La concession du port conventionnel au travers le Port Autonome de Conakry pour, dit-on, son extension et sa modernisation par la Guinée à la société turque Albayrak SA fait jaser, pour une modique somme de 200 millions US sur 25 ans d’exploitation pour les deux premières années. L’extension et la modernisation seront financées sur les bénéfices perçus de l’exploitation du PAC, apprend-on. Le montant total du contrat de cession avoisinerait les 500 millions de dollars américains.
En effet, depuis 2010, l’Etat sous la conduite du président Alpha Condé est dans une stratégie économique de recherche de ressources (argent) au détriment de véritables actions de développement. C’est un syndrome connu de tous !
De ce fait, le seul motif justifiant les actions publiques entreprises jusque-là par ce régime est cette frénétique quête de fonds pour des projets mal montés et très moins bénéfiques à la Guinée et aux Guinéens. La maladresse de trop du gouvernement engluée dans une piètre communication sous tendue par une pédagogie qui met à rude épreuve l’intelligence des populations guinéennes se dénude encore une fois par la signature de ce contrat en catimini défiant les règles les plus élémentaires de la transparence. Donc, d’une mal gouvernance pathologique corsant la souffrance chronique des populations, car chaque action publique menée par les pouvoirs publics, Etat et collectivités locales, a un coût ou un bénéfice sur la vie des citoyens.
L’inintérêt de ce contrat de concession réside dans la violation des règles élémentaires de transparence et d’économie en retournant brièvement le cadre d’application des règles de transparence et d’efficacité dans la commande publique. Un flou artistique règne entre les structures et acteurs impliqués dans le processus de passation des marchés publics, mais aussi de la délégation de service public. L’une des recommandations des institutions de Breton Wood pour la régulation des marchés et des secteurs économiques de « souveraineté » était la création et l’opérationnalisation d’une autorité de régulation des marchés publiques indépendante. Pour ne pas perdre ses lettres là-dessus, raccourcissons ; cette entité a été réduite à sa plus petite expression par des décisions du pouvoir centrale et confinée dans une gestion scabreuse sur un plan professionnel par le chamboulement du mode de fonctionnement et d’intervention dans le processus de passation de marché public, et dont on entend moins parlé. Concrètement, depuis le départ de son premier directeur général, même le dernier des mohicans ne sait ce que fait l’ARMP aujourd’hui ! Un laisser aller total favorisant la magouille et la concussion sur les marchés publics et la délégation de service public s’est renforcé entre la direction des marchés publics, l’ACGPM et ce machin de régulation. D’aucuns disent que ce trou noir dans le processus de la commande publique a été provoqué sciemment pour favoriser certaines PME (petites et moyennes entreprises) appartenant aux pontes du régime et à une nouvelle bourgeoisie créée et circoncise en Guinée par l’adjudication des marchés de gré à gré aux sbires du pouvoir. Ça ressemble à l’objectif négatif, qu’il y avait derrière la banque BADAM, morte née parce que créée, selon certains responsables, pour impulser la bourgeoisie d’une seule minorité en Guinée, qui s’est recyclé sur tous les pans de l’économie nationale depuis 2010. La même chose est arrivée à la défunte société guinéenne des télécommunications (SOTELGUI).
Généralement, et dans une telle perspective négative pour le reste de la population, les bénéficiaires de la plupart des marchés publics sont les sociétés bien connues pour leur proximité avec le régime de Conakry. En vérité, il y a un lien directe entre l’avènement du pouvoir président de la République et l’émergence de ces PME connues de tous. Tout est fait pour faire gagner de l’argent et enrichir rapidement une minorité contre une majorité pauvre dont les rangs seront grossis par les travailleurs du PAC, qui verront très bientôt leurs emplois supprimés par ce contrat de concession à Albayrak. Laisser en l’état cette « politique à problème » suppose que quelqu’un viendra régler le problème. Ce qui par ailleurs, ne met dans aucune garantie les contrats farfelus et dommageables signés par les responsables avec la baraka de certains complices au sommet de l’Etat.
Pourquoi Alpha Condé a pris l’initiative de céder le port conventionnel sans étude sérieuses et sans appel d’offres ?
