Dans cette dernière partie de cet entretien avec Bakary Doukouré ‘’Gooze’’, il nous parle de son statut d’ancienne gloire, qui ne lui profite à rien, et il se dit lésé, malgré toutes les revendications, soumises à plusieurs niveaux. Bien que malade et alité, Bakary Doukouré ‘’Gooze’’, nous dépeint ses relations avec les dirigeants actuels du basket-ball guinéen, établit un parallèle entre sa génération de basketteurs, et celle actuelle, et il nous relate un pan de son parcours dans le football, en tant que gardien de but. Du beau au pire souvenir dans son parcours, ses projets, Bakary Doukouré ’’Gooze’’, lance son cri de cœur en faveur des anciennes gloires, et sollicite l’appui du Général Mamady Doumbouya, afin de voler au secours de toutes ces fiertés oubliées.
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Guinéenews : Êtes-vous ancienne gloire ou pas ? Si oui, aviez-vous bénéficié de ces avantages accordés aux autres ‘’anciennes gloires’’ du secteur des arts, de la culture et des sports ?
Bakary Doukouré ‘’Gooze’’ : Je suis une ancienne gloire. Très dommage, et vous faites bien de me poser cette question. Quand ce décret, ou décision est sorti pour octroyer 5.000.000 FG aux ‘’ayants droits’’, cette initiative ne s’est limitée qu’à une seule équipe de football, en l’occurrence le Hafia Football club, et à quelques autres choix individuels, qui ne sont liés qu’aux relations personnelles.
Guinéenews : Des artistes musiciens des orchestres nationaux, et autres ensembles artistiques, ont bénéficié aussi de cette manne financière, et qu’en dites-vous ?
Bakary Doukouré ‘’Gooze’’ : Du côté des musiciens, tout le monde n’a pas profité, sauf quelques-uns. Je prends un cas très pratique, celui de feue Jeanne Macaulay (paix à son âme). J’ai écouté une émission dans laquelle, elle avait signalé cet état de fait. Malheureusement, 1 semaine après, elle a rendu l’âme. Ce qui confirme, qu’elle n’a jamais profité de ces avantages, malgré tout le service rendu à la nation, au sein des Ballets africains de Guinée. Moi qui vous parle à ce micro, après tant d’années de services rendus au basket-ball guinéen, je n’ai jamais profité de ces présents avantages, ou d’autres qui seraient destinés aux anciens sportifs de toutes disciplines confondues.
Guinéenews : Lésé dites-vous dans ce partage, avez-vous néanmoins engagé des démarches pour récupérer vos droits à quelques niveaux que ce soit ?
Bakary Doukouré ‘’Gooze’’ : J’ai été voir à l’époque Isto Keira, qui était le secrétaire général d’alors du ministère de tutelle (Sports). Il m’a conseillé de m’adresser à l’assemblée nationale. Je suis venu rencontrer Amadou Damaro Camara, président de l’Assemblée nationale, avec une correspondance à l’appui, dont je garde toujours la copie. J’avoue qu’il a attesté après toutes les explications, l’injustice qui sous-tend cette inéquitable répartition. C’est ainsi qu’il avait promis de s’en occuper. Malheureusement, ce qui est arrivé, arriva, et le 5 septembre, et a vu le gouvernement d’Alpha Condé renversé, et toutes les institutions dissoutes.
Guinéenews : Malade alité depuis un certain temps. Peut-on savoir, si vous vous intéressez toujours à votre sport favori (Basket ball), et quel parallèle faites-vous entre ce basket d’avant et celui actuel ?
Bakary Doukouré ‘’Gooze’’ : Bien que je sois malade et alité, j’appelle de temps à autres l’équipe dirigeante actuelle, dont les ¾ ont été mes joueurs. Nous échangeons le plus souvent, et s’il y a des conseils disponibles à transmettre, j’en donne à cœur ouvert.
La différence entre ces deux époques est fondamentale, et réside par rapport à la volonté de réussite. Sinon au jour d’aujourd’hui, en taille, en technique, en logistique ou support, ces jeunes sont mieux fournis que nous autres à l’époque. A notre temps, nous n’avions pas eu de vidéos, de parallèles, ou tous autres outils permettant d’assurer des préparations à l’avance. Seule la pratique avec les entraîneurs de nationalité russe, yougoslave, américaine, ont permis de se hisser à ce niveau connu de tous. Donc l’effort était primordial en compétition.
Guinéenews : Qu’est-ce qui dénote réellement la différence fondamentale, et qui apparaît selon vous ?
