Il n’est un secret pour personne que rien ne va plus au niveau du projet coton de Kankan. Depuis le début des années 2000, jusqu’à nos jours, la situation notamment des travailleurs évolue de mal en pis. Privés de deux mois de salaire, ils ne cachent pas du tout leur malaise. Certains d’entre eux, que nous avons pu rencontrer ce vendredi dans l’enceinte de l’usine, ont tout simplement décidé de se défouler.
Regroupés dans le garage de l’usine, Daouda Diallo, responsable au sein de la section production agricole est le porte -parole des travailleurs. « Vous vous imaginez, quand des pères de famille que nous sommes, font deux mois sans percevoir de salaire. Surtout en cette période d’ouverture des classes. Nos enfants ne vont pas à l’école, d’autres ont été vidés, parce qu’on n’a pas versé leurs frais de scolarité. On a même du mal à assurer les vivres à la maison », a-t-il confié à notre reporter, avant d’ajouter également : « ça va faire plus de deux ans que nous ne recevons pas non plus nos allocations familiales. Alors que nous cotisons à la caisse. On a essayé de savoir pourquoi la caisse nous a fait savoir que le projet lui est redevable de plus de 3 milliards et quelques de FG. Donc très malheureusement, nous ne percevons pas d’allocations familiales, pas de couverture santé, et le pire, beaucoup partent à la retraite, et ne perçoivent jamais de pension ».
Une réunion de crise a eu lieu au cours de la soirée d’hier, pour évoquer leur situation. Malheureusement, les négociations ne se sont pas soldées sur une note d’espoir pour eux : « Les responsables nous ont dit, que franchement, il n’y a pas d’argent. Que notre ministre de tutelle est en négociation pour chercher à trouver de l’argent afin de payer nos salaires », a-t-il révélé, avant de préciser que : « cependant, avant la chute du président Alpha Condé, une somme de 6 milliards a été débloquée. Mais les 6 milliards là, ils disent que c’est juste pour acheter et transporter le coton dans la cour. Ils n’ont pas pensé à nos salaires ».
Plus loin, il précise aussi que : « Comme vous le savez au projet coton ici, on évolue de crise en crise. C’est parce qu’il y a trop de détournement. Au temps du président Alpha Condé, il y a eu une gabegie financière. Des inspecteurs ont été dépêchés pour faire des audits qui ont abouti à des résultats mais aucune sanction n’a suivi. Il a fallu que nous les travailleurs, nous exigions à l’époque le départ des principaux administrateurs pour qu’ils partent. Ensuite, la ministre Mariam Soguipah Camara, en son temps, nous a aussi parachuté des responsables qui faisaient son affaire. Parce qu’ils prenaient de l’argent de façon flagrante, pour envoyer à Conakry. Personne n’osait dire quelque chose. Quand on parle, on dit c’est pour madame la ministre. Donc c’est la même gabegie qui continue avec ces gens qui ont été parachutés, à savoir le chef du projet par intérim Abdoulaye Magassouba qui est cumulativement, directeur préfectoral de l’agriculture à Siguiri ».
Avec les 6 milliards récemment débloqués, les travailleurs exigent non seulement le paiement de leurs salaires, ils demandent aussi le départ de l’actuel chef du projet par intérim, et aussi la dissolution du syndicat.
« Le syndicat qui est censé nous défendre est corrompu. Les 6 milliards qui sont ici, ils ont pris presque 2 milliards pour aller chercher le coton des paysans en brousse et venir les stocker ici. Pendant ce temps, nous les travailleurs ici nous souffrons dans nos familles. Nous leur avons demandé, avec cette somme, de prévoir le paiement de nos salaires, ils ont refusé. Donc en connivence avec le syndicat, ils veulent détourner le reste de l’argent. Ils ont transformé le projet coton en une marmite de sauce, tous ceux qui viennent se servent et s’en vont ». a dénoncé pour sa part Mamadi Condé, un autre de ces travailleurs en colère.
Absent dans son bureau, nous avons pu joindre tout de même au téléphone Abdoulaye Magassouba, chef de projet par intérim, mais il nous a fait savoir qu’il est en déplacement, et qu’il ne souhaite pas s’exprimer sur le sujet en télécommunication.