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Que sont-ils devenus ? Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’, ex-international du Hafia FC et du Syli national de Guinée, parle de son parcours des années 70-80 (1ère Partie)

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ ou ‘’Euzobio’’ est cet ex-international guinéen dont le parcours sportif est intimement lié à celui du triple champion d’Afrique, le Hafia football club et du Syli national de Guinée des années 70-80.

Né le 28 avril 1952 à Conakry et précisément à Coléah (commune de Matam), Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ est fils de feu Ousmane Kollet et de feue Aissata Sylla. Marié à 2 femmes, il est père de 7 enfants dont 4 filles. Très tôt, à l’âge de 12 ans, il sera orphelin de père et de mère. C’est aux côtés de ses grands-parents, qu’il recevra la suite de son éducation, qui d’après lui, n’a connu aucune désarticulation, malgré la subite perte de ses parents biologiques.

Il a fréquenté pour ses études primaires, l’église Saint- Michel de Coléah 3, le secondaire et le lycée au collège cours de Coléah. Il sera orienté après l’obtention du bac à la faculté de droit où il poursuivra ses études jusqu’en 2ème année. Suite à un voyage effectué sur Abidjan, pour suivre, le jubilé de l’international feu Salif Kéita, une interdiction de séjour à Conakry s’imposera à lui, et l’empêchera de terminer son cycle universitaire. Finalement, il va élire domicile en Côte d’Ivoire, où il prêtera ses services pendant quelques années au club d’Africa sport d’Abidjan, club dans lequel il prendra sa retraite. Pour des raisons de sécurité, Ismaël Sylla posera plus tard ses valises en France, où il vit depuis plus de 42 ans.

Rencontré par votre site d’information Guinéenews à travers sa rubrique ‘’Que sont-ils devenus ?’’, Ismaël Sylla ‘’Euzobe ou Eusobio’’, se livre simplement dans cette première partie de cet entretien, pour nous parler de ses débuts dans le football, des stages de formations suivies à l’étranger, son parcours dans le football à la base, jusqu’à son intégration dans le Hafia et le Syli national de Guinée. Dans cet entretien, il nous fait vivre ces quelques instants inoubliables de sa première titularisation, au sein du Hafia contre l’ASEC d’Abidjan, et la deuxième en sélection nationale contre les Aigles du Mali, ainsi que sa prouesse de buteur par 2 fois en match aller-retour, contre le meilleur gardien africain de l’époque, le tunisien Sadock Sassi alias ‘’Atouga’’. Contraint de s’exiler en Côte d’Ivoire, suite à une simple visite effectuée dans le pays de l’Empereur Baoulé Laurent Pokou, Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’, nous raconte la suite de sa carrière de footballeur, au sein de l’Africa Sport d’Abidjan, les conditions de traitement, et le niveau atteint par son club d’accueil sur le continent. Pour un match amical négocié, entre le Kaloum star de Conakry 1, et l’Africa sport d’Abidjan, Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’, fait état dans cet entretien, des ennuis qu’il a essuyés lors de ce voyage Abidjan-Conakry-Abidjan, et les raisons de son départ définitif pour la France en 1982.

Lisez.

