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Que sont-ils devenus ? :  Marie Touré alias ‘’Salé Wèlè Wèlè’’ se confie à Guineenews

« Depuis le temps du feu Président feu Ahmed Sékou Touré, en passant par feu Général Lansana Conté, Moussa Dadis Camara, Général Sékouba Konaté, Alpha Condé et tout récemment le Colonel Mamady Doumbouya, nous sommes toujours sur scène. (…) Nous regrettons le fait d’être oubliés par les instances supérieures »

Comme annoncé et pour la suite d’un ballet au compte des grandes dames des grands ballets nationaux, Guinéenews a rencontré cette autre tigresse et bête de la scène, Mariame Touré alias ‘’ Salé wèlè wèlè’’, surnom obtenu à travers ses prestations dans le groupe artistique et théâtral de ‘’Kabakoudou et Grand devise’’.

L’artiste Mariame Touré est née en 1962 à Conakry. Elle est fille de feu Babara et d’Amie Sakho. Mariée, elle est mère de 4 enfants dont 3 garçons et 3 filles.

Aucun sentier n’a pu mener notre artiste vers l’école française. Très pieuse et soucieuse de son éducation, elle créera à domicile une école coranique, d’où, elle s’inscrira pour apprendre le coran, et ne serait-ce que pour maitriser les sourates, afin d’accomplir ses prières quotidiennes.

Avec plus de 48 ans de carrière artistique confondue au sein du Ballet national Djoliba et des Ballets africains de Guinée, près de 5 fois le tour du monde sur scène, cette artiste se livre sans langue de bois, aux questions de votre serviteur de la rubrique ‘’Que sont-ils devenus ?’’ de Guineenews. Interview

Guinéenews : Ancienne actrice de deux grands Ballets nationaux, vous évoluez présentement dans les Ballets africains de Guinée. Pouvez-vous nous retracer comment êtes-vous venue au théâtre et quel est votre parcours ?

Marie Touré ‘’Wèlè Wèlè’’ :  C’est au temps de la Révolution, très jeune que j’ai commencé à m’intéresser à la danse. C’est au niveau du quartier Dixinn Port 2, que j’ai débuté la danse. Dans le quartier Maciré du 6ème arrondissement et à travers les compétitions théâtrales, le Directeur du Ballet national Djoliba d’alors, m’a pointé du doigt et certainement à travers mes prestations. Le doyen Yamoussa Soumah bien qu’étant du Ballet national Djoliba était notre répétiteur, dont vous avez eu l’opportunité d’interviewer. Il fait partie aussi des personnes qui ont participé à mon ascension. Je passais tout mon temps à suivre les répétitions des Ballets nationaux. C’est ainsi que j’ai été recruté à bas âge au sein du Ballet national Djoliba et plu tard dans les Ballets africains.

Guinéenews : En quelle année avez-vous intégré le Ballet national Djoliba ?

Marie Touré ‘’Wèlè Wèlè’’ : J’ai intégré le Ballet national Djoliba en 1976. Mon premier voyage à l’extérieur fut celui d’Algérie. Donc, j’ai été recruté à l’âge de 19 ans au sein du Ballet national Djoliba.

Guinéenews : Peut-on savoir comment vous avez rejoint ces célèbres Ballets africains de Guinée ?

Marie Touré ‘’Wèlè Wèlè’’ : Tout au début, étant dans le ballet national Djoliba, avant même la fusion, j’ai été choisie et retenue au sein des Ballets africains. Il se trouvait que j’étais en état de famille difficile à détecter. C’est après 3 ans, pendant que les Ballets Africains devraient effectuer une tournée en Angleterre, que j’ai été recruté. Il fallait compléter le nombre d’artistes à 12 et Dyéli Kani Diawara, actuelle sociétaire des Ballets africains, a porté son choix sur ma personne par le truchement de Mama Nana Cissé, qui assure présentement le rassemblement.

Ainsi dit et ainsi fait, le Directeur feu Italo Zambo a été contacté et a accepté mon intégration. C’est suite à un acte officiel, adressé au défunt Directeur Frankis Magloire Camara du Ballet national Djoliba, que j’ai été affecté par le Département au niveau des Ballets Africains de Guinée.

Guineenews : Il est évident en tant qu’actrice que vous faites partie de l’une des vieilles gardes de ces ballets nationaux. Peut-on connaitre qui ou quels furent vos idoles pour embrasser ce métier d’artiste ?

Marie Touré ‘’Wèlè Wèlè’’ : Dire que j’ai eu un danseur ou une danseuse qui m’a impressionné, je ne saurais le dire. Tout est venu à partir des Ballets africains de Guinée, pendant qu’ils répétaient au quartier Dixinn Port 2. Malgré les bastonnades que l’on subissait à la porte pour se faire dégager, je me trouvais toujours une issue, ou une entre ouverte pour suivre ces Ballets africains. Ce ne sont que ces Ballets africains qui demeurent mes idoles. Et Dieu soit loué, je termine ma carrière au sein de ces Ballets. Le numéro ‘’Malissadio’’ a été ma grande inspiration.