La réponse à cette question se trouve déjà dans une opération similaire sur le même secteur portuaire où la cession du quai à conteneur à Bolloré Logistique fait l’objet d’un procès à l’encontre de cet opérateur breton accusé d’avoir financé la campagne d’Alpha Condé lors des élections de 2010 et un autre président de la sous-région élu dans des conditions jugées « douteuses » et non « transparentes » par les observateurs. Le dossier est pendant devant les juridictions françaises et à coup sûr rattrapera ce régime et tous ceux qui ont tenté de le défendre par des arguments infondés et de surcroit insolites.
Avant de ressortir certaines incongruités dans l’objectif de rechercher des ressources financières par ce régime, l’analyse des annexes du contrat dont copie a été reçue par Guinéenews© ne dénote pas qu’un dimensionnement économique et technique sérieux a été fait et consigné dans un business plan comme cela se doit dans tout contrat de concession, d’affermage, de BOT (build operate and transfer), etc. Guinéenews© poursuit les investigations pour retrouver dans « les tiroirs » de l’administration publique le business plan global du gouvernement pour le port de Conakry, ainsi que ses déclinaisons par segment concédé en l’occurrence celui exploité par Bolloré Logistique.
Le pire des choix économiques depuis 2010, est l’approbation de ce contrat par Alpha Condé à Albayrak SA qui l’autorise à licencier et à recruter à sa guise les travailleurs du PAC, il va de soi que la politique d’employabilité chantée par son régime est une fausse sirène vendue ces derniers temps. Une tromperie d’Etat qui va enfoncer des citoyens dans l’extrême pauvreté à l’image de la SOTELGUI dont les anciens travailleurs sont dans un dénouement total.
Sur le principe, l’appel d’offres se fait par l’observation des règles d’économie, de transparence et d’efficacité, et ce pour répondre à un objectif de compétitivité et de pérennité dans les actions publiques. Aucun appel d’offre n’a précédé cette opération de cession ; donc, c’est une cession illégale par le seul fait d’enregistrer une violation minime soit-elle de la procédure d’octroi à Albayrak SA. La manière déteint sur le but recherché.
Le ministre Aboubacar Sylla, porte-parole du gouvernement et ancien porteur des paroles de l’opposition républicaine, dans un exercice très difficile, digne des politiques guinéens a exhibé l’urgence comme motif principal de la signature de ce contrat. Quant à la directrice générale du PAC, elle a argué que le besoin d’investissement à hauteur de 200 millions de dollars US est nécessaire pour sortir le port de « sa léthargie ». Arguments fadaises et folkloriques d’un Etat drivé sans vision, ni méthode et conduisant lentement la Guinée vers l’abime économique, estiment les observateurs.
Aujourd’hui, les caisses sont vides, tout est au rouge et le gouvernement cherche des fonds ; les citoyens souffriront bientôt d’une inflation sans précédent, de nouveaux billets seront mis en circulation ; qui ne constate pas qu’après les mines bradées, l’augmentation du prix du carburant à la pompe, c’est le port conventionnel qui est cédé à Albayark SA, ensuite ce sera la privatisation des entreprises publiques décriées par une gestion non rentable et entretenue par la médiocrité rampante, puis toute la Guinée entière sera vendue ?
Que dit le code des marchés publics et la délégation de service public en pareille circonstance, selon les experts de l’administration publique ?
Les dispositions du Code des Marchés Publics et Délégation de service public sont très claires lorsqu’il s’agit de céder un patrimoine, comment l’Etat guinéen doit procéder en lien avec la procédure de de contrat de gestion, d’affermage, etc.
Cliquez sur le lien suivant pour lire le code des marchés publics : Decret portant code MP
L’urgence évoquée par le ministre Aboubacar Sylla, porteur de « paroles contradictoires » sur une temporalité récente, est étreinte par l’article 38 du décret d’application du code des marchés publics, qui édicte que « … la DNMP, l’ARMP et l’ACGPMP doivent veiller à ce que le montant total des marchés passés par entente directe par une autorité contractante ne dépasse pas 10% du total des marchés publics passés par cette autorité sur un exercice budgétaire… » .
Le directeur financier du PAC, après avoir démenti sa hiérarchie sur la pertinence de la cession du port conventionnel à Albayrak, a confirmé au travers de sa lettre au chef de l’Etat que des étapes essentielles ont été écourtées pour la signature du contrat de concession ; il s’est rétracté, peut-être sous l’effet d’une proposition dont l’effet sera surveillé par Guinéenews©.
