Alors que les collectivités locales du pays entrent pleinement dans la transition avec les délégations spéciales remplaçant les conseils communaux à tous les niveaux, il est légitime de se demander quel cap suivre. Arbitrer entre le cadre légal dans lequel les nouvelles administrations décentralisées devront opérer et les réalités quotidiennes ne sera pas une tâche aisée.
Tout commence par le décalage entre la lettre de mission adressée aux délégations spéciales et le code des collectivités en vigueur. En effet, dans ce document signé par le ministre de l’Administration du Territoire, des instructions sont données, avec mention d' »actions prioritaires ».
Selon la lettre dont Guineenews a obtenu une copie, il est demandé d’élaborer et d’adopter le budget des communes, ainsi que de mettre à jour et d’adopter les Plans de Développement Local (PDL), les Plans de Travail Annuel (PTA) et les Programmes Annuels d’Investissement (PAI).
De plus, le général Ibrahima Kalil Condé enjoint les remplaçants des élus locaux à mettre en œuvre les activités prévues dans les budgets, les PTA et les PAI, tout en assurant la coordination efficace des différentes initiatives pour garantir leur réalisation dans les délais impartis.
Il est également mentionné le recrutement du personnel des communes, conformément aux procédures prévues par la Loi portant Statut des Fonctionnaires des Collectivités Locales.
Il est précisé que l’ensemble de ces documents stratégiques, à savoir les budgets, les PDL, les PTA mettant en évidence les actions prioritaires de développement socio-économique, ainsi que les appels à candidatures pour le recrutement, doivent être transmis au représentant de l’État pour approbation avant leur mise en œuvre. De plus, des copies des documents validés et approuvés doivent être transmises aux Directions en charge des Collectivités Locales pour la coordination et le suivi de la mise en œuvre des activités et des orientations fixées dans la présente lettre de mission.
Ces instructions suscitent des interrogations à plusieurs niveaux. Un observateur, interrogé par Guineenews afin d’obtenir un avis d’expert sur la question, évitant tout commentaire, renvoie à juste titre au code des collectivités.
Dans ce document, l’article 104 stipule que « la Délégation Spéciale ne peut engager les finances de la Commune au-delà des ressources disponibles de l’exercice courant, sauf lorsque son mandat a commencé durant le cours d’un mandat ».
Par ailleurs, le même article prévoit que « lorsque le mandat d’une Délégation Spéciale s’étend sur plus d’un exercice budgétaire, elle est alors autorisée à engager les finances de la Commune à raison d’un douzième (1/12) des prévisions budgétaires de l’exercice durant lequel elle a débuté son mandat, pour chaque mois ou portion de mois durant lequel son mandat s’étend sur l’exercice suivant. »
Toutefois, le code précise que « elle ne peut ni préparer le budget de la Commune, ni examiner les comptes de l’Ordonnateur ou du Receveur, ni modifier le personnel de la Collectivité, leur affectation, leur rémunération ou leurs conditions de travail. »
Il reste donc à déterminer s’il n’était pas nécessaire de modifier le code des collectivités avant de mettre en place les délégations, en particulier en ce qui concerne la rémunération et les conditions de travail des employés des communes qui méritent d’être largement améliorées.