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Guinée : pourquoi la culture de la répression est ancrée dans les mœurs politiques ?

Ces raisons sont à rechercher dans le décalage entre notre conception traditionnelle du pouvoir et le constitutionnalisme importé de l’Occident, reposant sur le principe de la séparation des pouvoirs tel que développé par de grands théoriciens comme Locke ou Montesquieu.

La conception traditionnelle du pouvoir en Afrique et plus particulièrement en Guinée, repose sur son caractère sacré et incontestable par le fait même de cette sacralité. Affronter alors le chef ou le contester dans le cadre des règles posées par l’État «démocratique» du type occidental importé est forcément source de tensions.

On peut donc constater dans un pays comme la Guinée, la coexistence tendue entre le formalisme constitutionnel propre à l’État moderne et la gestion de l’État selon un modèle d’autorité renvoyant à une conception sacrée du pouvoir. La coexistence de ces deux modèles avec une prédominance du modèle traditionnel est plus conflictuelle que complémentaire. Les États africains en général n’ont pas réussi à trouver entre ces deux modèles une voie synthétique plus adaptée aux réalités socioculturelles et géographiques de leurs sociétés.

Ce manque de créativité pour trouver sa voie propre de cheminement est source de nombreuses difficultés telle que la violence étatique. Prenant l’exemple de la Guinée, on peut se demander quel est le chef d’État de ce pays, de 1958 à nos jours, qui peut se vanter d’avoir gouverné ou même essayer de le faire sans tomber dans une politique répressive contre ses opposants ? Certainement aucun !

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Car la sacralité du pouvoir est un puissant repoussoir du formalisme constitutionnel occidental importé. C’est d’ailleurs au nom de cette sacralité consciemment ou inconsciemment entretenue par les gens en position d’autorité que le texte constitutionnel peut être changé sans gêne, afin d’y introduire une dose suffisante du pouvoir sacré, donc du pouvoir à vie.

Dans la mécanique de la violence étatique, une violence protectrice et affirmative de l’autorité absolue, il est possible de reprocher à chacun des chefs d’État qui se sont succédé des épisodes de répression et de tueries. Chacun d’eux a fait des victimes sans pour autant que les comptes ne soient soldés, en raison du fait que cette violence est considérée comme un moyen normal d’exercice de l’autorité́ et de la protection du pouvoir sacré.

Ainsi, l’un des moyens les plus sûrs de combattre les opposants est leur condamnation à l’exil ou encore leur emprisonnement s’ils ne sont pas purement et simplement éliminés. Mettant savamment en place un système d’impunité et de négation des droits, les détenteurs du pouvoir politique empêchent non seulement le jugement de leurs propres actes mais aussi ceux posés par leurs devanciers de manière à introduire une véritable solidarité entre eux dans la couverture des crimes d’État. Oubliant qu’en procédant ainsi, ce sont les victimes qui se multiplient sans justice et que ce sont les soubassements de la société qui s’effondrent les uns après les autres, au grand dam de la paix civile.

Dans ces conditions comment espérer réellement obtenir un bon ancrage de la démocratie dans un pays qui se réclame pourtant de l’être faussement à travers ses textes constitutionnels ? La dictature est en réalité un mode de gouvernance partagé et assumé par les gouvernements successifs de ce pays sans oublier qu’il est aussi le moyen par excellence de privatisation, voire de personnalisation des ressources publiques.

À cette allure, seule une «révolution des esprits» traduite en pratique par un ancrage plus fort de l’État constitutionnel, qui consacre la supériorité du pouvoir constituant sur les pouvoirs constitués et qui repose donc sur la séparation des pouvoirs et le recul de la sacralité de l’autorité, permettront de construire un État au service des populations avec tous les bénéfices qui en découlent.

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