« Le Président Alpha Condé n’aime pas celui qui lui dit la vérité… Il préfère les béni-oui-oui… Je suis du côté du respect de la loi et de la vérité… Et non de ceux qui aident à verrouiller, à bloquer le pays. Comment comprenez-vous qu’un opposant soit salarié du gouvernement ? Un leader politique qui est entretenu par l’Etat, qui est nourri par le Président de la République, est –il indépendant ? La loi sur la création du poste du chef de file de l’opposition et de son entretien n’est pas normale. »
Allié du président Alpha Condé lors de la Présidentielle 2015, le leader de l’Union des Forces Démocratiques n’est pas content. Mais là pas du tout. Invité ce mercredi matin sur les antennes de la Radio Espace, Bah Baadicko n’a pas mâché ses mots. Il a qualifié le régime actuel de corrompu et dénoncé la mal gouvernance qui le caractériserait.
Le patron de l’UFD, n’a non plus été tendre avec le président de l’UFDG qui serait payé et entretenu par le Chef de l’Etat. Remonté, l’ex-allié du pouvoir propose la déclaration d’un état d’urgence contre la corruption pour rétablir la confiance entre l’Etat et la population.
Interrogé sur ce revirement à 180 degré vis-à-vis du pouvoir qu’il a soutenu pendant quatre ans, Baadicko répond qu’il n’a jamais été écouté ni suivi par le président Alpha Condé. Sinon, en tant que vieil allié, dira-t-il, il avait jugé nécessaire d’approcher « le grand frère » pour travailler avec lui. Mais hélas ! Les vieilles habitudes ont la peau dure : l’ethnocentrisme, le favoritisme, la corruption, la manipulation du duo RPG-UFDG. Un duo qui, selon lui, aurait pris le pays en otage. Il a dénoncé la création du poste de chef de file de l’opposition. Mais là encore il n’a pas été écouté… Alors, face à tout cela, il a préféré se retirer de l’alliance.
Et pourtant, Baadicko avait été prévenu. Lansana Kouyaté n’avait-il pas déconseillé le président de l’UFD de ne pas s’allier au RPG? En acceptant d’aller avec son grand frère, n’est-il pas comptable aujourd’hui de la mal gouvernance qu’il dénonce ?
A cette série de questions, l’ex-allié d’Alpha Condé dit qu’il ne regrette pas de l’avoir suivi. Et s’il y a mal gouvernance, il n’est pas comptable : « Nous avions tout fait. On avait écrit…Nous avions critiqué, dénoncé les dérives, la corruption. On ne nous a pas écoutés. Nos propositions n’ont jamais été prises en compte… Comment nous pouvons être comptables ? Alpha Condé n’aime pas celui qui lui dit la vérité… Il préfère les béni-oui-oui… Donc nous autres, on n’a pas notre place auprès de lui…»
Baadicko est aujourd’hui de quel côté ?
« Du côté de la vérité. Du côté de ceux qui luttent contre la corruption pour sortir la Guinée du trou. Du côté du respect de la loi… Et non de ceux qui aident à verrouiller, à bloquer le pays. Comment comprenez-vous qu’un opposant soit salarié du gouvernement ? Un leader politique qui est entretenu par l’Etat. Qui est nourri par le Président de la République est –il indépendant ? Le président d’un parti doit vivre des cotisations des militants de parti ! La loi sur la création du poste du chef de file de l’opposition et de son entretien n’est pas normale », a-t-il dénoncé.
Concernant la crise que traverse actuellement le pays, Bah Baadicko accuse les dirigeants du pays. Pour lui, leur comportement et la mal gouvernance, seraient la cause de tout ce qui arrive au pays. « C’est le comportement des dirigeants actuels qui sont au pouvoir pour enrichir leurs amis. C’est ce qui irrite les gens… Le système est gangréné. Comment un voleur peut-il imposer le respect ? ». Comme proposition pour la sortie de crise, il souhaiterait la déclaration d’un état d’urgence contre la corruption. Ainsi, il pointera du doigt la mauvaise gestion des entreprises publiques comme l’ARPT, l’OGP, le Port Autonome, la Caisse Nationale de la Sécurité Sociale, la Lonagui etc. Il demande par ailleurs d’arrêter les marchés gré à gré.
A propos du blocage dans l’installation des maires et la nouvelle loi sur la CENI, Bah Baadicko, se dit content de ce qui arrive à l’opposition. « Je suis heureux aujourd’hui que la pierre retombe sur l’opposition républicaine… Elle le mérite. Les opposants sont responsables de ce blocus ! Ils étaient pour le code électoral ! Pour la structuration de la CENI, je ne crois pas. C’est du bonnet-blanc, blanc-bonnet.
Que pense-t-il du dialogue prôné par le Médiateur et la présidente du Conseil Economique et Social ?
Là encore, le leader de l’UFD reste pessimiste. Il pense que les dialogues, les consensus et les négociations sont des échecs parce qu’on va de compromissions en compromissions. « Les dialogues en Guinée n’ont jamais rien donné. Parce que les gens n’y vont pas de bon cœur. Chacun y va avec ses idées, son plan… Rien de sincère. Pourquoi ne pas remettre les dossiers à la Cour Constitutionnelle ? C’est la voie légale ! »
Baadicko entretient toujours de bons rapports avec le Président Alpha Condé ?
« Le Président Alpha Condé ne veut pas voir des gens comme moi… » En répondant ainsi aux journalistes, l’ancien allié du pouvoir pense qu’à cause de sa « franchise », il est indésirable au Palais Sékhoutoureya. Toutefois, il regrette qu’après soixante ans d’indépendance, la Guinée soit une « honte » à cause du comportement de ses élites. Il va alors profiter pour lancer un message. Celui du respect de la Constitution.