Guinéenews : Bonjour Monsieur Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’, vous êtes ex-international et vainqueur du triplé continental des clubs champions en compagnie du Hafia football club de Conakry, et parallèlement acteur actif des grandes randonnées du Syli national de l’époque. Citadin, très jeune certes, vous êtes venu au football. Racontez-nous vos débuts avec le cuir rond ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : Bonjour et merci de l’invitation pour cette interview. J’ai commencé très tôt à jouer au football, et cela depuis l’école primaire de Coléah. A notre époque, après l’école, le football était le loisir préféré de plusieurs jeunes de notre âge, cependant que d’autres sports aussi étaient pratiqués. J’ai aimé le football, et je me rappelle de l’organisation d’un tournoi interscolaire, au niveau de la section du 5ème arrondissement. Cette finale avait opposé l’école primaire de Coléah 3, à celle de Coléah 1. Je faisais partie de l’effectif de l’école primaire de Coléah 3, qui avait remporté la coupe, et notre directrice d’alors était madame Kadé Cissoko, très éprise du football à l’époque. Arrivée au collège cours de Coléah, notre professeur de Biologie, qui était M. Bah Oury de Kankan, ex-international guinéen, avait pu mettre une grande équipe en place, au compte de notre école. J’ai joué dans cette équipe avec feu Aboubacar ‘’Bruno’’ BangouraPeter Williams et beaucoup d’autres jeunes talentueux de mon âge. Je me souviens à l’époque, avoir disputé une demi-finale contre l’école du 2 août, dont l’équipe était composée de très grands joueurs tels feu Bangaly SyllaOusmane Bangoura feu ‘’Garrincha’’, feu Papa Camara et plusieurs autres, dont j’ai oublié les noms. Le premier match qui s’est soldé sur un score nul d’1 but partout, s’était joué au stade annexe du 28 septembre. Vu l’enjeu, et surtout la rivalité qui existait entre ces deux écoles, le deuxième match fut programmé et délocalisé au grand stade du 28 septembre et là, nous avions perdu cette demi-finale. Le collège du 2 août, si j’ai bonne mémoire, avait rencontré l’université club de Gamal Abdel Nasser à Kankan. Bref, c’est tout pour vous dire, que nous avions été très tôt repérés par les 2 entraîneurs hongrois Budai Laslo et Sofoldi. Au nombre de 22 footballeurs recrutés à travers tout le pays, nous avions effectué des stages de 5 à 6 mois en Hongrie, en Yougoslavie et en Bulgarie.

Guinéenews : Vous vous rappelez encore des noms de vos coéquipiers, avec lesquels vous aviez effectué ces voyages de stages de formations ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : Au fait c’était notre génération, il y avait feu Papa Camara, feu Bangaly Sylla, feu Mamadou Alioune Kéita ‘’N’Joléah’’, feu Bernard SyllaDjolé de Kankan, feu Altafini de Kindia, et qui est devenu finalement arbitre. Nous étions nombreux dans ce groupe, paix aux âmes de tous ces disparus, et je prie Dieu de leur réserver le paradis céleste.

Guinéenews : Au retour de ces stages de formations à l’étranger, quelle fut la suite dans l’ascension réservée à ce grand nombre de footballeurs recrutés ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : Au retour de ces différents stages, j’avoue que nous étions une génération bien apte, et capable de renforcer les aînés au sein des clubs, et du Syli national. C’est ainsi que Bernard Sylla et Papa Camara furent les premiers, à être infiltrés dans le Hafia football club. Notre groupe constituait l’équipe qu’on avait appelée les ‘’Espoirs de Guinée’’. A vrai dire, c’était un effectif tout à fait prêt pour jouer au haut niveau. Et en ce moment, il n’y avait que 2 clubs, le Hafia FC et le Kaloum star de Conakry1 et l’effectif s’était réparti entre ces deux clubs.

Guinéenews : Pour rappel aviez-vous aussi suivi cet échelonnement de la base au sommet, en jouant pour les différentes équipes de votre localité à l’époque ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : Oui, c’était bien structuré à l’époque, chacun pouvait défendre les couleurs de sa localité, au niveau du comité de base, de la section et de la fédération. J’ai eu l’opportunité de jouer pour le 5ème arrondissement avec mes ainés, El hadj Cherif Souleymane l’unique ballon d’or guinéen pour le moment, feu Soumah Soriba ‘’Edenté’’, premier capitaine à brandir le premier trophée des clubs champions d’Afrique, feu Condé MoryWaldir Pereira, et pas mal d’autres internationaux de l’époque.

Guinéenews : Parlant du Hafia football club, pouvez-vous nous dire quand et comment vous aviez intégrez ce légendaire club ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : J’ai été préparé un peu plus tôt, pour intégrer le Hafia ou le Syli national de Guinée. Je m’entrainais depuis 1971, avec ces deux équipes, qui formaient une seule d’ailleurs, puisque ce sont les mêmes éléments, qui s’y retrouvaient de part et d’autre.

Guinéenews : Vous vous entraîniez avec l’équipe type du Hafia depuis 1971, et qu’est-ce qui pourrait expliquer votre absence lors de cette première consécration du Hafia en 1972 au Nakivubo stadium de Kampala (Ouganda) ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : En 1972, je faisais partie du groupe, qui était à l’internat pour la préparation du match de Kampala. Aujourd’hui, j’ai l’occasion de le dévoiler et de dire pourquoi je n’ai pas été de la partie. Pendant notre internat, j’avais sauté les murs de l’école des cadres (actuelle grande mosquée), pour rejoindre mon domicile de Coléah. Franchement, je n’étais pas mentalement bien préparé pour ce voyage. J’ai rejoint ainsi mes amis Antonio Souaré et autres, au stade de Coléah, qui était notre véritable nid. C’est en 1973, que j’ai joué mon premier match international au compte de Hafia contre l’ASEC d’Abidjan.

