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Prisons passoires : l’envers du décor d’une politique carcérale à minima (Editorial)

« Le droit de tout homme enfermé est de s’évader ». C’est « la liberté ou rien », ainsi parlait Jacques Mesrine, criminel français des années 70. Et pour y parvenir, tous les moyens sont bons. Comme pour dire que c’est la fin qui justifie les moyens, pour qui veut voir de nouveau les étoiles. Des aphorismes qui siéent bien aux évasions spectaculaires devenues récurrentes ces derniers temps dans nos établissements pénitentiaires. Et qui révèlent l’envers du décor d’une politique carcérale à minima voire marginale.

Les évasions en plein jour sont devenues le lot quotidien de nos centres pénitentiaires. Après l’évasion survenue le 18 juillet dernier dans la prison civile de Kankan, lors de laquelle plusieurs détenus se sont fait la malle, en plein jour, ce vendredi 21 juillet, ce fut le tour de la préfecture de Siguiri, située elle aussi en Haute Guinée de vivre le même scénario ubuesque. Cette fois, ce sont deux individus, se déplaçant en motocyclette, qui ont réussi à exfiltrer un détenu de la prison civile de cette cité minière. L’opération s’est déroulée pendant que le soleil était au zénith, sous le regard impuissant des gardes-chiourmes, dissuadés sans doute par les tirs de sommation effectués par les assaillants.

Ces deux cas qui se sont déroulés de manière presque simultanée, ne viennent que confirmer, malheureusement une loi des séries des évasions spectaculaires, devenues récurrentes ces derniers temps.

Car on a encore en mémoire ce scénario rocambolesque survenu dans la nuit du 23 juin, du côté de Coyah, où 81 détenus s’étaient fait simplement la belle, sans crier gare. Des bandits de grands chemins pour la plupart, qui courent toujours.

Durant le même mois de juin, M. Ibrahim Akhlal, un belgo marocain, recherché par Interpol, tombé dans les filets de nos limiers, avait réussi à prendre la clé des champs, en pleine capitale. Grâce à une complicité bien rodée.

Heureusement que le fugitif a été rattrapé par les services de sécurité mauritaniens. Pays où il avait trouvé refuge, pour échapper à la justice internationale.

Nous n’allons pas occulter l’évasion survenue récemment à Pita aussi, en Moyenne Guinée.

Toutes ces évasions ne font qu’apporter de l’eau au moulin des observateurs qui qualifient nos prisons de « passoires ». Cela au grand dam d’un département de la Justice qui en perd son latin.

Charles Wright, le garde des sceaux, qu’on sait très à cheval sur le bon fonctionnement du secteur judiciaire, peine toutefois à redresser la barre au niveau de nos prisons.

Car en lieu et place de réformes profondes, le ministre de la Justice se contenterait plutôt de réformettes, raillent ses détracteurs.

Et à chaque évasion, ce sont les gardes pénitentiaires qui en paient les frais. Avec des mises à pied, des suspensions voire des peines d’emprisonnement.

Il ne s’agit là pourtant que de la partie visible de l’iceberg, de ce métier ingrat. Quand on sait que ces gardiens de prison sont payés en monnaie de singe. Eux qui sont les soutiers, le véritable maillon faible de la chaîne judiciaire, sont aussi sans aucune visibilité, ni considération.

Comment peuvent-ils dans ces conditions de misère, résister à la tentation, dans un monde où la corruption a droit de cité ?

Sans oublier que ces gardes pénitentiaires ne seraient même pas armés. De quoi en rajouter à leur vulnérabilité, dans un univers fortement dominé par des criminels.

Ces gens qui ne pourraient avoir la prétention d’avoir même en rêve, le même traitement salarial que la hiérarchie judiciaire, devraient au moins bénéficier de plus d’attention de la part du gouvernement. Cela signifie un bon salaire, un gîte, des moyens matériels adaptés à leur environnement. Ils n’en demanderaient pas mieux, pour continuer à se coltiner la gestion des centres pénitentiaires.

Vivement que ces supplications tombent dans de bonnes oreilles.

Pour que nos prisons cessent enfin d’être des «passoires».

ça y va de la sécurité de la cité.

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