Auteur: Youssouf Sylla, Juriste/analyste
Les partis politiques s’activent à present pour trouver un modus operandi dans le cadre de leur participation au CNT. Ce qui est une bonne nouvelle. Ils mettent en avant des critères qui doivent être remplis par leurs représentants au sein de cet organe investi de pouvoir législatif pendant la transition.
L’équilibre global qui ressort de la présence des forces vives de la nation au CNT, semble avoir été fait dans le but de n’avoir ni une surreprésentation ni une sous-représentation des partis politiques. Pour maximiser l’efficacité de leur participation au CNT, les partis doivent être conscients de leurs forces et faiblesses, dans un ensemble qui ne leur est pas acquis d’avance. Ils doivent surtout éviter de faire de leur représentation, un enjeu électoral ou préélectoral, qui consisterait pour chaque parti de mesurer son poids sur l’échiquier politique. Le moment ne s’y prête point! Pour eux, il est plutôt temps de montrer et démontrer leurs capacités de dialogue, d’influence et d’interaction avec les autres composantes du CNT dans la perspective d’avoir à la fin de la transition, des textes qui garantiront aux guinéens plus de liberté, de démocratie et de justice. Bref, le temps est vraiment au « soft power ».
À l’heure qu’il est, tous les partis se valent dans le processus de cette transition. Conformément à la Charte sur les partis politiques, ils ont les mêmes droits et les mêmes devoirs. La notion de « grands » et de « petits » partis tant affectionnée par certains donne lieu à diverses interprétations. En effet, qu’est-ce qu’un grand parti en Guinée ? Un parti ethniquement monolithique dans un contexte de diversité ethnique, un parti qui est au pouvoir par effraction, un parti ethniquement diversifié, un parti qui achète les consciences dans un monde de pauvreté abjecte, ou un parti issu d’une coalition entre différents autres partis ? Dans le processus de représentation des partis au CNT, le poids rattaché à un parti est donc une donnée trop relative, complexe et conjoncturelle pour constituer un critère de discrimination ou d’écrasement d’un autre parti, jugé faible. La discrimination fondée sur le facteur « poids » présente d’importants risques d’atteinte à la libre expression des courants de pensée dans un pays en pleine transition politique.
La tentation de réduire à tout prix le jeu politique aux partis tentaculaires peut être grande, mais elle est dangereuse et contraire au multipartisme. Il est important de ne pas tomber dans les discriminations qui affecteront gravement la démocratie dans son essence. Il convient à ce titre de conserver par la loi, aujourd’hui et demain, les mêmes droits et obligations aux partis, et de laisser le marché politique s’autoréguler par ses propres mécanismes que sont le vote libre et transparent des citoyens et le jeu d’alliances et de contre alliances entre les partis.