Bakary Doukouré ‘’Gooze’’ : A mon avis, je crois que c’est une question de personnes, de volonté morale, parce qu’en premier lieu, il ne faut pas voir le basket-ball, en tant que tel, il faut caser ce sport sur le plan du pays, de la nation. Nous avions joué à notre temps pour l’honneur, alors que la génération actuelle, joue plus pour le bonheur.
Guinéenews : Vous affirmez avoir joué aussi au football, et au poste de gardien de but. Relatez-nous cet autre pan de votre parcours dans le football ?
Bakary Doukouré ‘’Gooze’’ : Oui, j’ai été un moment gardien de but. J’ai commencé au sein d’un club de Conakry 1, dénommé ‘’ La belle descente’’. J’ai évolué avec des joueurs tels que Vava, Piantoni, Tozo, paix à leurs âmes, car beaucoup sont décédés. Ensuite, je fus gardien de but du lycée classique de Donka avec Monseigneur Gomez, comme gardien titulaire. J’ai pratiqué ce football aussi à Kankan, à l’époque, il y avait des joueurs comme Diané Yayé, Bah Oury, Zaïre (paix à son âme), Djolé, l’actuelle Imam de la grande mosquée de Kankan, le père de l’actuel président de la République (Général Mamady Doumbouya), qu’on appelait ‘’Kerfalla Dian’’ à cause de sa taille, et qui jouait au poste d’arrière central. J’ai fait la même classe que feu Maxime Camara, qui fut l’un des meilleurs ailiers gauche du continent, et j’ai joué aussi à Kindia avec Ibrahima Fofana Calva 1 du Hafia football club.
Guinéenews : Pouvez-vous nous décrire votre plus beau souvenir et le pire que vous ayez connu dans votre parcours de basketteur ?
Bakary Doukouré ‘’Gooze’’ : (rires) Je vais commencer par le pire. C’était en 1983 à Alexandrie, contre un club Egyptien en demi-finale des clubs champions en compagnie du Hafia basket-ball club. A quelques minutes de la fin, le Hafia mené, nous avions eu 2 lancers. Et imaginez-vous, que j’étais considéré comme l’un des meilleurs marqueurs, ainsi, je marque le premier panier, et je rate le second. Alors là, je n’ai pas pu me consoler, puisque les deux paniers marqués nous emmenaient à la prolongation, et voir certainement en finale. C’est un mauvais souvenir que je garderai pour longtemps. Le plus beau souvenir que je garde est le match de demi-finale de club champion, qui s’était déroulé à Casablanca (Maroc), contre le Club Municipal de Casablanca (CMC). C’est une victoire inoubliable, et je me rappelle même, le refus catégorique du ministre des Sports marocain, de nous serrer les mains après le match.
Guinéenews : Alors ce jour, qui était ‘’Gooze’’ : (hochement de tête) Ah ! Ce jour, c’était le vrai ‘’GOOZE’’ à l’époque. C’étaient des matchs bien préparés, des matchs vraiment suivis, et les entraînements étaient stricts et sérieux. C’était une équipe de taille avec Albert, Sadiouma Camara, Mamadou Cellou Diallo, Amadou ‘’Petit’’, feu Kassé, feu Mario, entre autres, c’étaient d’excellents joueurs, une équipe complète, une vraie famille de sport. Paix aux âmes de tous les disparus.
Guinéenews : Avez-vous des projets en ce qui concerne le basket-ball, le sport en général, ou dans d’autres domaines ?
Bakary Doukouré ‘’Gooze’’ : J’avais des projets, notamment entraîner les clubs. Ce que j’ai pu faire pendant un moment. Faute de répondant, beaucoup de nos projets sont tombés à l’eau, et c’est ainsi que nous avons vu notre avenir compromis, du fait que nous sommes restés jusque-là, sans soutien.
Guinéenews : Vous nous aviez fait part aussi de votre engagement à écrire un livre. Où vous en êtes présentement ?
Bakary Doukouré ‘’Gooze’’ : Merci de me rappeler, et c’est peut-être là, la compensation. Je suis en train d’écrire un livre sur le sport guinéen, toutes disciplines confondues.
Guinéenews : Peut-on connaître le titre du livre, et vous êtes à quel niveau de l’écriture ?
Bakary Doukouré ‘’Gooze’’ : Le livre est titré : Le sport en Guinée, quel avenir ? Je suis presqu’à la fin, vu mon état de santé, et la difficulté de me déplacer, j’allais vous montrer le manuscrit. Présentement, je suis en train de faire la mise en page, finir complètement la saisie, chercher des sponsors, enfin passer voir Harmattan Guinée, pour la suite qui conduirait à la publication du livre.
