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Attaque du domicile d’Alpha Condé : AOB poursuit la négation des faits devant le tribunal criminel

Plus d’un mois après sa première comparution devant le tribunal criminel de Dixinn, le commandant Alpha Oumar Boffa Diallo alias AOB était de nouveau à la barre lundi 14 mai. Et la deuxième audience a été consacrée à la suite de son audition. Sous le feu des questions des avocats de la partie civile, du procureur et parfois du juge, l’officier instructeur a maintenu sa version des faits.

Cette version c’est que,  dans la nuit du 18 au 19 juillet 2011, vers 22 heures, il était à Coléah pour acheter du pain, quand  feu lieutenant Amadou Diallo – qu’il présente comme un appât –  l’a appelé au téléphone. Le lieutenant lui a dit d’aller le trouver à Lambagny, en haute banlieue de Conakry. Sans chercher à savoir pourquoi, il a pris sa voiture et s’est rendu sur le lieu indiqué. A sa grande surprise, il trouve qu’Amadou Diallo est pris en otage. Alors, lui aussi sera pris en otage. Les ravisseurs lui ont demandé de les suivre dans un cortège dont il était au milieu. Le cortège s’est dirigé vers la sortie de Conakry. Ils sont allés à Kagbélen, puis sont descendus à KM36. Ensuite, ils se sont redirigés vers Conakry et sont arrivés au camp (militaire) Alpha Yaya. Là, les assaillants sont descendus de leurs voitures – il ne sait pas où ils sont partis et ce qu’ils sont allés faire. Puis, ils sont revenus et ont poursuivi le périple nocturne en allant vers Kipé.

A Kipé, le lieutenant Amadou Diallo a été abatu sous ses yeux. Après la fusillade de Diallo, les ravisseurs lui ont demandé d’aller attaquer là où il y a la barrière – la sentinelle à l’entrée de la résidence d’Alpha Condé. Il demande alors à ses ravisseurs de le laisser foncer en premier. En réalité, dit-il, il voulait se sauver. Arrivé au niveau de la sentinelle, il informa le chef de poste qu’il y a des gens qui viennent les attaquer. Aussitôt, celui-ci donna des coups de sommation. Pendant ce temps, AOB file vers la Ville (Kaloum). Mais il est poursuivi par des assaillants. A Coronthie, il est rattrapé par les assaillants qui ont encerclé son véhicule. Sans le savoir, on avait d’ailleurs posé une grenade sous sa voiture. Le petit projectile explose et le propulse de sa voiture. Grièvement blessé, il arrive quand même à ramper jusqu’au bord de la route où quelqu’un l’a reconnu et l’a fait envoyer à l’hôpital…

Procureur Williams Fernandez

L’accusé n’a donc pas changé sa version des faits depuis la cour d’assises de 2013. Le seul élément nouveau reste ses accusations contre le procureur William Fernandez, alors avocat général de la Cour d’appel de Conakry. « On devait m’envoyer au Maroc pour mon traitement, mais il m’a dit qu’il me faut citer des noms qui se trouvaient sur une liste qu’il avait. Il y avait Tibou Camara, Kassory Fofana, Diallo Sadakadji… Il m’a dit que si je cite ces noms qu’on allait me donner deux millions de dollars et qu’on me ferait traiter au Maroc », a indiqué l’accusé.

Faut-il faire entendre celui qui est aujourd’hui le procureur général près la Cour d’appel de Kankan ? Pour Me Salif Béavogui, l’un des avocats des trois accusés – il y a aussi Fatou Badiar et Jean Guilavogui –, mieux vaut éviter tout ce qui peut faire retarder ce procès qui souffre déjà des reports à des dates prolongées. « Notre décision primordiale est de tout faire pour obtenir l’acquittement de nos clients. Nous devons nous battre pour détruire les charges qui pèsent contre eux », a dit Me Salif Béavogui au sortir de l’audience.

AOB estime avoir joué un rôle d’alerte de la garde présidentielle. Mais la conviction des avocats du chef de l’Etat reste la même : il est bien l’un des présumés responsables de l’attaque qui a endommagé la résidence du chef de l’Etat en 2011 et causé des morts parmi les éléments de la garde présidentielle. « Ma conviction est même renforcée. Voyez-vous, un militaire de son état, libre de ses mouvements à bord d’un véhicule avec des armes à feu, vous dit qu’il a été pris en otage. Les faits sont têtus, et l’homme également est de toute intélligence. Quand vous parlez, on écoute et on en tire les conséquences », réplique Me Joachim Gbilimou, l’avocat de la partie civile qui s’est d’ailleurs opposé à la demande de mise en liberté provisoire en faveur des accusés. « Les faits sont trop complexes pour accorder une liberté provisoire à ces accusés. Mieux vaut attendre une décision définitive », estime l’avocat.

De leur côté, les avocats de la défense ont justifié leur demande de liberté provisoire par l’inépuisable détention provisoire de leurs clients – ils sont sous mandat de dépôt depuis juillet 2011 – et leurs états de santé fragiles, notamment Fatou Badiar qui souffrirait d’un diabète. Le juge Mangadouba Sow a préféré rejeter leur demande et a renvoyé l’affaire au 18 juin prochain.

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