Guinéenews : Vous sautez le mur de l’internat en 1972, puisque vous n’étiez pas préparé mentalement pour affronter l’épreuve de Kampala. 1 an après, vous êtes titulaire lors d’un match aussi important et historique dit-on, qui avait opposé le Hafia FC à l’ASEC d’Abidjan. Racontez-nous votre état d’âme, quand vous aviez su que vous deviez être parmi les onze du Hafia dans cette rencontre ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : Ma première surprise fut d’abord l’acte de l’entraîneur Budai, qui me convoqua dans sa chambre, pour me préparer mentalement, afin d’affronter ce match. Nous arrivons dans les vestiaires, j’aperçois l’empereur Baoulé feu Laurent Pokou qui portait un grand boubou sur son maillot. Et ce n’était pas n’importe quel grand boubou car, il était orné de gris-gris, de fétiches, de miroirs, de tout ce qui pouvait impressionner un adversaire. Très jeune, j’étais préparé à tout, sauf à ce que je venais de voir dans les vestiaires avec Laurent Pokou. Quelque part, j’ai eu un sursaut, un courage, une motivation pour finalement affronter le match avec engagement. Permettez-moi de tirer le chapeau pour mon ainé Thiam Ousmane Tolo, qui nous avait préparés physiquement, et mentalement face à tout genre de situations. Il aimait s’entraîner avec moi, et il m’a rendu un grand service sur le plan physique. Mon premier match fut concluant, j’ai joué au poste de demi-défensif, avec Chérif Souleymane et feu Condé Mory.

Guinéenews : Du banc de touche à votre titularisation, c’est une période que traverse généralement tout débutant. De votre vécu sur le banc de touche, pouvez-vous nous en parlez ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : Je n’ai pas fait assez de temps sur le banc de touche. Après le match contre l’ASEC d’Abidjan, j’ai tout de suite enchaîné ma titularisation. J’ai joué le deuxième match international pour le Syli de Guinée, contre les Aigles du Mali à Bamako. C’était dans le cadre des phases éliminatoires de la Coupe d’Afrique des nations Egypte 1974. Si je vous décris ce match, c’est qu’il reste parmi ceux que je ne peux pas oublier.

Guinéenews : Du coup pouvez-vous assouvir notre curiosité, sur ce qui a retenu votre attention lors de ce match ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : Comme je viens de le dire, c’est un match que je ne peux pas oublier. Et c’est ce match qui m’a encouragé, pour aller assister au jubilé de feu Salif Kéita à Abidjan, et la suite fut le tournant de ma carrière. Tenez, un jeune du bidonville de Coléah, qui a évolué ici au stade de Coléah, et qui se retrouve au stade omnisport de Bamako, entre une kyrielle de professionnels maliens. Salif KéitaCheick Fantamady KeitaFantamady Diallo et autres professionnels étaient de la partie. Je me retrouve en face de Salif Keita, grand de taille, élégant, ce jour-là, Chérif Souleymane ne cessait de me dire : « cesse de le regarder et continue à jouer.. ». Je fus vraiment impressionné par Salif Kéita, et c’est lui qui avait marqué les 2 buts maliens. Et encore le plus jeune, j’ai réalisé l’exploit de marquer le but de l’égalisation du Syli national. Comme nous étions jeunes à l’époque, jusque-là, je regrette du fait de ne pas avoir pris des photos avec Salif Keita ce jour, et pourquoi, il n’y a pas eu d’échanges de maillots entre nous, en guise de souvenirs de ce grand match Syli nationalAigles du Mali. Au match retour, le Syli avait gagné et les professionnels maliens n’avaient pas répondus à l’appel.

Guinéenews : Votre première titularisation contre l’ASEC d’Abidjan, le match du Syli national face aux Aigles du Mali, sont en somme quelques inoubliables souvenirs durant votre parcours. Vous rappelez-vous aussi de votre match contre la Tunisie, contre Atouga, le meilleur gardien africain de l’époque ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : Oui je n’allais pas faire passer cela sous silence, bien que je sois assez modeste. C’est moi qui ai pu battre Atouga à Conakry, et au match retour à Tunis. Sans démagogie, Atouga était le meilleur gardien de but africain de l’époque, et cela était indiscutable.