Guinéenews : Qu’est-ce qui pourrait vous égratigner aujourd’hui, et qui vous pousserait à un cri de cœur, ou un message à lancer à cette occasion ?
Bakary Doukouré ‘’Gooze’’ : Ça me fait très mal, que des anciennes gloires, celles qui hier, ont fait le bonheur et l’honneur de ce pays, et qui soient traînées dans la boue, oubliées, voire laissées pour compte, et c’est dommage ! Quand vous pensez à la façon dont plusieurs sportifs, et artistes ont quitté ce monde, et aujourd’hui, pleins sont malades, abandonnés à eux-mêmes. Je ne prends pas l’exemple sur moi, bien que vous voyiez mon état. Difficilement, je suis descendu de ce divan pour répondre à vos questions. Alors, dans mes rêves et réalités, il suffit d’un coup de fil, pour que je sorte de cet état, pour aller me soigner. Je ne sais pas comment le dire, je souffre !, je souffre ! Mon cri de cœur, c’est de penser à nous, et il ne faut pas nous traiter de laissés pour compte. D’ailleurs, à travers une correspondance émanant du ‘’collectif des laissés pour compte’’, nous avons adressé une correspondance au ministère des sports, qui est restée sans suite.
Guinéenews : Après ce cri de cœur, quel est donc le message que vous voulez lancer à qui de droit ?
Bakary Doukouré ‘’Gooze’’ : Il y a un message que je veux lancer principalement au président de la République. Je voudrais que le président regarde autour de lui, et cherche à savoir comment ces autres pays traitent leurs anciennes gloires. Même si on ne nous donne pas des milliards, ou des villas, il serait souhaitable qu’on nous assiste dans nos petites douleurs et souffrances. Je le dis, et pourquoi pas le répéter, le père de Mamady Doumbouya, fut un grand sportif, un footballeur, quand bien même, on l’appelait ‘’Kerfalla Dian’’, à cause de sa taille, il était comme dit auparavant, l’arrière central de Banankorodala. Il faut penser réellement à tous, qui sont dans un dénuement total. Je fais appel au bon sens du président de la République, pour voir dans quelle mesure, il peut faire un geste, ne serait-ce que pour me sauver, afin de pouvoir utiliser convenablement ma jambe droite.
Guinéenews : Plusieurs de vos coéquipiers ne sont plus de ce monde (paix à leurs âmes). Une famille sportive, vous l’aviez été en leur compagnie. Homonyme à vous, que retenez-vous de feu Aboubacar Guèye, aussi surnommé ‘’ GOOZE’’ ?
Bakary Doukouré ‘’Gooze’’ : Aboubacar Guèye ‘’ Docteur Gooze’’ (paix à son âme), nous sommes allés le rencontrer 2 fois de suite avant son décès, en compagnie d’Elhadj Tamboura. Il s’appelle Aboubacar Guèye et moi je m’appelle Bakary Doukouré, nous sommes des homonymes, et nous portons tous le surnom ‘’GOOZE’’. Nous étions au nombre de 3 en plus de celui de Mamou, qui est aussi décédé (paix à son âme).
Guinéenews : Dites-nous d’où est venu ce surnom de ‘’GOOZE’’ ?
Bakary Doukouré ‘’Gooze’’ : C’est le nom d’un éminent basketteur du club ‘’Harlem Globe Trother’s’’. Personnellement, j’ai eu ce surnom ‘’Gooze’’ à travers un ami footballeur, Dourou Diallo, que j’avais moi-même surnommé ‘’Pelé’’. Donc Docteur ‘’Gooze’’ était un très bon basketteur, nous avons joué ensemble dans l’équipe universitaire, au sein de la sélection nationale, dans plusieurs clubs aussi. Je garde de lui des souvenirs inoubliables. C’était un serviable homme.
Guinéenews : Nous avons fait le tour, et certainement qu’il y a d’autres aspects, qui nous ont échappé, et que vous voulez encore mettre à la disposition de nos lecteurs ?
Bakary Doukouré ‘’Gooze’’ : On a touché tous les aspects, peut-être qu’on n’a pas approfondi. Je réitère encore par votre voix, et demande humblement au Général Doumbouya Mamady, de faire face aux anciennes gloires. Il est temps de revoir cas par cas, les difficultés qui se présentent à chacun de nous. Il est regrettable de voir tout ce monde mourir dans l’anonymat. Je vous remercie de m’avoir permis de dégager quelque chose que j’ai au cœur, il y a très longtemps.
Entretien réalisé par LY Abdoul pour Guinéenews