L’annonce officielle hier par le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, Alphonse Charles Wright, de l’ouverture du procès du massacre du 28 septembre 2009, le 28 septembre prochain ne fait pas que des heureux. Même si elle a été favorablement accueillie chez les victimes et parmi les organisations et institutions de défense des droits de l’homme.
Parmi les exceptions à ce sentiment de soulagement voire de satisfaction, Me. Paul Yomba Kourouma. L’avocat du commandant Aboubacar Toumba Diakité, ex-aide de camp du président de la transition d’alors, est plus que sceptique. Interrogé dans l’émission Mirador chez nos confrères de Fim FM ce samedi, Me Paul Yomba Kourouma pointe «l’impréparation» et appréhende «un procès bâclé».
En dépit du fait que, selon l’avocat défenseur, « s’il y a quelqu’un dont la liberté ne tient qu’à l’issue de ce procès, c’est bien le commandant Aboubacar Diakité dit Toumba qui a été vraiment opprimé, marginalisé, ségrégué, oublié, discriminé, au point que tous les droits lui ont été refusés. Et même au droit de renouvellement de son mandat de dépôt qui ôte à la Maison Centrale toute possibilité de le recevoir et de le garder… Sans oublier la détention arbitraire qui n’a pas été sanctionnée par les magistrats, bien que régulièrement saisis à tous les échelons, jusqu’à la Cour suprême. »
Dans la même logique, très caustique, Me Kourouma enfonce le clou : « ce déni de droit nous pousse déjà à nous dire qu’il faut se tourner vers ce procès pour qu’à l’issue d’un débat contradictoire que la sentence soit rendue et qu’elle nous soit opposable au cas où nous serions condamnés, ce qui est hors de question », estime-t-il.
Mais, à l’écouter, rien de tout ce qui est fait en termes de préparation ne le rassure. Au contraire, dénonce-t-il, « en matière de justice, si nous ne cessons de militariser nos méthodes, de mécaniser nos procédures, de nous abrutir pour satisfaire une volonté politique, si nous mettons de côté les usages du temple, ses ordonnances, ses oracles, ses interdits, si enfin nous foulons au pied nos instruments juridiques, l’organisation judiciaire mise en place… nous continuerons d’aller de ratés en ratés.»
Réquisitoire contre les défenseurs des droits de l’homme
Mais si Me. Paul Yomba Kourouma n’est pas satisfait du traitement réservé à Toumba et de sa défense jusque-là, il ne manque pas de reproche contre les organisations et autres institutions de défense des droits de l’homme.
« Je mets au défi les organisations de défense des droits de l’homme, le haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et autres. Jamais les plaintes et complaintes de Toumba relatives à ses mauvaises conditions de détention et à sa privation de ses libertés, à sa santé n’ont jamais attiré l’attention de qui que ce soit », a-t-il fustigé.
Parlant de ce qui pourrait plaider en la faveur de son client, l’avocat déclare : «Toumba a des témoins qui n’ont jamais été entendus. D’abord le commandant du salon de Dadis. Quand Toumba est allé s’opposer à la sortie de Dadis ce jour, pendant que ce dernier se préparait à sortir pour le stade. Il dit, tu ne sors pas, je ne sors pas… Sans oublier qu’il aurait également été vu en train de protéger, épargner des leaders politiques comme Louncény Fall ». Et d’ajouter que : « mon client ne pouvait pas être au même moment en train de tirer sur des gens, de violer des femmes…»
A la question de savoir si le procès est politique, Me Yomba rétorque : « tout ce qui se fait est politique et même quand vous scruter, vous voyez que l’imposition de cette date, sans oublier que l’édifice lui-même n’est pas encore prêt. »
Autres faits dénoncés par l’avocat, c’est le fait de n’avoir pas été reçu par le ministre de la Justice au même titre que les autres parties au procès hier. Un traitement de ‘’défaveur’’ qui n’est pas sans rappeler qu’il ne bénéficie d’aucune protection alors qu’il en aurait besoin pour sa sécurité pendant qu’il est opposé à des centaines de parties civiles dans ce dossier.