Guinéenews : Racontez-nous dans quelles circonstances, le jeune Ismaël Sylla de l’époque, a pu battre à deux reprises, le meilleur gardien de but africain à l’aller et au retour ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : Le but marqué à Conakry a surpris tout le stade, et personne ne s’attendait car, le match était véritablement  tendu. Tout est venu à partir d’un corner botté, que le gardien Atouga a repoussé en boxant le ballon. Dans mon rôle de demi défensif en repli, j’ai directement accompagné, et mis le ballon au fond des filets. C’était vers les dernières minutes, de la fin du match, et le score fut d’1 à 0. Au retour, ils ont gagné, et ils se sont qualifiés pour la coupe du monde 1974. J’ai aussi marqué l’unique but guinéen à Tunis. Ce sont de beaux souvenirs qui me reviennent à chaque moment.  

Guinéenews : Tout nouveau dans ce groupe constitué de vos aînés, et autres copains d’âges, expliquez-nous vos premiers moments, l’accueil fut-il difficile à votre endroit ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : Non !non !L’accueil ne fut pas du tout difficile à mon endroit. Je remercie ici mes grands-parents, puisque tous mes 2 parents sont décédés, quand je n’avais que 12 ans. Ces grands-parents m’avaient inculqué une très bonne éducation. Quand j’ai intégré l’équipe, et jusqu’à ce que j’aie quitté, après les entraînements du matin ou du soir, je m’emparais de tous leurs maillots pour les laver, et les étaler. J’ai toujours respecté ce droit d’aînesse, et en retour, ces aînés m’ont gratifié et entourés de toutes leurs affections. J’ai été à tout moment choyé par tous les anciens. Et l’accueil et la suite de mon évolution n’ont pas connu de difficultés au sein du groupe.

Guinéenews : Nous avions appris que dans ce groupe, vous aviez tissé une amitié toute particulière, avec une personne, dont vous n’allez pas taire le nom et de qui s’agit-il ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : Oui, je ne peux pas taire le nom d’Elhadj Chérif Souleymane. Je l’ai rencontré avant même d’être dans le Hafia et le Syli. C’est au sein de l’équipe du 5ème arrondissement, que je l’ai rencontré quand je jouais en junior, et lui en sénior. J’ai joué en junior avec feu Ousmane ‘’Manè’’ GarrinchaKountaZakaria Baldé et autres. Finalement, j’ai joué avec Chérif en sénior, et il m’a toujours apprécié. Autre fait qui a galvanisé notre amitié, c’est quand j’étais en exil en Côte d’Ivoire, et il a osé prendre l’autorisation auprès du Responsable suprême de la Révolution, feu Ahmed Sékou Touré, afin de célébrer le baptême de mon fils. Personne ne pouvait oser à cette époque, faire face aux problèmes d’un ‘’fuyard’’ ou ‘’exilé’’ comme on aimait l’interpréter. Avant cela, j’avais promis de lui donner le nom de mon enfant, et cela fut réalisé à mon absence. Donc Chérif Souleymane, sous cet angle, est mon ‘’fils’’, et notre amitié est encore de plus en plus solide.

Guinéenews : Avez-vous eu une carrière professionnelle et si oui, décrivez-nous cet autre parcours ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : J’ai joué en dehors de la Guinée et précisément en Côte d’Ivoire, au sein de l’Africa Sport. Je n’appellerais pas cela du professionnalisme. Et c’est ce que d’ailleurs, je regrette pour toute notre génération. Nous n’avions pas eu de carrières professionnelles. Les frontières étaient hermétiquement fermées, et nous n’avions pas eu la chance et ni le courage, de tenter de telles aventures. C’est mon regret durant ma carrière sportive. Sinon on avait le talent, des grands footballeurs à l’époque. Cet aspect a beaucoup joué sur le football guinéen. Cherif SouleymanePetit Sory, feu Maxime Camara et autres, pouvaient rivaliser avec les autres joueurs du continent.

