Le 13 décembre, le Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA), en compagnie du gouvernement guinéen, va organiser la journée mondiale de la population. Cette journée intitulée « Droits et choix, réponse et priorité à la santé reproductive » vise à interpeller les acteurs à tous les niveaux sur les efforts à fournir pour la santé sexuelle et reproductive des femmes.
Delphine Ndaw, Représentante Résidente de UNFPA Guinée indique que cette année, l’accent est mis sur l’autonomie corporelle des femmes : « En ce qui concerne le rapport sur l’état de la population, l’accent est mis sur l’autonomie corporelle des femmes. Cette autonomie sexuelle est étroitement liée à l’autonomisation de la femme dans beaucoup de sphères de la vie. Et tant que cela n’est pas résolu, l’autonomie sexuelle ne peut pas se réaliser. Et ça appelle à une action multisectorielle pour assurer les droits globaux des femmes et des filles. L’intérêt de la célébration de cette journée c’est d’interpeller les acteurs à tous les niveaux pour dire oui il y a eu certainement des efforts qui ont été faits, mais il reste encore beaucoup à faire. »
D’ici à 2050, l’humanité comptera 10 milliards d’individus, affirme Mme Ndaw, avant de prévenir sur la nécessité de respecter les droits globaux des femmes notamment ceux de la santé sexuelle et reproductive : « Aujourd’hui nous sommes plus de 7,7 milliards d’habitants sur la planète. Et les projections indiquent qu’en 2050 on aura atteint les 10 milliards d’habitants. Alors 10 milliards d’habitants, si la moitié est laissée pour compte, il y aura sérieusement un problème. C’est pourquoi le Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA) met l’accent sur les droits des femmes et principalement les droits en matière de santé sexuelle et de la reproduction. »
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Plus loin, elle soutient que la pandémie de Covid-19 a eu un impact négatif sur la santé de la reproduction : « Le contexte de la pandémie de Covid-19 a bouleversé complètement le mode de vie des gens de façon forcée. Ça a perturbé leur système de santé. Nous avons connu des problèmes d’approvisionnement des hôpitaux du fait de la fermeture des frontières, du fait qu’on ne pouvait pas travailler en usines pour fabriquer les médicaments. La conséquence est que beaucoup de personnes n’ont pas pu avoir accès à des soins de santé et en général quand on analyse, le parent pauvre c’est vraiment le secteur de la santé de la production. »
Cette journée se tient à un moment où la Guinée connait « une épidémie » de viols. Ce phénomène inquiète Marie Touré, la Directrice nationale Genre et équité du ministère de la Promotion féminine, de l’enfance et des personnes vulnérables: « On parle des droits et choix comme réponse et priorité à la santé reproductive. Effectivement, la problématique concernant les femmes et les jeunes filles gravite toujours autour de la santé sexuelle et reproductive. Mais à cela il y a des dimensions extrêmement pertinentes qu’il faut mettre en évidence lors de ces rencontres, notamment la dimension violence et qui est basée sur le genre. Pourquoi on dit genre ? C’est parce que très souvent ce sont les femmes et les filles qui sont assez victimes, sinon c’est les hommes, les garçons, les filles et les femmes. Mais dans cette situation, les filles et les femmes subissent le lourd tribut de ce phénomène. »
Selon Mme Touré, 271 cas de viol ont été enregistrés en Guinée les trois derniers mois : « Ne serait-ce que les trois mois passés, on a enregistré plus de 271 cas de viol. Sur toute l’étendue du territoire, dans l’année, ça va jusqu’à plus de mille. Ça c’est la dimension du phénomène qu’on vous fait savoir. La recrudescence de ce phénomène de viol est devenu tellement problématique qu’on se demande qu’est-ce qui se passe dans notre société. »
C’est la même inquiétude au niveau de la justice. Le substitut du procureur de la République près le tribunal de première instance de Dixinn, Daouda Diomandé, se demande pourquoi cette recrudescence de viols alors que tous les dossiers déférés dans sa juridiction ont été condamnés à de lourdes peines : « Nous même nous nous posons des questions pourquoi la recrudescence des cas de viol surtout des mineurs, malgré que chaque fois des dossiers sont enrôlés le jugement est fait, il y a des décisions qui tombent. Ces décisions ne dissuadent pas ces éventuels violeurs. C’est la raison pour laquelle je me suis dit qu’il y a problème, parce que d’aucuns pensent que c’est la justice qui ne fait pas son travail. Non. Au cours de nos audiences criminelles à Dixinn, par exemple si vous avez dix dossiers enrôlés, les huit sont des cas de viol. Et ça c’est chaque fois. Nous ne savons pas pourquoi il y a recrudescence des cas de viol, parce que ce n’est pas par manque de sanctions. Il y a des sanctions. Chaque lundi, en tout cas à Dixinn, lorsqu’il y a des dossiers de viol au rôle, lorsque la décision est prise, un violeur, s’il n’a rien pris comme sanction, c’est dix ans. Nous avons condamné gens à 15 ans. Le cas illustratif, c’est celui d’un maitre coranique qui avait abusé d’une de ses élèves. Lorsque son dossier a été instruit, programmé et jugé, il a pris 15 ans de réclusion criminelle. »