Par ces temps qui courent, rien ne va plus chez les acteurs de la filière bovine à Lélouma. Éleveurs, vendeurs ou encore acheteurs ne savent plus à quel saint se vouer depuis plusieurs mois. Le prix du bétail est parti en flèche. Les ventes et les achats ont, quant à eux, considérablement baissé. Les chiffres d’affaires chutent et les inquiétudes se multiplient. Et pour en savoir davantage sur la situation, Guinéenews a promené son micro à Thianguel Bori dans l’un des parcs à bétail le plus important de la région.
Interpellé sur la situation, le chef de poste d’élevage de Thianguel Bori, Ibrahima Kanté est sans équivoque : » ces derniers temps, les activités liées à la vente du bétail au parc de T. Bori a beaucoup diminué. C’est vrai que j’ai pris fonction ici il y a juste sept mois environ mais en me référant aux registres, je peux clairement vous dire que la situation est actuellement très délicate. Si avant on enregistrait jusqu’à trois cent têtes et même plus vendues, aujourd’hui, on atteint difficilement cent, » se désole dès l’entame le responsable du parc.
Pendant ce temps, du côté des vendeurs et des acheteurs le son de cloche est beaucoup plus déplorable. Ces derniers sont déboussolés.
» Je suis dans ce business depuis plusieurs années maintenant. Mais la situation que nous traversons actuellement, j’en avais jamais connue auparavant. Les vaches, les chèvres et les moutons sont extrêmement coûteux. C’est la même chose partout dans les marchés hebdomadaires que je fréquente. Je viens de Mali, j’ai envoyé du bétail. Mais croyez moi que depuis le matin jusqu’à l’heure où l’on parle comme ça (15 heures environ), je n’ai encore rien vendu », s’alarme Mamadou Goki Diallo, natif de Mali Yemberin avant de poursuivre en ces termes : depuis Mali, pour acheminer les bœufs, je paye 50 mille francs guinéens par tête et pour les moutons et chèvres environ la moitié.
Et ce, sans mentionner d’autres dépenses qui s’y ajoutent. Pour le moment notre investissement, c’est l’échec. Mais comme c’est ce qu’on a comme activité, on est obligé de faire avec dans l’espoir que ça va changer sous peu de temps. En tout cas pour le moment c’est l’espoir qui nous anime. Et si les pertes ne font que s’accumuler, je serai obligé de voir vers d’autres horizons pour nourrir ma famille », lance le jeune bouvier visiblement très mal à l’aise.
Assis en même le sol, le regard figé sur des taureaux embonpoint, Mody Ibrahima Ly, vendeur de bétail en basse voix répond face à notre insistance : » depuis ce matin, aucun client ne s’est encore pointé. C’est extrêmement difficile d’imaginer que je vais rentrer aujourd’hui encore à la maison les mains vides. C’est sûrement le manque d’argent et la cherté des bœufs qui font que les clients ne viennent pas. Maintenant les éleveurs se substituent aux bouchers pour estimer le poids de l’animal avant d’effectuer la vente et c’est extrêmement cher. En tout cas, notre activité se porte très mal et nous davantage, » narre t-il.
À lire aussi
Dans la même lancée, un acheteur nous confie que c’est la cherté des bœufs qui fait que les gros acheteurs ne viennent plus car eux aussi ne s’en sortent plus avec les prix actuels.
Au niveau du bureau en charge de l’enregistrement des ventes qui s’effectuent, Saliou Baldé nous explique quant à lui la baisse drastique du chiffre de vente. » Au début nous pouvions enregistrer plus de trois cent têtes vendues. Aujourd’hui, difficilement cent ou cent cinquante têtes ».
Dans le même sillage, un autre boucher enfonce le clou : » il faut que tous les responsables de la filière se retrouvent et en discutent pour sortir de cette fâcheuse situation. Parce que les lignes ne bougent pas du tout actuellement. C’est pourquoi d’ailleurs, si nous bouchers trouvons un bœuf à égorger, il nous faut plus de deux jours pour écouler la viande. Les gens n’ont pas d’argent et les temps sont durs. Actuellement, on est obligé de consommer du poisson. Imaginez-vous un pauvre paysan qui n’arrive même pas à bien s’occuper de sa famille, comment voulez-vous que ce dernier déboursé 50 000 GNF pour payer un kilogramme de viande, » s’interroge le boucher avant de poursuivre : » dites aux uns et aux autres de vendre le kilogramme de viande à 20 ou 30 mille et vous verrez si les choses ne vont pas avancer. C’est pour vous dire que c’est la cherté qui est à la base de tout ça, » ironise t-il pour tirer sa conclusion.
D’après les dires de toutes les personnes interpellées par rapport à cette fâcheuse situation, ce n’est pas du tout le beau temps pour les acteurs de la filière bovine à Lélouma.