Trente quatre ressortissants de la sous-région interpellés à Kagbeleen, dans la commune de Dubreka. Une cinquantaine à Fria. Cent soixante trois à Siguiri. Quatre-vingts et plus à Kankan et une centaine à N’zérékoré. Tous interpellés dans les mêmes circonstances et pour les mêmes causes : regroupement sur un lieu avec des amulettes au cou, aux bras, aux reins et tous agents de la société Q’net. Interpellés, ils sont déshabillés, filmés et présentés à la télévision nationale comme de vulgaires « bandits ou rebelles » avant d’être conduits dans les locaux de la police pour être entendus sur PV (procès verbal). Pourquoi ? Ahmed Sékou Touré, Saiffoulaye Diallo, Barry III, Karim Kéïra…Réveillez-vous ! Vos enfants ont raté le chemin pour une déviation dangereuse. « Tout Africain qui hier, entrait en Guinée et qui était d’office Guinéen », comme vous l’aviez décrété, ne l’est plus. Il est désormais un vulgaire étranger soumis à l’interrogatoire et à l’humiliation. Le régime actuel et ses services de sécurité en ont ainsi décidé. Et pourtant, la spécificité de la Guinée, parmi tous les pays que compte le continent africain, a toujours été sa capacité d’accueillir les étrangers et les protéger.
C’est vrai. Comme dit un groupe de musiciens ivoiriens, « on aime bien les étrangers, mais à la fin, on se préfère… » Et il est aussi vrai que l’étranger doit se soumettre à la loi du pays d’accueil et la respecter. Il lui est imposé une limite à ne pas franchir. A défaut, il subit cette loi et si possible il est purement et simplement mis à la frontière. Mais dans ce cas précis, les voix s’élèvent ici et là pour s’interroger sur les raisons profondes de cette vague d’arrestations des ressortissants des pays de la sous-région. Est-ce anormal que des jeunes d’un même pays se regroupent dans une maison sur un territoire hôte ? Est-il interdit à un ressortissant d’un pays africain de porter une bague protectrice contre les mauvais esprits, des amulettes contre les esprits maléfiques ou autres accidents…? Où est le mal ? Le regroupement de ces ressortissants de la sous-région dans des concessions, est le propre des étrangers dans un pays. Au Niger, en Libye, au Maroc, en Tunisie, les candidats à l’aventure ne se sont-ils pas regroupés aux mêmes endroits ? Les étudiants comoriens, camerounais, ivoiriens, tchadiens, congolais, centrafricains, maliens, etc., ne vivent-ils pas en communauté dans des concessions à Conakry ? Doit-on les qualifier de bandits ou de rebelles ?
Et quand on sait que jusqu’ici aucun diplomate des pays de la sous-région ne s’est fait entendre malgré les commentaires qui fusent de tout côté, il y a lieu d’aller avec prudence et sagesse dans ce dossier sensible. Les pays voisins et le monde entier regardent la Guinée dans la gestion de cette crise provoquée, on ne sait par qui.
C’est vrai. Le cas des étrangers arrêtés et qui sont aux mains des forces de sécurité nous interpelle tous. Entre les commentaires, les analyses qui alimentent les réseaux sociaux avec les interprétations de certaines autorités régionales et la xénophobie, il n’y a qu’un pas….Faisons très attention ! La Guinée est un havre de paix où viennent s’abriter tous les africains qui aiment la quiétude et qui cherchent à vivre. Il faut savoir faire la part des choses. Certes, ces étrangers aujourd’hui dans les filets de la police, peuvent ne pas être tous des saints, mais il faut savoir trier parmi eux les brebis galeuses sans causer de tort aux innocentes victimes d’escroquerie de la société Q’net. Moins de passion donc et beaucoup de lucidité pour ne pas se tromper de cibles.