Après treize années d’attente, le procès du massacre du 28 septembre 2009, ayant fait plus des 150 morts, des femmes violées, a été ouvert le 28 septembre dernier au tribunal ha doc de Dixinn, délocalisé à Kaloum.
Si pour certains, la tenue de ce procès pour qu’enfin toute la vérité soit dite sur cette affaire, constitue un ouf de soulagement et d’espoir pour d’autres comme Ahmed Tidiane Kaba, un ancien bâtonnier et avocat à la CPI, restent pessimistes. Il a fait savoir cet avis hier lundi dans l’émission ‘’On refait le monde’’ de nos confrères de Djoma TV.
Selon lui, un échec de ce procès est à craindre en raison de ‘’plusieurs manquements’’ dans la procédure.
“ Ce procès, j’avoue, me fait peur. J’ai l’impression qu’on a précipité l’organisation de ce procès. Mais cette précipitation, je ne parle pas du moment où les crimes ignobles ont été commis mais, à partir du moment où l’intention a été exprimée d’organiser le procès. J’évite de heurter d’énormes personnes qui attendent ce procès et qui ont été usées et abusées par les événements les plus ignobles et qui constituent l’horreur de notre pays qui ne grandit pas la Guinée mais qui montre la Guinée comme un pays monstrueux. C’est regrettable ! Ce procès a une importance telle, au regard des crimes commis, il me semble que pour organiser ce procès on aurait pu prendre beaucoup plus de tact. On aurait pu prendre beaucoup plus de précaution pour l’organiser et je crains qu’il ne soit pas bien organisé, je crains qu’on ait anticipé l’organisation à ce jour, et je crains que les organes judiciaires qui ont en charge de juger n’ait pas la compétence requise. A mon humble avis, plutôt que de charger une juridiction ordinaire de Dixinn, de Conakry 1 ou de Mafanco dans l’organisation actuelle de la réforme de la justice de ce procès, j’aurais souhaité comme sous tous les cieux, ça se fait avec une juridiction ad hoc. Une juridiction spéciale organisée pour la circonstance, composée de magistrats avertis, aguerris qui sont presque à la fin de leur carrière. Parce que l’enjeu est tel et le crime a été tellement horrible que je crains que les magistrats n’aient pas les verbes, ni le tac, ni l’art et la manière d’aborder à la fois les inculpés, à la fois les parties civiles à la fois même l’auditoire, je le crains. La connaissance doit être doublée d’expérience. L’expérience n’est pas à négliger. En matière judiciaire, n’est pas juge qui veut. Ces gens-là n’ont jamais fait une cour d’assise. Ces gens-là n’ont jamais jugé un crime. Le crime est exceptionnel. Donc, faisons attention. Quand je parle, je frémis parce que j’ai assisté au procès des gangs, je sais ce que ça fait (…..) A cette époque-là en Guinée, vous voyez des corps allongés sur des rails partout et c’est ce procès des gangs qui a appris aux Guinéens que la loi de talion ne doit plus exister et que la justice est une éducation et cette éducation reste permanente encore en Guinée à l’effet de ce procès qui a prouvé que le crime commis devrait passer devant le juge et qu’il n’y a pas de justice expéditive (….) Ce n’est pas un procès pénal, c’est un procès criminel, ce n’est pas un procès des droits des affaires, ce n’est pas un procès civil, c’est un procès criminel.
On vous dit tribunal ad hoc, c’est du bluff, on ne peut pas prendre une juridiction spéciale de Dixinn et dire ad hoc. C’est faux ! Ad hoc, c’est une juridiction qui ne vient ni du tribunal de Conakry 1 ni de Conakry 2 encore moins de Mafanco où de Kindia, de Labé. C’est un corps spécial qui est composé des gens venant d’autres instances judiciaires qui sont composés pour la circonstance. Et pour l’enjeu du procès et à mon avis, ça vaut le risque. Tribunal ad hoc qu’est-ce que c’est ? C’est la juridiction de Dixinn qu’on a déplacée, qu’on a amené à la Cour d’appel. En quoi, ce tribunal est ad hoc ?
Fondamental, selon la déclaration des droits de l’homme et la charte africaine, il faut la présomption d’innocence. Malheureusement, les gens inculpés à partir d’aujourd’hui sont décriés, sont considérés de facto comme les auteurs, la présomption d’innocence exige tant qu’un juge compétent, tant qu’une juridiction compétente n’a pas reconnu coupable une tierce personne, il ne doit jamais y avoir de déballage, elle ne doit jamais être salie, ne doit jamais être humiliée ni traînée son nom dans la boue. C’est ça la présomption d’innocence. Deuxième principe, chaque inculpé a droit à un avocat obligatoirement. Troisième principe, il y a l’égalité de tous les inculpés devant le juge et tous doivent avoir accès au juge. Et la dernière, il faut que la personne qui est privée de sa liberté ne soit pas mise à la disposition de celui qui est à l’origine d’être privé de sa liberté que le jugement ait lieu dans un délai absolument raisonnable”, a –t- il expliqué.