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Quels enjeux géopolitiques pour la Guinée d’après Alpha Condé ?

Par Youssouf Sylla, analyste-juriste, à Conakry 

Que sera l’impact de la chute du régime d’Alpha Condé sur les rapports entre la Guinée et les puissances internationales avec lesquelles elle a de fortes relations? La question mérite d’être posée d’autant plus qu’au cours de la dernière décennie, la politique extérieure du président Condé s’était trop rapprochée de la Russie, de la Chine et de la Turquie.

Pour assurer dans le long terme son approvisionnement en ressources minières, la Chine a conclu avec la Guinée en septembre 2017, un accord cadre portant sur l’octroi d’un prêt de 20 milliards USD, sur la période allant de 2017 à 2036, contre ses ressources minières

Il y a aussi la Russie, héritière de l’union soviétique, qui fut l’un des premiers pays à apporter son soutien économique et politique au jeune Etat guinéen qui venait d’accéder à l’indépendance en octobre 1958. Avec des intérêts dans le secteur minier guinéen, Vladimir Poutine a soutenu le projet de troisième mandat du président Condé.

Un autre pays avec lequel la Guinée s’est beaucoup rapprochée sous Condé est la Turquie. Ces derniers temps ont connu une présence de plus en plus visible des turcs dans les secteurs du transport, des travaux publics et de gestion des déchets guinéens.

La Russie, la Chine et la Turquie, dans leur volonté de contrecarrer l’influence française en Afrique, misaient sur le chef d’État guinéen, qui en mars 2017 invitait ses pairs à Abidjan, à rompre le cordon ombilical avec la France. Il pouvait par conséquent compter sur le soutien de ces pays pour se pérenniser au pouvoir. Alors que les puissances occidentales, la France en-tête, critiquaient, ouvertement son projet de réforme constitutionnelle.

Avec le coup de force du 5 septembre dernier qui met Alpha Condé hors-jeu, la Chine, la Russie et la Turquie perdent un allié de taille en Afrique de l’Ouest. Mais ce serait prendre un risque inconsidéré de croire que c’est la fin de l’embellie entre la Guinee et ces pays. Le chef de la junte militaire guinéenne, le Lieutenant colonel Mamadi Doumbouya, a d’ailleurs tenu à préciser dans ses toutes premières déclarations que tous les engagements internationaux de la Guinée tiennent.

Avec les changements en cours, la Guinée devrait avoir, dans ses propres intérêts, un nouveau positionnement dans le cadre de son partenariat diversifié avec les poids lourds de la politique internationale. Dans le contexte actuel, il es difficile d’envisager un changement radical avec la Chine, la Russie et la Turquie.

La question est cependant de savoir s’il aura un rééquilibrage en faveur de la France. Difficile de prévoir l’avenir à ce stade. Mais ce qui est évident, il est tout à fait de l’intérêt supérieur de la Guinée d’avoir une politique extérieure équilibrée avec ses partenaires. Autant il est fondamental de préserver de bonnes relations avec les partenaires historiques que sont la Russie et la Chine, autant il l’est aussi de rénover les liens de coopération avec les autres puissances occidentales. Mais pour cela, il faut qu’elle mette de l’ordre chez elle, notamment en matière de démocratie et du respect des droits humains.

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