« Sall temps à la Cour Constitutionnelle ! », titre l’hebdomadaire satirique « Le Lynx » pour aborder le sujet. « Kèlèfa Sall, le président de la Cour Constitutionnelle prévient Alpha Grimpeur contre les sirènes révisionnistes. Il reçoit en retour les foudres des futurs destitutionnistes. En pleine figure. Eh, oui ! », ironise le journal. Faisant allusion à cette fameuse phrase prononcée par Kèlèfa Sall lors de l’investiture du président Alpha Condé.
« Le Lynx » poursuit : « En prévenant le Prési Alpha Grimpeur contre « les sirènes révisionnistes », le président de la Cour Constitutionnelle n’aurait deviné qu’il allait être confronté à ce Sall merdier de mandat que tient à écourter son entourage. Motion de défiance, puis destitution pour la deuxième fois, contestation, isolement…Kèlèfa Sall a toujours tiré son épingle du jeûne. Survivra-t-il encore ? ».
L’arrêt de destitution, rappelle notre confrère, vise des griefs contenus dans la motion de défiance : dysfonctionnement de la Cour, mépris à l’égard des conseillers, autoritarisme, gestion opaque des ressources de la Cour, arrogance, amateurisme, application d’un règlement intérieur banni par les conseillers…
Au regard de la loi, « Le Lynx » s’interroge : « les Sall péchés d’Israël mis sur le dos de Kèlèfa lui valent-ils une destitution au regard de la loi ? En réponse, le journal satirique fait allusion à l’article 11 de la loi organique 006 du 10 mars 2011 qui évoque deux cas de figure pouvant entraîner la destitution d’un membre de la Cour : parjure ou condamnation pour crime ou délit.
Le premier motif, souligne le journal, fait référence à la violation du serment que voici : je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de les exercer en toute impartialité dans le respect de la Constitution et en toute indépendance, de garder le secret des délibérations et des votes et de ne prendre aucune position publique, de ne donner aucune consultation sur les questions relevant de la Compétence de la Cour.
« Les membres de la Cour Constitutionnelle sont inamovibles pendant la durée de leur fonction. Ils ne peuvent être poursuivis ou arrêtés sans l’autorisation de la Cour Constitutionnelle, sauf cas de flagrant délit (…) En cas de crime ou délit, les membres de la Cour Constitutionnelle sont justiciables de la Cour Suprême », fait remarquer « Le Lynx ».
L’autre motif de destitution de Kèlèfa Sall, que la loi a surement omis de prévoir est, ironise le « Le Lynx » : son opposition à tout tripatouillage constitutionnel. Et « Le Lynx » conclu par ce passage du discours de Kèlèfa Sall lors de la prestation de serment du président Alpha Condé pour un second mandat : « Gardez-vous de succomber à la mélodie des sirènes révolutionnistes car si le peuple de Guinée vous a donné et renouvelé sa confiance, il demeure cependant légitimement vigilent ».
« Cour Constitutionnelle : le coup foireux de caïman », titre de son côté « Lance ». Pour notre confrère, l’arrêt de destitution de la Cour Constitutionnelle, Kèlèfa Sall, est déjà entré dans la légende. « La Lance » compare ainsi cet arrêt à l’histoire du caïman très connu le long du littoral guinéen. « Il se raconte qu’un homme attendait à la berge une pirogue pour traverser un bras de mer. Un caïman très affamé l’a vu qui se lavait les mains au bord de l’eau. Le reptile qui veut l’envoyer dans l’eau et lui rejoindre pour en faire son festin, a décidé de ne pas le rater. Il le projette si fort que l’homme atterrit dans la mangrove. Il se relève, regarde à gauche, à droite, puis se met à marcher tout droit vers l’autre rive, tout surpris de franchir la partie de bras de mer pour laquelle il attendait la pirogue », relate « La lance ».
Pour notre confrère, il semble que l’on voulait éjecter Kèlèfa Sall si fort que la méthode utilisée a fini par le propulser loin du danger. Sur l’autre rive.
Après avoir rappelé les différents articles de la loi portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle, « La Lance » estime que la solution la plus raisonnable, aussi la plus « idéaliste », serait de demander aux sages de la Cour Constitutionnelle de pousser encore la sagesse plus loin et de suspendre la décision de renvoyer Kèlèfa Sall.
« Une cohabitation apaisée avec le Président de la République pourrait être demandée et obtenue. Personne ne parlera de paix de braves. C’est garanti. L’horizon 2020 serait, par ce biais, beaucoup moins assombri », conclu « La Lance ».
« L’Indépendant », pour sa part, s’est contenté de mentionner les réactions du Barreau de Guinée et l’OGDH (Organisation guinéenne des droits de l’homme).
Selon notre confrère, la situation de crise à la Cour Constitutionnelle met le Bâtonnier de l’ordre national des Avocats dans l’embarras. En se réfèrent à ces propos du bâtonnier, Me Mohamed Traoré : « Si Kèlèfa Sall quittait cette Cour, comment seraient ses conseillers ? Je pense que la seule voie qui reste aujourd’hui, c’est qu’il y ait une démission collective de ces membres. Car, ils doivent tous penser à la restauration de la crédibilité de ladite Cour », a-t-il prodigué dans les colonnes de notre confrère « L’Indépendant ».
Selon Mohamed Traoré, conclu « L’Indépendant », le comble, c’est qu’à date, ni Kèlèfa Sall ni les conseillers-maîtres, «personne ne semble vouloir lâcher prise ».
De leur côté, toujours dans les colonnes du même journal, l’OGDH qui dit déplorer cette situation et la crise à la Cour Constitutionnelle, appelle les membres de ladite Cour au respect de la Constitution et de tous les textes législatifs régissant leur juridiction. L’OGDH invite la société civile à mener des actions pour le respect strict de la constitution et des lois de la République.
« Le Standard » parle pour sa part d’une crise qui pourrait déboucher à d’autres. A titre illustratif, souligne-il, alors qu’on croyait peut-être à jamais révolue la crise à la Cour constitutionnelle, voici que l’essentiel des conseillers de cette respectueuse institution judiciaire exigent de nouveau le départ de leur président. Auquel ils reprochent principalement le fait de cavalier seul, d’avoir pris des décisions qui violeraient les règles et principes de la Cour Constitutionnelle. Pour ne pas s’arrêter en si bon chemin, ajoute le journal, ils ont par la suite décrété « l’empêchement du président de la Cour Constitutionnelle », et opté par la même occasion pour son remplacement provisoire par son vice-président. Une attitude qui, pour « Le Standard », n’a pas tardé à déboucher sur nouvelle crise ouverte puant d’ores et déjà la politique politicienne.
Citant les crises au niveau du système éducatif et au Port de Conakry, « Le Standard », conclu : «D’une crise à une autre, il va de soi que pour la sérénité des investissements et la mise en branle de toutes les œuvres ou bonnes actions susceptibles de faire avancer notre pays, il y a donc lieu de mettre en place des garde-fous, si possible de chercher à anticiper certains événements et non d’être condamné à devoir les vivre ou les gérer sous les feux croisés d’opinions qui ne sont hélas pas toujours neutres. N’est-ce pas que l‘on pourrait douter difficilement des enjeux des prochains scrutins dans notre pays ! Peut-être bien que la bataille pour le positionnement sur l’échiquier politique national a d’ores et déjà commencé. D’où cette tendance fâcheuse à vouloir tout récupérer, tout politiser ».