A l’approche de la fête de l’Aïd el Kébir ou Tabaski, les prix des bœufs ont explosé à Fria. Pour la circonstance, en guise de sacrifice d’Abraham, il est recommandé à tout musulman ayant les moyens d’immoler un bélier en bonne santé ce jour. En Guinée en général et à Fria en particulier, les jours de fêtes sont synonymes de hausse des prix surtout à l’occasion de la Tabaski où les prix du mouton sont souvent exorbitants.
Au marché du bétail du centre-ville de la commune urbaine où notre correspondant a fait un tour, les prix se discutent entre 800.000 et 2.000.000 GNF, selon la taille de la bête.
Cette augmentation n’est pas un effet du hasard. La récente augmentation du prix du carburant à la pompe en est l’une des causes comme le dit Hamidou Barry, un bouvier arrêté au milieu de ces bêtes attendant impatiemment les clients qui se raréfient : “ Ce n’est pas du tout facile. Avec l’augmentation du carburant, les clients se plaignent de la cherté du mouton mais ils doivent aussi comprendre que nous dépensons assez d’argent pour venir avec les moutons en ville. Je paie le transport de mes deux collaborateurs et moi ensuite les chauffeurs nous demandent de payer 80.000 GNF par mouton avant d’embarquer et pour avoir assez de moutons, il faut aller loin dans les sous-préfectures et y passer des nuits. On fait le commerce pour avoir des bénéfices et non des pertes “ déclare-t-il
Outre la hausse du prix du carburant à la pompe, les bouviers dénoncent également les tracasseries policières au niveau des frontières, entre les sous-préfectures.
“ (…) on dépense beaucoup dans le transport mais aussi les policiers à la veille des fêtes vont dans les sous-préfectures tendre des barrages pour nous retirer de l’argent en nous demandant des factures alors qu’ils savent bien que les villageois n’émettent pas de factures quand tu achètes une bête avec eux. C’est du racket et on est obligé de négocier avec eux pour ne pas perdre de temps. Que l’Etat fasse comme le Sénégal, la Côte d’Ivoire, et les autres pays de la sous-région où l’Etat envoie de bons moutons à des prix bas et on voit tout ça à la télévision. En ce moment les clients seront satisfaits et pourront acheter les moutons pour la fête” ajoute Seydouba Camara, un autre bouvier.
La fête de la tabaski ne sera pas encore belle pour El hadj Malick Sylla qui n’a pas durant les deux années précédentes pu s’acheter un mouton compte tenu du prix et de sa situation économique. Il accuse l’Etat d’en être responsable de son sort : “ Les vendeurs de moutons malgré qu’ils exagèrent ont bien leurs raisons. Ça va faire la troisième année que je ne pourrai pas tuer un mouton à cause du prix très élevé. Moi je suis à la retraite et j’ai économisé toute l’année pour garder 500.000 GNF et je viens, on me parle de 800.000 GNF jusqu’à 2.000.000 GNF. Cela veut dire qu’on ne va pas encore faire le sacrifice comme le recommande l’islam. L’Etat ne fait rien pour sa population si ce n’est pour nous fatiguer. Dans les autres pays voisins, le prix du mouton est à la bourse de tout le monde, même un élève peut s’acheter un mouton mais en Guinée, il faut être un millionnaire pour bien fêter. C’est vraiment dommage. Heureusement que Dieu a dit si tu n’as pas les moyens pour immoler un mouton, seulement l’intention est prise en compte”, fustige Malick Sylla.