C’est une affaire ayant duré trois ans qui vient de connaitre ce jeudi 27 février 2025 son épilogue devant la chambre de jugement de la CRIEF.
La sentence de l’instance de recours de cette juridiction spéciale du pays, habilité à juger les infractions économiques et financières, est sans appel. Elle a condamné l’ancien Premier ministre d’Alpha Condé, Ibrahima Kassory Fofana à 5ans et au paiement de deux milliards de francs guinéens au titre des dommages et intérêts.
A l’issue de ce procès, le procureur spécial, Aly Touré se satisfait de la décision de la chambre de jugement, soulignant que cette condamnation fait suite à des infractions graves, notamment ‘’le détournement de données publiques, l’enrichissement illicite et le blanchiment de capitaux’’. Selon lui, la preuve était évidente, à travers des documents bancaires et des signatures qui laissent peu de place au doute.
« Pour nous, c’est un motif de satisfaction parce qu’il a été reconnu coupable de toutes les infractions pour lesquelles nous l’avons poursuivi », a déclaré le procureur, rappelant que tous les éléments du dossier étaient solides et bien fondés. Il a insisté sur le fait que la non-comparution de Kassory Fofana à l’audience n’a eu aucun impact sur le verdict.
« C’est son choix de ne pas venir. Cela ne change rien à la solidité de notre dossier », a-t-il ajouté.
En revanche, la défense a vivement contesté cette condamnation. Me Sidiki Bérété, l’un des avocats de Kassory Fofana, a qualifié la décision de « magique », accusant le juge de manipuler la justice. Selon lui, l’accusation de détournement de 15 milliards de francs guinéens est infondée, arguant que seulement 12 milliards seraient encore présents à la Banque centrale et que 3 milliards avaient déjà été utilisés pour des projets d’assainissement des hôpitaux.
« Le ridicule ne tue pas », a-t-il pesté, en insinuant que la condamnation était une décision politique, taillée sur mesure pour affaiblir des figures potentielles de l’opposition.
Me Bérété a dénoncé un processus judiciaire qu’il considère comme biaisé et a affirmé que ce verdict ne visait pas seulement Kassory Fofana, mais aussi toute personne en mesure de contester le pouvoir en cours.
« Ce sont des décisions au service des hommes de coup d’État », a-t-il affirmé avant d’insister sur le fait que la justice guinéenne était manipulée au service d’intérêts politiques et non pour servir la vérité et la justice.
L’avocat n’a pas exclu la possibilité de recourir à un appel ou à d’autres voies juridiques pour contester cette décision, mais il a exprimé son scepticisme quant à l’indépendance de la justice guinéenne. « Nous allons exercer tous les recours possibles, mais il n’y a plus d’espoir pour la justice », a-t-il dénoncé. Pour lui, le système judiciaire actuel, qu’il qualifie de « créé par décret », n’est pas digne de confiance et dessert la Guinée.