Sur l’éventualité de sa candidature à la présidentielle d’octobre prochain, le chef de l’État, comme à son habitude, a encore amusé le tapis vert, histoire sans doute d’avoir un coup d’avance sur l’opposition, dans sa tentation pour un troisième mandat. Dans un entretien accordé récemment à Jeune Afrique, Alpha Condé tout en jouant les calimero, en vient à dresser un portrait peu flatteur des leaders du Front national pour la défense de la constitution (Fndc).
En tacticien consommé, Alpha Condé sait qu’en politique, il faut « tuer » ses rivaux pour gagner. Il ne rate donc aucune occasion pour épingler ses opposants. Comme dans cet entretien accordé au magazine panafricain Jeune Afrique, où il se fait passer pour la victime d’une conspiration ourdie par le Fndc, pour qui la fin justifierait les moyens.
C’est un chef de l’État droit comme un I qui affirme que le Fndc voulait perpétrer un putsch.
Dans sa tirade, il ne va pas du dos de la cuillère en martelant : « ces gens étaient clairement dans une démarche insurrectionnelle de prise du pouvoir par la force. Leurs leaders l’ont dit dès avant le 22 mars : nous manifesterons lundi, mardi, mercredi, et jeudi nous serons au palais. L’un d’entre eux a même parlé de la nécessité d’une transition militaire, ce qui a donné des idées à un officier inconscient qui a entraîné une dizaine d’hommes dans un projet de coup d’État voué à l’échec. C’était oublier un peu vite que la Guinée d’aujourd’hui n’est plus la Guinée d’hier », accuse le président.
Ajoutant dans la même foulée que « Le FNDC a envoyé ses nervis attaquer des bâtiments publics, verser de l’huile sur les routes, manifester avec des machettes, des frondes et des fusils de chasse. Une tentative d’attentat au véhicule piégé contre une station d’essence a été déjouée in extremis à Conakry. Dans la bouche des dirigeants du FNDC, il n’était question que de renverser le pouvoir et de rendre le pays ingouvernable. »
Pour Alpha Condé, « quand Cellou Dalein Diallo dit à ses jeunes militants : « Êtes-vous prêts à mourir ? » cela veut dire quoi ? La Guinée n’a jamais connu de guerre civile, et elle n’en connaîtra pas. J’ai moi-même été opposant pendant quarante-deux ans et, lorsque des militaires sont venus me voir après les élections de 1993 pour me proposer de me porter au pouvoir par la force, je leur ai répondu que je ne faisais pas de la politique pour gouverner des cimetières. Jamais je n’ai eu recours à la violence. Je suis profondément démocrate, mais mes adversaires ont une mentalité de putschistes », a-t-il allégué.
Ce qui ne saurait tout de même justifier toutes ces morts enregistrées à la faveur de ce double-scrutin contesté du 22 mars. Dans ce discours artificieux, les observateurs sont au regret de constater, que nulle part il n’y a de compassion à l’endroit des victimes de ces violences électorales.
Ces propos du président qui sont quand même assez graves, continuent d’alimenter la chronique dans la cité. Et Sidya Touré, a cru bon de rétablir la vérité des faits, en réfutant ces allégations, dans un entretien accordé à radio espace ce lundi.
Selon le leader de l’Union des forces républicaines (Ufr), l’une des têtes pensantes du Fndc, ‘’à aucun moment, il n’a été question d’aller prendre le pouvoir… Et qu’il n’y a aucun putsch à l’horizon. Les opposants ont juste qu’on ne peut pas aller aux élections avec un fichier où il y avait 8.700.000 guinéens, alors que nous savons que notre fichier ne doit pas dépasser 4 800 000 électeurs…’’, a-t-il répliqué.
Une parade trouvée pour la tentation du troisième mandat
Le président qui ne cache pas ses intentions de se maintenir au pouvoir, après ses deux mandats, refuse toutefois de lâcher le mot. La parade toute trouvée à cette astuce étant celle de se rabattre sur son parti et ses alliés.
Alpha dit donc dans cet entretien que son ‘’opinion sur une éventuelle candidature importe peu. C’est le Rassemblement du peuple de Guinée, ou plus exactement la mouvance RPG–arc-en-ciel, dans laquelle siègent d’anciens leaders de l’opposition, comme les ministres Aboubacar Sylla et Mouctar Diallo, qui décidera le moment venu de l’identité de son candidat’’.
Connaissant un peu comment ça fonctionne au sein de cette mouvance, où l’obséquiosité est la règle. Avec des cadres rompus dans l’art de manier la brosse à reliure. A cette allure, tous se prononceront le moment venu en faveur d’une candidature du président.
On n’est donc pas sorti de l’auberge.