Guinéenews : Aviez-vous connu les Ballets « Armées de Guinée », si oui parlez-nous en et quel est le sort actuel de ce Ballet ?

Marie Touré ‘’Wèlè Wèlè’’ : Il y a longtemps que je n’entends plus parler de ce Ballet et cela depuis le temps de feu Général Lansana Conté. Nous avions eu une collègue qui avait déserté ce ballet, pour nous rejoindre dans le Ballet national Djoliba. Sans le confirmer, il y a longtemps, je ne partage pas de scènes avec ce Ballet « Armées ».

Guinéenews : Relatez-nous un beau ou mauvais souvenir qui vous revient à cet instant, et qui soit inoubliable, pendant que vous aviez fait presque le tour du monde en compagnie des Ballets africains de Guinée ?

Marie Touré ‘’Wèlè Wèlè’’ : Je crois que le beau et le mauvais souvenir se chevauche. C’était en 1984, après la prise du pouvoir par l’armée. Nous avions bénéficié d’un contrat pour les Etats-Unis d’Amérique. J’avoue que la souffrance s’en était suivie car, pendant 9 à 10 mois, nous n’avions bénéficié d’aucun spectacle. Personnellement, je faisais la coiffure pour subvenir à mes besoins. J’ose l’affirmer que des Africains ou noirs américains venaient finalement en nous offrant des places de spectacles vu la renommée des Ballets africains.

Nos affaires avaient été saisies au niveau de l’hôtel où nous habitions. La personne qui avait initié ce projet de voyage avait décampé, et heureusement que le gouvernement d’alors avait pu nous délivrer de cette mésaventure. Je l’assume, nos bagages sont restés pendant 2 ans aux USA, pour les recevoir après dans état dégoutant. C’est un mauvais souvenir.

Le plus beau souvenir, restera ces cours de danses pratiques que nous avions pu dispenser à plus d’une centaine de personnes à Washington pour survivre. C’était beau à voir tout ce monde à notre écoute.

Guinéenews : Parvenez-vous à soutenir votre famille bien qu’étant toujours chargée par les assourdissants sons de ces tams-tams et si oui par quels moyens ?

Marie Touré ‘’Wèlè Wèlè’’ : Je n’appellerai pas cela source de revenus ce que je gagne présentement. J’ai pris ma retraite depuis 3 ans, et je ne bénéficie jusqu’à présent pas de ma pension. Une erreur glissée à partir de ma date de naissance dit-elle (au lieu de 1962 – 1940) me crée assez d’ennuis. Donc jusque-là, je n’ai pas de pension au niveau de mon statut durant tout ce temps de fonctionnaire contractuelle.

Au sein des Ballets africains, il y a une prime de 550 000 GNF que je perçois tous les mois en qualité de contractuelle (Wallahi, Billahi Tallahi). Je reconnais qu’en compagnie du groupe ‘’Kabakoudou-Grand devise’’, après la réalisation de quelques films, ils songent à moi et ce qui me permet de tenir face à ma famille.

Guinéenews : Interviewée, une de vos ancienne et actuelle sociétaire des Ballets africains, s’apitoie sur le sort qui vous a été réservé. Partagez-vous son avis sans pour autant vous fournir d’amples informations ?

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Marie Touré ‘’Wèlè Wèlè’’ : Rappelez-vous depuis le temps du feu Président feu Ahmed Sékou Touré, en passant par feu Général Lansana Conté, Moussa Dadis Camara, Général Sékouba Konaté, Alpha Condé et tout récemment le Colonel Mamady Doumbouya, nous sommes toujours sur scène. Il y a eu un moment l’octroi d’une indemnité aux anciennes gloires du passé de ce montant mensuel de 5 000 000 GNF à titre de récompense.

Il n’est pas à nier que ces Ballets Africains ont fourni aux caisses du trésor guinéen des ressources financières qui ont servi. Nous n’avions jamais été récompensé dans ce pays. Sauf ces derniers temps, j’ai eu des satisfécits provenant d’une association locale et celle des artistes comédiens. C’est dommage et nous regrettons du fait d’être oublié par les instances supérieures.

Guinéenews : Vous êtes certainement frustrée et pourquoi continuer vous à vous mettre la corde au cou ?

Marie Touré ‘’Wèlè Wèlè’’ : Vous savez pourquoi je m’accroche encore à cet art, c’est puisque, j’ai de l’amour et de la passion pour ce métier. Je m’engage pour prouver à tout ce monde, que nous sommes des artistes engagés. Je suis peinée aujourd‘hui, et je suis à la recherche de bonnes personnes qui pourraient nous faire oublier l’histoire de ces 5 000 000 GNF. J’ai honte de faire face pour demander un service.