Guinéenews : Alors comment s’était passé votre accueil en Côte d’Ivoire, et quel fut le niveau de votre apport au sein de l’Africa sport ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : Quand je suis arrivé en Côte d’Ivoire, j’ai intégré l’Africa sport d’Abidjan, où évoluaient mes amis guinéens feu Ousmane ‘’Manè’’ Garrincha et Sékou Koulibaly. Après les clauses de mon contrat, le club m’a donné un travail bien rémunéré, une maison bien meublée, et un salaire vraiment à la hauteur. Durant mon contrat avec cette équipe, nous avions été souvent champions de Côte d’Ivoire, et au moment où je raccrochais, l’Africa sport était en finale  de la coupe d’Afrique des clubs champions, opposé au TP Mazembé du Zaïre. J’ai joué le match aller à Abidjan, et c’est lors de ce match, que j’ai été touché au niveau du genou (problème de rotule). Je n’ai pas pu jouer le match retour à Kinshasa, à cause de mon genou. Cette année-là, le TP Mazembé remportera la coupe, face à  l’Africa sport d’Abidjan. J’ai passé de bons moments avec ce club ivoirien, qui a toujours rivalisé avec l’ASEC d’Abidjan, et c’est une autre histoire, une expérience dans ma carrière de footballeur.

Guinéenews : Vous aviez effectué un voyage sur Conakry avec l’Africa sport d’Abidjan, pour livrer un match amical contre l’AS Kaloum de Conakry 1. Vous aviez eu chaud paraît-il lors de ce voyage, et pouvez-vous nous en dire plus ?

Ismaël Sylla ‘’Euzobe’’ : C’est exact, un match amical entre ces deux équipes, a été négocié par les dirigeants de l’AS Kaloum, et largement par les hautes autorités de ces 2 pays. Bien évidemment, mon cas était revenu au centre de cette négociation. Fallait-il venir à Conakry ou pas ? Les dirigeants de l’Africa sport par la voix de son président d’alors Simplice Zinsou, m’avaient bien rassuré : «… Nous allons partir ensemble et revenir ensemble… ». J’étais toujours inquiet, malgré cette assurance, que l’on  me faisait comprendre. Au bord d’un des avions de ‘’Air Ivoire’’, nous avions atterri à Conakry, et je fus presque le dernier à descendre de l’avion. Au bas de la passerelle, se trouvait arrêté le commandant feu Siaka Touré. Sur les marches, j’ai senti que tout ce que je portais était trempé de sueur. Le pire, c’est quand arrivé tout près de lui, ma sacoche se décrocha de mon épaule et m’échappa. C’est lui-même feu ‘’N’fa Siaka’’, qui me la restituera, et tout en me disant de continuer. J’avais peur, mais ce geste me redonna du courage. A l’arrivée, beaucoup m’avaient reconnu, et ont ressenti la même pitié pour moi, et c’est plus tard que j’ai su tout cela. Le lendemain, nous sommes arrivés au stade pour la première séance d’entraînement. Nous avions attendu à la tribune, pour un match qui sous peu allait prendre fin, entre deux équipes militaires. Notre délégation était logée à côté de la tribune officielle, et je fus reconnu par plusieurs personnes qui étaient assises aux côtés de feu Général Toyah Condé. Ce sont ces mêmes personnes qui m’ont indexé, en disant que je suis le ‘’footballeur fuyard’’, et que je suis de retour. En bon malinké, j’ai entendu le Général dire «… a yé min, a lu ya mina… ». Littéralement traduit en français : «… il est où ? Arrêtez-le ». Au bout de quelque temps, je fus entouré par des militaires, et j’ai aperçu une jeep militaire, qui garait sur la piste de course du stade. C’est dans ce véhicule que j’ai été transporté à l’ambassade de la Côte d’Ivoire en Guinée. Des négociations ont commencé, et finalement ce fut décidé, de me ramener par la route en Côte d’Ivoire. J’ai refusé cette proposition, en faveur d’une autre, qui s’agissait d’emprunter un vol d’air Sénégal en partance le lendemain pour Dakar. Et le même jour, j’ai été embarqué dans la compagnie UTA pour rejoindre Abidjan, et l’incident fut clos. Arrivé à Abidjan, et à tout moment, la peur m’envahissait, je ne me sentais plus en sécurité. Ce sont toutes ces raisons qui m’ont fait partir en France, et je vis là depuis 42 ans. (Fin de la 1ère partie)

Entretien réalisé par LY Abdoul pour Guinéenews.

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