Un peu plus de 100 jours après sa nomination suivie de celle des membres de son gouvernement, le Premier ministre guinéen s’est prêté aux questions des journalistes. Dans l’émission Guinée Actu, de la RTG, co-animée par des journalistes du public et des médias privés, Mohamed Béavogui a abordé les difficiles questions mémorielles, la réconciliation nationale et ses rapports avec le président de la transition, le colonel Mamadi Doumbouya.
Dans cette longue interview, le PM a botté en touche toute idée de tension avec le président de la transition. « Je ne sais pas sur quelle base vous posez la question de l’unité. Je pense que vous nous voyez tous les jours fonctionner. La presse a parlé, les gens ont parlé. Nous travaillons, croye–moi, nous travaillons. plus que main dans la main », rassure-t-il.
Poursuivant, M. Béavogui dira que « l’important, c’est que nous avançons et nous travaillons. J’ai une confiance totale. Et il y a la sérénité et le pays avance, c’est le plus important ». Et d’ajouter que « ce que je vais vous demander, aidez-nous, à renforcer cette unité. Nous en avons besoin. Vous les journalistes vous avez un rôle important à jouer… aidez-nous à construire, à avancer. C’est vous qui pouvez contribuer de façon significative à cette éducation civique là, pour que demain la Guinée pense de façon unifiée, même s’il y a une perception de division, recousez ».
Quid de la réconciliation nationale ?
Sur la réconciliation nationale, l’invité de Guinée Actu fait savoir qu’un ministère dédié n’était pas nécessaire. « Si vous regardez les études qui ont été faites jusqu’à présent et les rapports, partout on a mis des ministères de la réconciliation, ils n’ont jamais été très efficaces. Donc nous avons bien réfléchi sur la question au moment où nous étions en train de concevoir la structure du gouvernement », répond-t-il avec assurance.
Puis, informe M. Béavogui, « en ce qui concerne le processus lui-même, vous vous souviendrez qu’il y avait un mécanisme en place qui était dirigé par l’archevêque de Conakry et le 1er imam de la mosquée Fayçal. C’était le comité provisoire de réflexion sur la réconciliation nationale. Ce comité avait produit un rapport qui a été apprécié, tant par les Guinéens que par nos partenaires internationaux”.
Selon lui à l’arrivée du Cnrd “la paire (archevêque –imam) est venue présenter le rapport en me disant, on n’a pas eu la chance de le présenter avec le gouvernement passé. Quand nous avons terminé le travail, le lendemain, on est venu arracher le toit de notre bâtiment et nous nous sommes sentis l’obligation de quitter.
C’est le seul remerciement qu’on nous a donné. Evidemment que je les ai reçus avec respect. J’ai lu le rapport, j’ai consulté, aussi le président de la transition. Donc, nous leur avons demandé de finaliser leur rapport qui sera mis à la disposition du nouveau processus que nous avons lancé parce que c’est un des piliers de la charte et aussi de la feuille de route, pour que nous puissions permettre aux Guinéens de se parler.
Il est important que les Guinéens puissent se parler et se pardonner c’est très difficile de se pardonner sans se parler. C’est ainsi que le président a proposé les assises. Le travail que nous essayons de faire aujourd’hui, c’est faire en sorte que ces assises profitent du travail qui a été fait, qui sera complété par la période qui n’a pas été couverte jusqu’en 2021. Et c’est l’ensemble de ce travail-là qui nous permettra de nous parler, d’organiser les rencontres, les réflexions et d’avancer. Il faut que nous nous parlions pour que nous puissions absorber la douleur et oublier ».
A la question de savoir pourquoi le Premier ministre n’a pas pris part à l’événement organisé au centenaire du premier président guinéen, Sékou Touré, alors qu’il avait assisté à une cérémonie organisée par l es victimes du camp Boiro, le chef du gouvernement a invoqué des raisons hiérarchiques. « Là où le CNRD me dit d’aller, j’y vais. Regardez très bien, le CNRD ne m’envoie pas là où il faut aller faire de la politique. Le CNRD m’envoie là où il juge que c’est nécessaire, et que ça contribue à la lancée du pays. La réponse finale, c’est que je vais là où le CNRD m’envoie », se défend-il.
L’invité de Guinée Actu n’a pas été très bavard non plus sur la rebaptisation de l’aéroport de Conakry qui porte désormais le nom d’Ahmed Sékou Touré. « Une fois de plus, je dirai, aidez-nous à travailler pour l’unité ».
Avant de tenter de rassurer que « la vision du président, c’est le rassemblement, c’est l’unité ». Concédant tout de même que « c’est vrai, le moment viendra de parler, de se réconcilier. Le processus de réconciliation, même en vous entendant, je suis convaincu que ce processus de réconciliation est encore plus nécessaire que jamais ».