La vindicte populaire est une pratique illégale qui découle de la crise de confiance entre les citoyens et les autorités plus particulièrement la justice. A Siguiri, mettre volontairement fin à la vie des présumés malfaiteurs et autres bandits après leur arrestation est le sport favori de certains citoyens.
Interrogés, il y a des citoyens qui invoquent une crise de confiance. Pour eux, cette crise est la principale cause du règne de la vindicte populaire. Ils affirment ne plus avoir confiance en la justice. Ils préfèrent régler leurs problèmes par voie de lynchage et autres actes de violences…
Votre quotidien électronique Guinéenews a effectué une enquête sur le terrain pour connaitre les raisons profondes de ce comportement devenu une habitude à Siguiri.
Du lynchage des présumés bandits
Ici, tout le monde est unanime que les décisions judiciaires ou le laxisme au niveau des services pénitentiaires sont à la base de la vindicte populaire. Selon les témoignages recueillis, c’est ce manque de confiance dans la justice qui fait que les citoyens se font eux-mêmes justice.
C’est le cas Ibrahima Touré, ce commerçant de Faradamani, un district, situé non loin de Kourémalé: « lorsqu’un bandit tue et qu’on le traduit en justice, on le libère… en leur accordant un sursis ».
Pour Lamine Doumbouya, mécanicien dans la commune urbaine de Siguiri, c’est parce que les autorités n’inspirent plus confiance. Ils ne règlent pas les problèmes comme il le faut, dénonce-t-il.
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« C’est par colère que les gens lynchent les présumés malfaiteurs. Car, ils ont estiment que les autorités ne vont pas réprimer les bandits comme ils s’y attendent », ajoutera Nantenin Diaby, une vendeuse de poisson au marché de Kintinian.
Si la quasi-totalité des citoyens parlent d’une crise de confiance à cause du laxisme dans le traitement des dossiers et un système qui favorise l’impunité, les autorités expriment leur désolation face à cette situation.
Réaction des autorités
Pour les autorités, il s’agit d’une méconnaissance du droit. Sinon, nul ne doit ôter la vie à son prochain et il y a la présomption d’innocence. « Il faut que les citoyens sachent que nul n’a le droit de se rendre justice, et seule la justice est habilitée à établir un prévenu dans les liens de la culpabilité », dira le juge de paix de Siguiri, Abdoulaye Conté
Lors de sa récente visite à Siguiri, le ministre de la Justice et Garde des Sceaux, s’est exprimé sur ce sujet: « ceux qui se rendent justice, nous leur disons d’arrêter cette pratique et de faire confiance aux autorités. Toute personne arrêtée dans ce sens, sera punie selon la loi en vigueur. »
« La solution est de repenser la gouvernance en mettant au cœur de l’action publique les principes de la responsabilité, de transparence, d’équité et d’imputabilité. Il faut aussi et surtout restaurer la confiance entre l’appareil judiciaire et les citoyens et lutter farouchement contre l’impunité sans quoi on ne peut en aucun cas espérer à un changement de la situation », déclare Aboubacar Dorah Koita, membre du CNOSCG.
À Siguiri, l’on se rappelle encore des deux jeunes lynchés au carrefour ORS dans la commune urbaine de Siguiri et deux autres présumés bandits lynchés par une foule en colère dans le district de Bouré Diadaya au mois d’avril 2018, aussi celui d’un présumé bandit extirpé de la prison civile avant d’être lynché et trimballé à la devanture en 2015.
Malgré les séries de sensibilisation organisées à cet effet pour combattre ce fléau. La situation perdure. Car en 2017, la Justice de paix en relation avec les médias ont sillonné les zones les plus affectées telles que les sous-préfectures de Doko et de Kintinian pour expliquer les conséquences du lynchage des présumés malfaiteurs.