La Guinée traverse un des moments les plus critiques de son histoire. Une situation née de la volonté des gouvernants à organiser le référendum en vue de l’adoption d’une nouvelle Constitution. Sauf que cette démarche rencontre une farouche résistance de la part de certaines organisations de la société civile et des partis politiques d’opposition regroupés sous la bannière du Front National pour la Défense de la Défense de la Constitution (FNDC). Depuis que l’idée de ce projet a commencé à prendre forme, des manifestations se sont multipliées dans le pays avec son corollaire de victimes, de dégâts matériels.
Devant l’inquiétante tournure que prend la situation, Nafiou Diallo, journaliste et directeur de publication de ‘’Focus Magazine’’ sonne l’alerte et en appelle à l’implication des religieux en vue de faire éviter le pire. Le malvoyant le fait dans une entrevue qu’il a accordé à Guinéenews dont voici un extrait :
« Je suis aujourd’hui porteur d’un message relatif à la situation qui prévaut actuellement. Mais avant, je vais commencer mes propos par un adage qui dit que quand on pleure sous la pluie, les larmes sont invisibles. C’est mon cas actuellement. C’est pourquoi j’ai préféré venir pour crier dans vos colonnes. Parce que-là, on peut m’entendre. Parce que mes larmes sont invisibles. Ce qui pointe à l’horizon actuellement est extrêmement grave. Moi, je me rends compte de cela. Nous qui sommes atteints de cécité, nous sommes beaucoup plus inquiets que ceux qui voient, les yeux ouverts. Parce qu’ils ne s’en foutent pas mal. Chacun défend son petit plateau. Chacun cherche à venir manger. Le reste, ce n’est pas leur problème. Il nous intéresse de faire interpeller face à cette situation que les gens minimisent et qui, pourtant, comporte des brindilles, qui, quand ça s’allume, on ne le souhaite pas, ça atteindre toute la cité et tout le pays. Nous ne le souhaitons. Que Dieu nous en garde ! C’est maintenant qu’il faut faire des alertes précoces pour éviter les conflits. Et d’ailleurs, le conflit est là déjà. C’est comment éteindre ce conflit, comment résoudre ce conflit que nous allons nous employer à faire des propositions de solution. A défaut de la solution, on se contente d’une solution. Alors, ce qui se profile à l’horizon nous interpelle. Cela nous inquiète très sérieusement. Ceux qui voient plus que nous qui sommes dans la cécité, qu’ils soient aussi inquiets autant que nous. Qu’ils ouvrent les yeux pour voir clair et mettre la balle à terre.
Quand je suis les communicants au niveau des états-majors des partis politiques, c’est extrêmement grave. Il y a même des hautes personnalités, c’est-à-dire des ministres qui s’expriment à la place de ceux qu’ils ont commis comme communicants. Tu parles, tu emploies des mots plus graves que ceux des communicants. Or, ils doivent les interpeller. Ils doivent leur tracer une ligne de conduite, pour ne pas mettre le feu aux poudres. Comme le dit Dadis, il n’y a que des allumeurs de feu qui sont les communicants des partis. Et cela est très grave.
Donc, je suis venu interpeller les deux parties, c’est-à-dire le parti au pouvoir et le FNDC pour que chacun mette la balle à terre et qu’on se regarde face à face pour enfin se dire que ce qui arrive là est extrêmement grave. Je sais qu’on me comprendra difficilement. C’est pourquoi j’ai commencé mes propos par dire que celui qui pleure sous la pluie, ses larmes sont invisibles.
Pour ma proposition de pistes de sortie de crise, puisque nos intellectuels ont démissionné, je le dis et l’assume. Ils s’intéressent maintenant à la mangeoire, c’est-à-dire que ceux qui sont déjà auprès du gouvernement, cherchent à s’agripper-là. Et quand ils s’agrippent-là, ils ne veulent pas quitter. Ceux qui ne sont pas là, il y en a qui lorgnent de ce côté pour en prendre le contrôle.
Et dès qu’ils viennent, ils changent de ton. Moi, je souhaite vivement qu’il plaise à nos religieux notamment l’Archevêque et le Grand imam de la mosquée Fayçal, qu’ils s’interpellent, qu’ils sachent qu’on ne peut pas brûler ce pays sous leurs barbes. Ils n’ont qu’à s’investir pour calmer le jeu.
S’il le faut, qu’on fasse impliquer le Cardinal Robert Sarah. Je le souhaite vivement. Qu’il lui plaise de venir s’investir. Parce que nous n’avons plus de recours. Ces intellectuels qui ont déjà démissionné, on ne peut pas compter sur eux. Les coordinations régionales ne peuvent pas le faire, parce que chacune d’elles a une position tranchée. Et chacune d’elles défend cette position ».
Propos transcrits par Mady Bangoura