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Que sont-ils devenus ? Comment revaloriser la musique guinéenne ? Du haut de ses 46 ans de scène, Max Salam livre son petit « secret »

Encore en chemin, pour reconnaitre les œuvres et surtout rendre hommage à toutes ces grandes gloires du secteur des arts, de la culture et des sports, Guinéenews, votre quotidien électronique a rencontré l’artiste Max Salam Camara ‘’Cocorico’’.

Membre fondateur de l’orchestre Syli authentique, chanteur, auteur compositeur, arrangeur, Max Camara a été rencontré à son domicile, sis au quartier Matam Lido.

Très engagé et attaché au décollage de la musique guinéenne, l’artiste à bâtons rompus nous parle de son parcours, aussi stupéfié à cause de l’état de santé actuel de la musique guinéenne, il dénonce et livre ce qu’il appelle son ‘’secret’’ pour le maintien et la revalorisation de la musique guinéenne.

Né en 1954 à Moribaya, Préfecture de Dubréka, Max Camara est fils de feu Kerfala et de feue Fatoumata Camara. Il est marié et père de trois (3) garçons.

Partagé entre deux cultures (Sénégal-Guinée), fait qui se ressent par son marquant accent sénégalais, Max Camara nous relate ses débuts dans la pratique de la musique, comment il est arrivé en Guinée et a pu poursuivre sa passion pour le mouvement pionnier :’’ mon papa est décédé en 1972 au Sénégal. En 1974, ma mère m’a ramené en Guinée. J’ai très tôt aimé la musique à travers l’artiste, feu Laba Soseh qui fut mon maître. Il tenait ses répétitions non loin de notre domicile aux HLM. Je savais fredonner beaucoup de chansons car, mon Papa s’était procurer de tous les disques guinéens (Syliphone) d’antan’’.

L’artiste à ses tout débuts au Sénégal, a appartenu aux orchestres ‘’vedette band du Sénégal’’ et ‘’université sex’’.

A part la musique qu’il pratiquait, Max Salam Camara a fait partie du mouvement des éclaireurs au Sénégal. Arrivé à Conakry à la demande de sa mère, il témoigne comment il a intégré le monde musical guinéen :’’ étant éclaireur, je venais de débarquer fraichement du Sénégal. Voulant poursuivre ce métier d’avant-garde, c’est ainsi que je me suis affilié au mouvement pionnier de la Fédération de Conakry 2. Il y avait la fanfare et j’avais comme instructeurs ou chefs pionniers Souro Migan et Moise Konaté, qui étaient tous deux sous la coupe de Mr Diarso, alors membre du comité régional de la JRDA de ladite fédération. À l’essai pour le chant, Ils furent tous séduit par mon interprétation du titre ‘’Moliendo mi Café’’. De la fanfare, le groupe s’est transformé en orchestre avec Kaba Diabaté (jeune frère de Sékou Bembeya), feu Réné Benis, Feu Sidiki wandel, Cheick Diaw et autres’’.

Plu tard, notre invité ne maitrisant pas la langue malinké et dans sa folie de réussir, se fera secondé par Laye Kanté au chant, qui partira de l’orchestre pour les Etats-Unis. Il recrutera ensuite Condette (la fille de la cantatrice feue Hadja Dyéli Siramba) qui ne fera pas long feu à cause de la pression de sa mère.

Continuellement aux aguets pour combler le vide au niveau de la section chant, dépêchés en compagnie de feu Réné Benis, ils dénicheront le jeune Yaya Bangoura ’’El Bangou’’ au cours d’une de ses prestations en compagnie de la troupe du quartier camp Boiro.

De la découverte de cette belle voix qu’il a chérie du coup, Max Salam ‘’Cocorico’’ poursuit : ‘’sa voix aussi limpide nous a séduits. Son envie de faire la musique m’incita d’aller rencontrer ses parents au Camp Boiro et qui me le confieront. J’ai été très dur avec Yaya au niveau tant de la discipline qu’à la perfection de sa voix. Nous avions formé ainsi un duo, qui s’est fait connaitre mélodieusement partout. Le résultat s’est vite fait sentir et le succès du Syli authentique ne s’est pas fait attendre’’.

Le rang va grossir avec l’arrivée de plusieurs autres musiciens notamment : feu Boubacar Bah (guitare solo), feu Aguibou Barry (guitare accompagnement), feu Aguibou Barry (flutiste), feu Kouloumba Konaté (tumbiste), Nafi Sall (chant), feu Aliou Keita ‘’Alias’’ (chant), ainsi que plusieurs autres musiciens qui ont fait leur passage au sein de cette jeune formation des pionniers de la fédération de Conakry 2.

Le Syli authentique au fil des ans, s’est taillé une grande part de charme et s’est procuré une place de choix, parmi tant d’autres formations orchestrales de la capitale et de l’intérieur du pays.

