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Patrimoine historique et culturel : immersion au Musée régional de Boké

Situé au quartier Dibia, dans la commune urbaine, le fortin de Boké a été construit en 1878 par l’explorateur français René Caillé qui, pour s’enquérir des réalités des lieux, est passé par la carte géographique pour voir le côté opposé à la Basse Côte.

Sur cette carte, il s’est aperçu que ce côté opposé était le Sénégal. C’est ainsi qu’il s’est rendu au Sénégal pour avoir des informations claires sur la Côte guinéenne. A partir de là, il a pu comprendre qu’en Basse Côte, il y a deux religions courantes, avec une prédominance de l’islam.

Il cherchera à avoir les éléments nécessaires concernant la religion musulmane, notamment en apprenant certains versets coraniques. C’est lorsqu’il avait la maîtrise de ces versets qu’il a dû emprunter le chemin du Fouta Djallon, à partir de Boké.

C’est pourquoi la rue qui mène au Musée régional de Boké est appelée Rue René Caillé, la seule que l’explorateur français a empruntée pour traverser la Guinée.

Dans la cour, une borne est dressée. Elle symbolise le point de départ du premier explorateur français René Caillé. De là, il a décidé de se rendre au Fouta Djallon. Et au Fouta, au lieu qu’il n’entre avec le nom René Caillé, il a dû changer de nom, sachant qu’il a des versets coraniques en tête. Il a épousé le nom d’Ibn Abdallah.

Après avoir visité le Fouta, il a continué pour se rendre à Dinguiraye où il a visité la case historique. En fin de compte, il a traversé le fleuve Niger pour atteindre Tombouctou au Mali et Tanger, au Maroc :  deux carrefours de dépôt des esclaves.

Aussi, dans la cour du fortin, sont érigés les monuments de trois résistants guinéens à la pénétration coloniale. Il s’agit de l’Almamy Samory Touré, résistant à la pénétration coloniale chez les Mandingo, de Dinah Salifou Camara, résistant à la pénétration coloniale chez les Nalou, et Alpha Yaya Diallo, résistant à la pénétration coloniale au Fouta.

 

Et le fortin devint le Musée régional de Boké

En face, se trouve dressé un bâtiment construit en 1878. A l’origine, il servait de campement pour le commandant de cercle de la pénétration coloniale. Cet édifice qui résiste encore à l’usure du temps, comprend quatre pièces :  la salle de surveillance appelée sentinelle, le dortoir du commandant de cercle, la salle de réception et la cave souterraine, en plus d’une véranda de réclamation des impôts.

Le bâtiment est devenu Musée régional en février 1971 et restauré en 1981 par les Amis du Musée de Boké, en l’occurrence les premiers exploitants des minerais de bauxite de la CBG.

Lorsque cela est survenu, les chefs traditionnels et coutumiers ont fait la sensibilisation autour des communautés afin que celles-ci acceptent de faire sortir leurs objets d’art dans les forêts sacrées et dans les grottes, pour venir les placer dans le Musée.

Le Musée regorge de nombreuses pièces ethnographiques

Dans les différentes salles d’exposition du Musée, sont rangées des pièces ethnographiques. Notamment les pièces sacrées des quatre communautés autochtones de Boké : les Landouma, les Baga, les Nalou et les Mikhiforè.

Ces pièces sont composées d’un tabouret qui fut utilisé lors des cérémonies initiatiques dans les forêts sacrées. Appelé Kibanyi, il était apporté au chef pour tenir des prières et bénédictions en faveur des initiés.

Ensuite, il y a le Bansonyi, un masque sacré des communautés Nalou et Baga, présenté comme le premier dieu des Nalou. Au pied du masque, est placée une calebasse de don de sang ou de pain.

On y trouve aussi une pierre taillée, l’échantillon des briques qui ont servi à la construction du fortin, un carquois, la pochette des tirs à l’arc (les flèches) et le premier fer à repasser africain.

Egalement, on y trouve la photo des familles des Sofa qui présentés comme la première sécurité africaine. Le masque sacré que les Landouma considéré comme la première de la juridiction africaine y est aussi exposé. Il était utilisé pour détecter un voleur, un meurtrier ou un sorcier.

Dans la deuxième salle d’exposition, le visiteur est accueilli par des pièces ethnographiques, dont le tabouret appelé dabédi, utilisé par la communauté Landouma. On y trouve la calebasse appelée kali, et dans laquelle on mettait les feuilles, les écorces ou le racines pour être broyées avant d’être administrées aux malades.

Y est également exposé le chapeau de danse appelé yombofissa. Il était utilisé au cours des fêtes de réjouissance, mais aussi le premier fusil de chasse africain appelée trois tombées ou bira sakhan.

Le D’mba, déesse de la fécondité, pièce sacrée de la communauté Baga y existe sous trois formes. Sur la première forme, il est un remède chez la femme. Sur la deuxième forme, il est utilisé par les hommes à la sortie d’une décision de la jeunesse, porté sous forme de chapeau sur la tête, accompagné de chants et de danses.

Le D’mba d’épaule est un masque sacré qui a été utilisé pour protéger la la vie des enfants. Lorsque les épidémies comme la diarrhée, les vomissements ou la fièvre devraient sévir, ce masque était utilisé pour épargner les enfants de ce malheur.

Dans la salle d’exposition du Musée régional de Boké, il y a la représentation du vieux messager appelé Kèkoroba portant sur sa tête trois tas de cheveux :

Le premier enseigne qu’un enfant adoptif ne peut jamais être votre fils. Le deuxième dit qu’il ne faut jamais lancer un défi à un chef. Et le troisième encourage d’aimer beaucoup sa femme sans lui dévoiler tous ses secrets.

Le Matimbo, tambour sacré de la communauté Baga utilisé au cours de la danse fétichiste, le Dougoumè, premier instrument de la pêche traditionnelle et le Banda, chapeau utilisé lors des manifestations de joie (moisson) par les communautés Baga et Nalou sont autant de pièces ethnographiques à découvrir au Musée de Boké.

La cave souterraine

Construite en 1878, la cave souterraine garde encore sa résistance d’hier. Depuis cette date, outre la peinture, rien n’est modifié sur ladite prison. Elle est compartimentée en trois salles, respectivement d’une capacité de 40, de 20 et de 10 esclaves.

Dans la cellule de quarante personnes, les esclaves y étaient enfermés jusqu’à ce que celui qui était à la sentinelle aperçoive un bateau en mer. Il ordonnait alors de les enchaîner pour être déportés en Amérique ou au Brésil.

La deuxième cellule d’une capacité d’accueil de vingt personnes est celle des récalcitrants. Ceux qu’on capturait avec force, on les mettait là, en les privant de boire et de manger jusqu’à ce qu’ils s’affaiblissent et deviennent dociles.

La troisième salle est celle de torture ou de condamnation.

Le chemin de non-retour

Sur une distance de 380 mètres débouchant sur le Rio Nuñez, les esclaves étaient enchainés et liés les uns aux autres pour prendre le chemin de non-retour. Durant des décennies, ils étaient plusieurs milliers d’esclaves à être déportés en Amérique.

Par Mady Bangoura, de retour de Boké pour Guineenews

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