De l’avis d’un cadre du ministère des finances, interrogé par Guinéenews©, « la demande dérogatoire devrait d’abord être validée par l’ARMP avant une approbation du ministre des Finances à cause de la valeur de la convention à signer qui est supérieure au budget alloué au ministère des Transports et qui met l’autorité contractante au dessus du seuil des 10% exigés par l’article 38 du code des marchés publics (paragraphe 4 de l’article 38 du CMPDSP) ». Or, le directeur financier a relevé que le PAC est liquide et rentable par conséquent un programme d’investissement aurait pris en compte les besoins devant être couverts par les 200 millions dollars US évoqués par la directrice générale ; ainsi, les déclarations sont affublées de controverses. S’exprimant à la radio Espace FM, le syndicat a aussi démenti le ministre Sylla qui a parlé de 13 millions de dollars US comme recettes générées par le PAC alors que celles-ci gravitaient au tour de 30 millions l’année dernière.
Selon cet autre cadre, « seul le ministre des Finances peut engager l’Etat à moins d’une délégation de signature ; donc, ne peut approuver un projet de convention de délégation de services publics de telle nature suivant les dispositions de la Constitution Guinéenne et la LORF (loi organique sur la réforme des finances publiques). S’il est prouvé que la convention a été approuvée par la directrice générale du PAC, Mme Hawa Keita, ce serait en l’absence des éléments précis inclus dans les statuts du PAC qui est une SA, une erreur à rectifier immédiatement ». A elle seule, cette affirmation anéantie la justification du porte-parole du gouvernement.
Le principe de la concurrence par appel d’offres qui est la règle mise de côté au détriment d’un contrat qui exige une expertise particulière, un autre cadre soutien qu’ « une consultation restreinte, une forme de dérogation également prévue par le CMP, aurait pu permettre à la Guinée de comparer les meilleures entreprises internationales évoluant dans le secteur portuaire et choisir sur la base des critères très précis, études techniques, économiques et financières, qui sont mentionnés dans un cahier de charges fournis par le PAC, celle dont l’offre technique et financière serait à l’avantage de l’Etat guinéen ». Cette assertion est soutenue par les arguments du directeur financier du PAC.
A contrario, même si l’Etat avait déjà sa préférence, ce processus devrait permettre également d’obtenir des alternatives de négociations avec le partenaire de son choix et garantir ainsi au mieux les intérêts de l’Etat à travers des offres comparatives et obéissant aux règles internationalement admises pour ce type de concession portuaire. Mais hélas !
Les informations glanées ça et là par Guinéenews©, n’intègrent ni une demande dérogatoire produite par le ministère des transports, ni la preuve de soumission d’un projet de convention à la DNMP pour examen encore moins l’implication de l’ARMP et l’ACGPM. Ce qui est une violation flagrante du Code des marchés publics et ses textes d’application, tout s’est fait à la « méthode russe entre le gouvernement et Albayrak SA ».
Les autorités attachent moins d’importance à l’intérêt des populations qu’à l’obtention des gains individuels faciles et rapides. En reliant les avis des uns et des autres, il est révélateur que dans l’administration publique, on reprend les mêmes fautes soit par mauvaise foi, soit par incompétence. A cette allure, il n’est pas fortuit de se demander quelle sera la réelle portée des réformes engagées par le chef de l’Etat sur les marchés publics si l’on continue à saper toutes les bonnes pratiques devant permettre à la Guinée d’être un modèle de gouvernance à l’image des pays de la sous-région, qui ont déjà adopté les meilleurs principes de gestion des finances publiques.
L’analyse de votre quotidien électronique est que, le fait de travailler dans l’urgence n’exclu et ne dédouane aucun responsable quant au respect des procédures et leur application, en conséquence de quoi, la reprise du processus par la voie d’une consultation transparente et économique est recommandable pour le bien des citoyens ; donc, de l’économie nationale. De plus, l’Etat peut prendre l’exemple sur ses homologues de la sous-région où aucune autorité n’a daigné céder son port conventionnel, même la Sierra Leone d’à coté. Mais pour ce régime, que vaut une telle suggestion lorsque le gouvernement a un calendrier qui est potentiellement dérouté par l’extrême pauvreté, le rejet, les crises sociales latentes en puissance et les scandales économiques et financiers qui montent en valeur.
Apparemment, les obdervsteur estiment que le chemin vers 2020, année électorale qui sera agitée, est plein d’embuches !