De toutes les images d’illustration que nous avons pu glaner jusqu’ici au compte de la rubrique ‘arrêt sur image’ de guineenews.org, voici celles qui nous ont le plus impressionné. Elles sont vivantes et expressives. Le naturel qui les caractérise est teinté d’émotion qui pousse à la réflexion.
Décrivons simplement la scène telle que nous la voyons sur les deux tableaux. Nous sommes sur l’autoroute. Une fillette d’une dizaine d’années, bien vêtue, bien coiffée est apparemment vendeuse d’eau glacée. Elle s’apprête à rejoindre sa compagne, de l’autre côté de la chaussée. Entre elles la distance est courte, certes, mais un obstacle périlleux est là, qu’il faut franchir. Un caniveau profond et large est grandement ouvert devant la fillette. La première image la montre, juste au moment où elle se prépare à l’enjamber. Elle remonte son pagne mais se ravise, prise de peur.
Sur cette seconde image, son hésitation semble avoir disparu. On la sent encouragée et décidée à entreprendre la traversée en sautant, comme l’a apparemment fait sa compagne déjà de l’autre côté. Il existe bien une passerelle en bois, mais elle est située bien loin de là, en contrebas. Pour ceux qui en disposent, on perçoit, au zoom avant, la grande concentration de la fillette, sa bouche entrouverte, comme pour s’exclamer ou prier, son buste fléchi, ses muscles contractés pour bondir, son pagne relevé au haut des cuisses pour libérer ses jambes ployées, celle droite se préparant à s’élancer, ses bras levés et son regard verrouillé comme pour faire abstraction de tout ce qui peut la distraire de son saut risqué. Pendant ce temps, de l’autre côté, sa compagne, une jeune femme, l’attend et l’encourage du geste, son récipient d’eau, presque vide, brandi en avant, l’air de dire : « viens et tiens. » Un passant semble jeter un regard curieux sur la scène. Réussira-t-elle à sauter ? Nous nous posons tous la question et nous avons même un peu peur pour elle. Pas vrai ?
Nous n’en dirons pas plus, convaincu que nous sommes, de votre capacité à tirer de ces images, bien mieux que nous, tous les enseignements qu’il faut.
C’est, entre autres, l’aspect lié à l’éducation de nos enfants. La place de cette fillette devrait être à l’école. Et non pas d’aller n’importe où et faire n’importe quoi, comme vendre de l’eau à la sauvette. Mais de cela, nous aurions mieux parlé, si seulement nous avions pu identifier l’intéressée, connaitre son milieu familial, etc.
Les caniveaux ouverts à travers la ville sont très nombreux. Ils constituent des endroits très dangereux, surtout pour les enfants et les personnes âgées. Nul n’ignore les risques qu’ils représentent pour les piétons. Chacun peut en pâtir, dès lors que, pour telle ou telle raison, on est confronté à leur franchissement. On cite de nombreuses tragédies dont sont victimes des personnes, surtout celles qui portent des boubous sans échancrure sur les côtés.
A la traversée, aussitôt leur jambe tendue, la voilà qui est retenue par le pan du boubou dont le diamètre d’ouverture s’avère insuffisant pour permettre d’atteindre l’autre bord du caniveau. C’est alors que ces personnes chutent violemment de tout leur poids dans le caniveau ou sur ses arêtes vives, en béton armé. Il s’en suit, nous a dit le Professeur Tafsir Soumah, chef du service de la traumatologie-orthopédie du CHU Ignace Deen que nous avons consulté à propos, « des cas de décès quand le choc se situe au niveau de la tête ou de la nuque et des traumatismes graves qui entrainent des infirmités : trauma crânien, fracture du visage ou des mandibules, fracture du fémur, du bassin ou de la colonne vertébrale… »
Pour l’avoir vécu personnellement, nous en parlons avec conviction. Le 1er mai dernier, nous même, avons subi cette dure épreuve dans les mêmes conditions que celles décrites plus haut. « Une chance, qu’à votre âge, après une telle chute, vous vous en tiriez à plus ou moins bon compte. Estimez-vous heureux. Ça pouvait être autrement plus grave » a conclu le Pr Soumah. Diagnostic posé : fracture de la rotule du genou gauche.
Depuis ce temps, huit mois déjà, les traitements se poursuivent et nous nous remettons à petits pas.
Mais, laissons cette évocation, plutôt privée, pour revenir à d’autres dangers des caniveaux. Pendant la saison des pluies, des cas de noyade sont notifiés dans ceux d’entre eux qui sont pentus et remplis d’eau. Il peut arriver que la force du courant ou la profondeur du caniveau emporte ceux qui y tombent, surtout la nuit.
Depuis peu, les services concernés notent une atténuation des cas de chute de piétons dans les caniveaux. Cela tient, d’après eux, à l’effet ricochet d’un volet du projet d’assainissement de la capitale : la pose de dalles. On observe en effet que partout où cette opération s’effectue pour contrer les dépôts d’ordures incorrigibles dans les caniveaux, les piétons trouvent moyen de circuler en toute sécurité.
Un effet collatéral appréciable que le projet d’assainissement initial n’avait peut-être même pas deviné. Abus de biens ne nuit pas, dit-on. Saluons donc cette heureuse coïncidence qui protège les piétons.