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Candidature des ministres à la députation: « On ne peut pas invoquer d’incompatibilité », dixit Mamadi 3 Kaba juriste

Alors que les ministres d’Alpha Condé sont tous (ou presque) à l’intérieur du pays en train de battre campagne pour les législatives couplées au référendum, la question se pose sur la légalité de cet acte de ces commis de l’Etat, ainsi que de la candidature de certains d’entre eux à la députation. Guinéenews a posé la question au juriste Mamadi 3 Kaba.  Sa réaction.

Guinéenews : Que dit la loi sur la candidature des ministres à la députation ?

Mamadi 3 Kaba : Il faut dire que la candidature d’un ministre pour la députation  ne pose aucun problème. Par contre, il y a des incompatibilités qui se posent. Une incompatibilité signifie qu’il y a des fonctions qui ne peuvent pas être exercées par la personne au même moment. Ça  veut donc dire que le mandat de député est incompatible avec l’exercice de certaines fonctions. L’article 133 du Code électoral révisé, dans son premier alinéa, précise cela en disant que « l’exercice de toute fonction publique non élective est incompatible avec le mandat de député ». Cela veut dire que dès lors qu’on est élu député, on ne peut pas exercer au même moment ce mandat de député avec une fonction publique non élective. Ce qui voudrait dire que dès lors que le ministre est élu député, il ne peut plus cumuler les deux fonctions de ministre et de député.

En revanche, durant la période de campagne, c’est-à-dire avant qu’il ne soit élu député, on ne peut pas invoquer d’incompatibilité. Ce qui signifie que le ministre peut continuer à faire sa campagne. Mais, dès lors qu’il est élu député, il ne sera plus possible pour lui de cumuler les deux fonctions. L’article 141 du même code électoral révisé dispose ou précise que le député élu qui se trouve dans le cadre d’incompatibilité doit démissionner dans les huit jours qui suivent son élection.

Toutefois, sur un plan moral personnel, un ministre qui se porte candidat, il est loisible pour lui de démissionner de sa fonction de ministre pour se consacrer à sa campagne. Mais, au vu de notre législation, on ne peut ériger cela au rang des obligations. L’incompatibilité ne commence que quand il est élu député.

Sauf qu’au-delà des ministres, c’est parfois tous les cadres des départements ministériels qui sont impliqués dans ces campagnes… Cela ne porte-t-il pas atteinte au principe de la neutralité de l’administration ?

Tout à fait. Cela n’est pas normal. L’administration doit garder sa neutralité. Ça veut aussi dire qu’on ne doit pas utiliser les moyens de l’Etat pour faire une campagne. Cela est interdit. On ne doit pas se servir des moyens de l’Etat ou utiliser l’administration pour des fins de campagne. Non seulement c’est une violation à la loi, mais aussi ça créé un déséquilibre et de discrimination entre les candidats. Les candidats qui n’exercent pas des fonctions dans l’administration seront lésés.

Sur le référendum, que pensez-vous de l’arrêt de la Cour sur le recours des opposants contre l’ordonnance du Président Alpha Condé ?

Je ne souhaiterais pas analyser ou commenter une décision de justice ou un arrêt de la Cour constitutionnelle. C’est un arrêt qui s’impose à tous, je ne souhaiterais donc pas le commenter.

Alors quel est votre avis sur l’ordonnance qui a fixé  les modalités de ce référendum… ?

De mon point de vue, l’ordonnance portant sur les dispositions relatives au référendum vient combler un vide juridique. Le référendum est certes prévu par la Constitution et prévu par le Code électoral, mais les deux textes ne donnent aucun encadrement. Donc, il y a un vide juridique qui existait. Et, dans les limites de temps prévues par la loi d’habilitation votée par l’Assemblée nationale lors de sa dernière session, une ordonnance peut règlementer une matière. Pourvu que cette matière ne tombe pas dans les domaines régis par les 20 lois organiques prévues par la Constitution. L’article 83 de la Constitution précise que l’Assemblée ne peut habiliter le Président à prendre des mesures par voie d’ordonnance des matières qui relèvent du domaine de la loi organique. Toute la question est de savoir si l’ordonnance est intervenue dans un domaine régi par une loi organique. Vu qu’il y avait un vide juridique, on ne peut pas faire un raisonnement par analogie pour déduire que le référendum devrait être obligatoirement régi par une loi organique. Il faut préciser que toutes les fois qu’il est question d’un renvoi vers une loi organique, la Constitution précise. Mais sur ce cas précis, la Constitution n’a rien prévu. Et comme on le dit, là où la loi ne dispose pas, on ne peut pas disposer là.

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