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Gratuité de la vaccination néonatale et infantile : une annonce, une autre réalité sur le terrain

« La vaccination des enfants et femmes enceintes est gratuite dans les centres de santé et postes de santé. Bref, dans toutes les structures publiques. Cela s’inscrit dans la politique globale du président de la République dans le cadre de la gratuité des soins obstétricaux et néonataux d’urgence. C’est-à-dire la santé de la mère et de l’enfant. » Cette déclaration est signée du coordinateur national du Programme Elargi de Vaccination (PEV), Dr Moustapha Dabo. Malheureusement, la réalité sur le terrain est tout autre. Les bénéficiaires de ce programme sanitaire sont obligés de débourser entre 5 000 et 10 000 FG pour profiter de ces soins.

 Au centre médical communal (CMC) de Ratoma, la vaccination des enfants se fait à la rentrée d’un bureau situé au niveau de la grande terrasse du bâtiment principal. Adossé contre un pilier, situé à quelques mètres du lieu de vaccination, nous avons compté 5 femmes ayant déboursé chacune 10 000 fg, après avoir fait vacciner leurs enfants. A la suite de ce constat, nous avons approché l’agent vaccinateur auquel nous avons rappelé la gratuité de la vaccination. Ne pouvant nier, puisque prise la main dans la patte, elle s’est défendu e en ces termes : « nous ne réclamons pas d’argent aux femmes qui viennent se vacciner ou faire vacciner leurs enfants. Mais quand elles nous donnent, nous prenons puisque personne ne les oblige. »

 Pourtant, Mahawa Kéita que nous avons interrogé après avoir sorti de son portefeuille les 10 000 fg, affirme le contraire : « ce n’est pas ma première fois de venir ici, mais on m’a toujours réclamé de l’argent. Il y a certains infirmiers qui réclament 5 000 et il y a d’autres qui demandent 10 000fg ».

La directrice étant absente du centre ce jour, c’est le doyen d’âge des médecins, par ailleurs chargé de l’encadrement des stagiaires, que nous avons rencontré pour parler de cette situation qui, du moins, est assimilable à du racket. A la faveur de cet entretien, Dr Biolaye Camara affirme ne pas être au courant du paiement de la vaccination dans son centre qui demeure pourtant un fait qui crève les yeux.

« Nous avons écrit noir sur blanc pour informer les femmes que la vaccination les concernant est gratuite. C’est pareil pour la césarienne et l’accouchement. On reçoit les kits gratuitement. Donc tout agent qui se hasarde à faire payer et que nous sommes mis au courant, écopera d’une sanction. C’est une décision du gouvernement que nous nous appliquons à la base. Donc si tu t’entêtes à violer cette décision, tu prends toute la responsabilité. Mais jusqu’à preuve du contraire, nous ignorons tout payement de la vaccination dans notre centre. Et tout contrevenant à cette mesure sera pris, sera puni », a déclaré le doyen en dépit l’existence de cette pratique qui est aujourd’hui très courante dans les différents centres de santé du pays en général et au CMC de Ratoma, en particulier.

 A la question de savoir s’il est arrivé une fois aux responsables de tomber sur un cas et d’en sanctionner, Dr Camara a répondu par l’affirmative sans s’y attarder.

Plus loin, Dr Biolaye précise : « c’est à cause de la gratuité des soins obstétricaux et infantile qu’aucune recette n’est imputable à la maternité. Il n’y a que les recettes des urgences, du cabinet dentaire, du laboratoire, de la pharmacie et de la médecine générale qui sont inscrites mais jamais celles de la maternité à moins que ce ne soit des cas de fibromes et autres. »

Au CMC de la Minière, nous avons croisé à la rentrée une nourrice. Bébé au dos, Halimatou Diallo est aussi catégorique comme toutes autres femmes qu’on rencontrées ce jour : « effectivement, je suis venue ici pour faire vacciner mon bébé. On m’a fait payer 10 000 fg. »

Interrogé sur la question, le Directeur du Centre a exigé pour sa part un ordre de mission pour pouvoir s’exprimer à notre micro.

Fatoumata Bangoura, mère de deux filles âgées respectivement de 5 et 3 ans, habite au quartier Wanindara, dans la commune de Ratoma, elle confirme les témoignages précédents et est même surprise d’apprendre que ces soins dont elle et ses filles doivent bénéficier soient gratuits. « J’ai toujours déboursé de l’argent au centre de santé de Wanindara avant de recevoir les soins pour mes deux filles et moi-même. Quand j’étais enceinte aussi, c’est ici je me faisais vacciner mais moyennant toujours de l’argent. Avant les 9 mois de l’enfant, on nous fait payer 5000. Mais de plus de 9 mois jusqu’à deux ans, on paye 10 000 fg. C’est vous qui m’apprenez même que c’est gratuit », soutient-elle.

C’est le même scénario à Lambanyi où la vaccination a toujours été aussi payante. C’est quasiment ainsi partout en Guinée, selon des plusieurs témoignages. Comme Fatou Bangoura, plusieurs autres guinéennes ignorent d’ailleurs que la vaccination néonatale et infantile, est gratuite.

Face donc à la persistance de ces pratiques illégales de racket institué dans les établissements sanitaires du pays, le coordinateur national du PEV envisage de renforcer la communication pour inverser les tendances. « Notre défi est de renforcer la communication à l’intention des femmes sur la gratuité de la vaccination néonatale et infantile. Parce qu’aujourd’hui beaucoup parmi elles ignorent qu’elles ne doivent payer aucun centime pour la vaccination. C’est un sérieux problème parce que le fait de faire payer, constitue par endroit un frein à la vaccination », estime Dr Dabo.

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