DOUMBOUYA, Chef de l’État et la vigilance de M. Moussa MAGASSOUBA, Ministre des Mines et de la Géologie, les sociétés minières ayant pris des engagements dans leur convention de base pour la construction des raffineries d’alumine en Guinée ont été instruits d’honorer leurs engagements en soumettant des chronogrammes précis et réalistes pour la construction des raffineries d’alumine en Guinée ».
Sur le plan de la maximisation des recettes minières de l’État, le Conseiller rappelle « qu’en plus du potentiel de mobilisation des recettes minières de l’État en 2023 dont dispose l’arrêté sur le prix de référence pour la vente de la bauxite en République de Guinée, l’application de l’article 138-III du Code minier relatif à la commercialisation du minerai à des prix de pleine concurrence par le Ministère des Mines et de la Géologie, a permis à la SOGUIPAMI de mobiliser 11,950 milliards GNF de recettes minières au titre du premier trimestre de 2022, soit 83% du résultat net de 2021 ».
Sur le plan de l’assainissement du cadastre minier, « à date, il y a 60 permis de recherche, y compris les autorisations d’exploitation de carrières permanentes, inactifs et non conformes, qui ont fait l’objet de retrait par Monsieur le Ministre des Mines et de la Géologie », informe le Conseiller. Il ajoute « qu’il y a eu également le contrôle et l’évaluation de 163 permis de recherche et l’identification de 45 permis dont 11 pour la bauxite et 34 pour l’or devant recevoir une mise en demeure dans les jours qui suivent ». Précisant que c’est un exercice qui « se poursuit encore et c’est l’un des axes prioritaires de la feuille de route assignée au Ministère des Mines et de la Géologie dans le cadre notre Plan d’action opérationnel de 2022 ».
Également, sur le plan des exportations minières, « le Ministère des Mines et de la Géologie reçoit désormais les prévisions trimestrielles sur les exportations minières des sociétés pour la réconciliation entre les prévisions et ce qui a été effectivement exporté » informe M. Kourouma, sans oublier que « sous la vigilance de Monsieur le Ministre, les agents formés grâce à l’appui de la GIZ sur le contrôle de la quantité et la qualité des produits miniers à l’exportation sont déployés dans tous les ports miniers du pays pour contrôler la quantité des minerais qui sort du territoire guinéen », ajoute-t-il.
En termes de perspectives, le Conseiller du Ministre en charge des mines rappelle en disant « nous avons des défis importants à relever, notamment la construction d’un Laboratoire national de la géologie de référence internationale pour certifier la qualité des minerais qui sort du territoire guinéen ». D’autant que, relève-t-il, « la qualité du minerai est un paramètre clef qui intervient non seulement dans le calcul de la taxe minière mais aussi le prix de référence de la bauxite. La maîtrise parfaite de la qualité et la quantité du minerai qui sort du territoire guinéen, permet de sécuriser considérablement les revenus miniers de la Guinée ».
Toujours à propos de cet outil tant réclamé, en croire M. Kourouma, « le Ministère des Mines et de la Géologie est actuellement en discussion avancée avec les partenaires techniques et financiers pour doter la Guinée d’un laboratoire national moderne de la géologie de référence internationale et aussi, investir dans la recherche géologique à l’échelle 1/50 000 pour l’amélioration de la connaissance géologie du sous-sol de la Guinée ».
En attendant, « grâce à l’appui technique et financier de la GIZ, 28 agents du bureau des évaluateurs ont été formés sur la méthode Draft Survey ou du Tirant d’eau, internationalement reconnue dans le cadre du contrôle de la quantité et qualité des produits miniers destinés à l’exportation », informe-t-il. Et d’annoncer que « …sous le leadership du Ministre des Mines et de la Géologie, M. Moussa MAGASSOUBA, ce bureau des évaluateurs a été érigé en Direction Générale compte tenu de son importance sur la sécurisation des revenus miniers ». Avec pour objectif, « de rehausser ce nombre à 100 agents avec l’appui et le soutien direct du Président de la République pour permettre le contrôle accru des produits miniers à l’exportation ».
Autre nouveauté, « le Ministère des Mines et de la Géologie travaille activement pour l’opérationnalisation effective de toutes les directions préfectorales des mines à l’intérieur du pays, en plus des missions de contrôles et de suivi qui se font de plus en plus fréquentes », indique M. Yakouba Kourouma. Et d’ajouter dans le même sillage « pour Monsieur le Ministre des Mines et de la Géologie, l’administration minière doit être fortement représentée à l’intérieur du pays pour le suivi rigoureux des sociétés et projets miniers évoluant dans toutes les préfectures de la Guinée ».
Rendez-vous donc dans quelques mois, pour faire le point sur toutes ces ambitions dans la nouvelle administration minière.
Thierno Souleymane

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