Max Camara ‘’Cocorico’’ auteur compositeur, nous a longtemps bercé et continue d’ailleurs avec nombreux titres (Fabara, Andrée, N’Bessoma, Mafory Bangoura, Aye na, Sènèro…) en compagnie du Syli authentique et d’autres tubes en envolée solo dans les albums ‘’Laisser passer et Retro 5O’’ (Amina, cocorico, Fabara-remix…)

Interrogé, Jean-Baptiste Williams, musicien guitariste, actuel Directeur national de la culture, partage son point de vue sur l’artiste Max Camara et se prononce en ces termes : ‘’c’est un bon chanteur à la voix juste. Excellent interprète qui fit les beaux jours du Syli Authentique, orchestre des pionniers de Conakry 2, orchestre fédéral de Conakry 3. Il a insufflé sa voix au timbre particulier qui rappelle les intonations de nos voisins du Sénégal, qui ont bercé son enfance’’.

El hadj Kader Camara, mélomane, membre du Bureau exécutif de la Fédération Guinéenne de Football, se souvient aussi de l’artiste : « c’est un chanteur originel qui a toujours maitrisé ses sujets. Il m’a épaté un jour à la Piscine olympique, lors d’une des soirées dansantes du Syli Authentique. Ses interprétations de la musique sénégalaise, fourmillait avec vitalité nos pieds sur piste. Très humble et effacé, tu ne pouvais pas comprendre qu’il était le premier chanteur de l’orchestre. Il a toujours su propulser Yaya Bangoura au-devant de la scène’’.

Pour plus de 46 ans de pratique musicale, très remonté de constater aujourd’hui, la place qu’occupe la musique guinéenne comparativement à son temps, et à celui de ses ainés, Max Salam Cocorico fustige :’ ces jeunes qui prostituent la musique guinéenne doivent se remettre en cause. Ils sont en train de développer et exploiter les autres lignes musicales qui leur sont étrangères. La ligne de la musique guinéenne est déjà tracée. Pourquoi se faire embaumer par ces rythmes allochtones, pendant que les rythmes yankadi, manè, tupusèsè… sont à vue d’œil et sous le nez. Ces jeunes doivent revenir en se posant les questions de savoir : quelles sont les mélodies qui ont manqué ? Quels sont les accords de progression à améliorer ? Selon l’époque, quels conseils ou messages pourrait-on injecter dans nos compositions musicales ?  Tant de questions, qui méritent de solides réponses de la part de tous, pour le bonheur de la musique guinéenne. Au temps du PDG, nous avions pratiqué ce métier non pour un but lucratif. Aucune balle de retour ne nous a été rendue. Il ne nous reste que nos petites familles et cette discipline apprise’’.

Bondissant sur ces précédents aveux, la question de savoir de quoi vit donc l’artiste ? Il adjoint du coup ceci : ‘’ présentement, je vis de ma musique c’est-à-dire des contrats de prestations que j’honore avec mon groupe de musique. Ne vous leurrez point, ce que le BGDA nous donne est trop minime. Pour une année, je ne peux même pas gagner plus de 2.000.000 FG’’.

Que dire de plus, sinon qu’à la rencontre de cet artiste, plusieurs interrogations au sujet de la musique guinéenne sont éclairées. Il ne s’arrête point et continue à déballer, car dans sa besace, que nous soupçonnions encore pleine, il en retire ce qu’il appelle son petit ‘’secret’’ pour la revalorisation de la musique guinéenne : ‘’je veux confier aux Guinéens, au Ministère des Sports de la Culture et du Patrimoine Historique, un petit ‘’secret’’, pour que la musique guinéenne continue à faire sa marche vers le succès. Ce n’est qu’une simple proposition qui a porté fruit dans d’autres pays de la sous-région. Vu l’inactivité constaté et réelle de nos ensembles nationaux qui ont fait la gloire de la musique guinéenne, je propose la création d’un orchestre national de la RTG. Orchestre national dans lequel, nous allons regrouper cette jeunesse afin de s’affilier pour défendre la couleur de la musique guinéenne. En faire une école pour cette nouvelle génération qui s’aventure dans l’exploitation des rythmes étrangers. Pour une volonté politique culturelle, les autorités compétentes doivent associer ces grands musiciens de devoir pour encadrer et orienter ces jeunes. Ne serait-ce que pour un début, reprendre les anciens répertoires de notre patrimoine, constituerait une pratique dans la formation’’.

Ils sont nombreux ces artistes ou musiciens de devoir, impuissants devant cette regrettable décadence de la musique guinéenne.

À nos réflexions pour la reconquête des plus hauts sommets, jadis occupé par nos rythmes riches et variés.

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