Tous croient que je bénéficie de cet avantage. Il y a parmi ces bénéficiaires de cette indemnité, qui nous ont trouvé dans ces Ballets africains. Nous sommes frustrés et sans aucun moyen pour s’exprimer. Je profite de votre présence pour dire que ce n’est pas la corde au cou que nous trainons. Nous demandons de l’aide pour permettre à nous autres de satisfaire les besoins de la famille. Nous avons travaillé pour la patrie et les recettes étaient versées au trésor.

Guinéenews : Avez-vous des projets à court, moyen et long termes pour valoriser l’art et en somme la culture guinéenne ?

Marie Touré ‘’Wèlè Wèlè’’ : J’ai bien sûr des projets mais les moyens me manquent pour y aboutir. Je peux assurer la formation en danses de cette jeune génération, si toutefois j’ai une salle à disposition. Présentement et ce n’est pas raciste, j’ai du mal à me consacrer ou me mettre à la disposition des étrangers pour leurs formations et j’assume mes propos.

Pour un petit montant ‘’Totèdi’’ littéralement traduit en français ‘’maigre somme’’, nos jeunes danseurs s’engagent et oublie que cette exportation n’est pas bénéfique pour la culture guinéenne.

Donnez-moi une salle et mettez les moyens, vous saurez qui est Marie ‘’Wèlè wèlè’’.

Guinéenews : A votre avis, quel est le sort des Ballets africains de Guinée après la disparition de son émérite Directeur Général feu Hamidou Bangoura (paix à son âme) ?

Marie Touré ‘’Wèlè Wèlè’’ : Aujourd’hui, il faut reconnaitre que c’est grâce à tous ces membres de ces ballets que nous essayons de résister. Tous unis et les plus jeunes surtout sont fidèles et comptent sur nous. Nos ainés se sont battus pour la survie de ces Ballets et pourquoi pas nous ? Cette jeune génération compte entièrement sur nous et je confirme que la relève est désormais assurée.

Guinéenews : « Des wagons sans une locomotive », peut-on confondre ces célèbres Ballets africains de Guinée à cette assertion et si non, quelle est la nouvelle structure mise en place pour assurer la relève de la direction ?

Marie Touré ‘’Wèlè Wèlè’’ : C’est clair et officiellement, les Ballets africains de Guinée n’ont pas encore une nouvelle structure qui désigne quelqu’un à sa tête. Grâce à cette grande dame Mama Nana Cissé, ancienne de ces Ballets africains aux heures de l’indépendance, que nous parvenons à trouver un équilibre social à travers ces différents rassemblements (réunions) de maintien du groupe.

 Nous nous retrouvons chaque lundi et jeudi au domicile de feu Hamidou Bangoura pour resserrer les rangs, et c’est une autre façon de soulager, de soutenir ses épouses, dans cette dure épreuve de veuvage.

Guinéenews : Quels conseils prodiguerez-vous à cette nouvelle génération pour suivre vos gigantesques pas ?

Marie Touré ‘’Wèlè Wèlè’’ : Je dirais à cette nouvelle génération, de suivre le chemin déjà tracé par les anciens. S’ils respectent las aînés, c’est le Bon Dieu même qui leur accordera l’éternel respect. S’ils se comparent aux aînés, le chemin sera défriché et des embûches surgiront pour bloquer l’ascension. Il faut que cette génération parvienne à consulter les aînés sur tous les plans au lieu de se comparer à eux.

Guinéenews : Avez-vous un appel ou un message porteur à véhiculer à l’endroit de tous ces fidèles lecteurs de cette rubrique ‘’Que sont-ils devenus ?’’ de Guineenews ? 

Marie Touré ‘’Wèlè Wèlè’’ : Grâce à vous, nous avons l’opportunité de lancer ce pressant appel à vos lecteurs, et au peuple de Guinée tout entier. Nous, anciens des Ballets africains de Guinée, il faut oser le dire, nous avons actuellement de sérieux problèmes. Ces ballets africains représentent le Rouge-Jaune-vert, et dire que nous n’avions même pas un siège, à plus forte raison une salle de répétition, cela est une honte nationale.

Lors de la réfection du palais du peuple, toutes nos affaires ont été jetés dehors sous les intempéries. Chaque fois que nous nous installons quelque part, tout ce monde a peur que l’Etat récupère le lieu à notre compte vu notre célébrité.

Présentement, par la grâce de Dieu et le dévouement de l’équipe dirigeante de la commune de Matam, une place (Maison des jeunes) est en train d’être rénovée pour servir de cadre pour nos répétitions.

Je lance cet autre appel solennel au département de tutelle, aux opérateurs économiques, aux mécènes, aux dirigeants du pays et singulièrement au Président de la transition, le colonel Mamady Doumbouya, de bien vouloir tourner le regard vers les Ballets africains de Guinée, ambassadeurs de la culture guinéenne.

Entretien réalisé par LY Abdoul pour Guinéenews

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