L’ex-procureur de la république près le tribunal de première instance est revenu aux affaires quelques mois après sa suspension par ses pairs. Mais son retour suscite des réactions tranchées au sein de l’opinion publique. De quoi s’interroger sur les motivations de sa nomination par le chef de l’Etat comme avocat général à la Cour suprême.
C’est un magistrat qui s’exprime doctement, connaissant à la perfection le droit. Mais ses méthodes de fonctionnement peu orthodoxes combinées à son excès de zèle, font l’unanimité contre lui. Capable de pervertir les principes de fonctionnement de la justice pour condescendre aux injonctions des dignitaires du régime déchu, Sidy Souleymane N’Diaye est rattrapé par son passé sulfureux. Compromis dans un audio diffusé dans les médias, le Conseil supérieur de la Magistrature le suspend pour trois mois. Suffisant pour épurer sa conscience et le condamner à se soumettre à une rigueur d’ascèse. Cependant, la réputation qu’il s’est bâtie, au gré de l’exercice controversé de ses fonctions semblent lui faire l’effet Boomerang à son corps défendant, si bien que personne ou presque ne croit à sa mue. Qu’importe, l’opinion ne fait pas la loi, et la loi ne soucie guère des états d’âme. Dura lex sed lex, la loi est dure, mais c’est la loi. A partir de là, le débat peut se faire avec raison, et non avec passion.
Aussi, si personne ne doit denier le droit qu’à chacun d’exprimer ses ressentis au sujet de Sidy Souleymane, personne non plus ne peut se prévaloir d’une base légale pour s’opposer à la nomination de ce dernier, qui n’était que suspendu pour une période bien déterminée. Pas même le chef de l’Etat qui ne l’a jamais rencontré outre-mesure. Dès lors, sa période de suspension arrivée à expiration, n’étant pas radié ou à la retraite, Sidy Souleymane N’Diaye, quoique jeté aux orties par une opinion publique farouche, mais louvoyante, ne pouvait continuer à végéter dans l’oisiveté. Une logique qui s’est imposée au Colonel Mamadi Doumbouya, garanti des institutions, et qui tient par-dessus tout à faire corps avec le sacro-saint principe de séparation des pouvoirs. De plus, le président de la Transition, bien que sensible aux cris d’alarme de son peuple, ne pouvait légalement écarter Sidy Souleymane N’Diaye, au risque de commettre une injustice et surtout se mettre à dos le conseil supérieur de la magistrature, seul habité à décider du sort des magistrats indélicats.
La légitimité des réactions concernant le magistrat contesté ne fait guère de doute. Mais, le chef de l’Etat est dans l’obligation républicaine de faire résonner les sentiments de la raison et de taire ceux de la passion et de l’émotion, du moins dans l’exercice de ses fonctions. Reste à savoir si Sidy Souleymane N’Diaye saisira cette opportunité pour entrer, dans la postérité, par la grande porte de l’histoire du pays.