C’est sous la deuxième République que les autorités d’alors ont compris que la liberté de la presse est une condition nécessaire à l’exercice de la démocratie. C’est ainsi que Lansana Conté, malgré la mise en garde des oiseaux de mauvais augure, avait accepté d’établir cette liberté dans son pays en 1991.
Depuis, ce précieux droit, dont on peut se prévaloir encore aujourd’hui, n’a pu être anéanti par ses successeurs. Ce droit ne fait d’ailleurs que prendre de l’essor avec le développement et l’évolution des nouvelles technologies de l’information et de la communication dans notre pays.
Subvention des médias privés, un cadeau empoisonné ?
L’indépendance de la presse privée est cependant à relativiser, quand on sait que des facteurs économiques constituent un goulot d’étranglement pour le bon fonctionnement des entreprises de presse. En clair, les médias ont besoin d’argent pour assurer leur survie.
L’exploitation d’un média privé relève en effet de l’entreprenariat privé, et pour rentabiliser un organe, il faut travailler durement en matière de recherche, de recoupement et de diffusion de l’information, en vue de gagner la confiance des téléspectateurs, des auditeurs ou des lecteurs, ce qui aura un impact certain sur l’audience du média et de facto sur les revenus publicitaires.
La manne financière issue entre autres des annonces publicitaires permet d’améliorer substantiellement le salaire des journalistes et de consentir en leur faveur d’importants avantages sociaux. Il y a donc un lien intime entre la rentabilité de la presse et la rémunération des journalistes, condition de leur indépendance par rapport aux multiples influences extérieures.
Mais de nos jours, à cause de la maigre subvention que l’Etat donne à la presse, et qui provoque du coup la prolifération des organes de presse, dans le but de réclamer une part qui devient de plus en plus insuffisante même pour une entreprise sérieuse, dans la couverture de toutes ses charges annuelles en temps normal.
La presse guinéenne est également confrontée à d’autres problèmes, et non des moindres qui ont pour noms: le manque de formation, la rétention de l’information de la part des autorités mais surtout un certain manque de responsabilité dans le traitement des informations. Que dire du plagiat qui gangrène le milieu : presse écrite (journaux et sites internet), radio, TV….aucune mesure n’étant prise par les associations de presse pour limiter ce fléau qui gangrène la presse guinéenne pour mieux qualifier la corporation. La liste est longue !
Dans les conditions normales, les associations de presse devraient créer un comité de veille pour débusquer les journalistes et organes qui font du plagiat en longueur de journée.
Les autres insuffisances ont pour noms : le manque de cadre réglementaire spécifique pour les entreprises de presse, le problème de formation des journalistes, le manque d’un code d’éthique et de déontologie pour la presse guinéenne, le problème d’accès aux sources de nouvelles car la loi d’accès à l’information publique n’a pas été promulguée, la précarité financière et juridique des journalistes (l’absence de contrat de travail, le manque d’assurances maladie, la non immatriculation à la Caisse Nationale de Sécurité Sociale, etc.), la corruption et le racket dans la presse, le manque de professionnalisme dans l’animation des émissions interactives politiques, l’agressivité et le manque de courtoisie vis-à-vis des invités dans les émissions Talk-Show, etc.
Malgré tout, il faut tout de même noter quelques avancées notamment la création du syndicat de la presse privée qui se bat pour la signature d’une convention collective, en vue de défendre les intérêts des journalistes pour qu’ils puissent vivre décemment du fruit de leur labeur. Si cette œuvre est salutaire, elle doit être accompagnée par l’indispensable professionnalisation des journalistes.
L’Etat pour aider à avoir une presse dynamique, autonome et indépendante, pourrait par exemple supprimer la manne financière directement versée aux médias et opter pour sa réutilisation dans la formation et le renforcement des capacités opérationnelles des journalistes ; en mettant en place par exemple des mesures très strictes pour l’obtention de la carte presse permettant à un individu d’exercer la profession de journaliste en Guinée, noble métier lequel est malheureusement sapé par des individus mal intentionnés qui salissent la corporation. L’autre rôle incitateur de l’Etat pourrait porter sur la facilitation de l’accès au crédit pour les médias auprès des institutions bancaires.
Les médias bénéficiaires de ce « coup de pouce » devront a priori remplir des critères d’éligibilité, dont l’affiliation à la caisse nationale de sécurité sociale (CNSS). Le tout assorti d’un engagement du contractant à rembourser son prêt éventuel garanti par l’Etat auprès de la banque primaire de son choix.
Pour que vive la liberté de la presse.