La page du régime Alpha Condé est définitivement tournée depuis son éviction par une junte militaire, le dimanche 5 septembre 2021. Comment digère-t-on cette réalité dans la sous-préfecture de Baro, son village d’origine ? Notre reporter fait le constat.
Ce petit village de pêcheurs bordant sur les rives du Niandan, est situé à 37 km de Kouroussa et à 50 km de Kankan. En termes de réalisation, les 8 KM qui le séparent de la route nationale ont été entièrement bitumés, de nombreux forages ainsi qu’un grand centre de santé et un marché y ont été réalisés.
En marge de cette visite que nous y avons effectuée ce vendredi, nous avons constaté qu’à Baro, chacun vaque à ses occupations. Croyance oblige, les citoyens que nous y avons rencontrés, prennent la chute du président avec beaucoup de philosophies et la considèrent surtout comme étant un coup du destin.
« On remercie Alpha hier, on le remercie aujourd’hui et on le remerciera demain. Ce que Dieu décide, c’est ce qui se finit par se produire. Ce qu’il n’as pas fait pour nous, c’est ce qu’il n’a pas fait. Chez nous les malinkés, on dit, au lieu de donner du poisson aux gens, apprend leur à pêcher. Alpha Condé a appris à beaucoup de gens à pêcher. Mais ces gens ont préféré pêcher pour eux seuls. Sinon nous ne cesserons pas de rendre grâce à Alpha Condé », nous a confié, un des membres de la notabilité de Baro, rencontré dans un café bar à la rentrée du village.
Pour sa part même s’il se dit frustré par la nouvelle, Loncény Keita, un des trois chefs de districts de la localité, qui nous a reçus à son domicile accepte lui aussi ce changement à la tête du pouvoir.
« A vrai dire, nous n’avons pas aimé le renversement d’Alpha Condé du pouvoir. Mais au stade où nous en sommes, nous ne demandons que soit préservée sa vie. Le pouvoir d’un homme finit par finir un jour. Nous avons procédé à la passation de l’ancien sous/préfet par le commandant de notre gendarmerie. C’était de l’émotion totale. Mais nous n’avons pas dérogé à la règle. Donc nous soutenons, les nouvelles autorités .
Un peu plus loin, Moussa Condé, un responsable de jeunesse, rencontré en pleine activité de curage pour le passage des eaux stagnantes en bordure du bitume, déclare à son tour que :
« Depuis que nous avons appris la nouvelle du coup d’Etat, nous jeunes et les sages de Baro, sommes plongés dans la tristesse. Parce que nous voulions que son troisième mandat arrive à terme. Mais tout ce que Dieu fait est bon. Nous voulons tout simplement que le nouveau président arrivé, soit un homme de référence », a-t-il, indiqué.
A la recherche de potentiels membres de sa famille, notre visite nous a menés au fin fond du troisième district de cette sous/préfecture où se trouve un domicile privé appartenant à l’ex président.
Une très grande villa duplexe entourée par une grande cour. Mais pas moyen d’y entrer car selon le gardien des lieux « nous ne sommes pas les bienvenus ».
Cependant selon le voisinage que nous avons questionné, aucun membre de la famille de l’ancien président, n’habite dans cette demeure.
C’est de l’autre bout du village que nous avons pu rencontrer, une femme du nom de M’ballia Condé, que presque tous les villageois indexent comme étant la nièce de l’ancien président.
Cependant, elle vit toute seule dans des conditions pas croyables, dans une maisonnette. Visiblement affaiblie par la maladie, elle n’a pas pu répondre à nos questions. Alors c’est un autre membre éloigné de la famille du nom de Hadja Kandé qui a accepté de nous faire certaines confidences sur les origines de l’ex président de la république.
« Le grand père d’Alpha Condé est né dans cette cour. Il a laissé son premier fils ici au village et est allé s’installer au Kankandé. Alpha est le fils de la fille de la femme qu’il a épousé là-bas. Alpha Condé, est mon beau. Car il est le petit frère du père de mon mari. Le père de mon mari, Damany Condé résidait à Conakry. Et il appelait toujours ce dernier grand frère. Et il avait un autre de ses grands cousins qu’il appelait aussi grand frère dont la jeune dame qui se trouve là malade de tension, est la fille », nous a-t-elle confié.
Poursuivant la dame ne cache pas sa tristesse face à la capture de celui qu’elle appelle son beau et invite ceux qui le détiennent à ne pas lui faire de mal.
« Nous avons été tristes d’apprendre ce qui lui est arrivé. Mais nous n’y pouvons rien. De mon avis, il était maintenant vieux, il ne pouvait plus assumer valablement le pouvoir. Donc ceux qui l’ont évincé, nous leur demandons de prendre soin de lui », a-t-elle supplié.