Dans son dernier rapport présenté courant cette semaine au Chef de l’Etat, l’Inspection Générale de l’Etat note qu’il est très rare de rencontrer un organisme public en Guinée qui fonctionne sur ressources propres, sans aucune subvention du budget national. Sur les raisons de cet état de fait, l’IGE signale des déperditions de recettes et des créances non recouvrées.
Sur les déperditions des dépenses, l’IGE indique que le bas niveau de recettes constaté lors des contrôles et vérification est essentiellement dû à la non maîtrise par les entités des statistiques (données) sur lesquelles sont assises les taxations. Par exemple, note le rapport, au Fonds de l’Environnement et du Capital Naturel, les taux de taxation fixés dans l’Arrêté Conjoint N°6758/ME/MEF/98 du 01 septembre 1998 portant modalités de prélèvement de la taxe sur les substances chimiques sont faibles et inadaptés au regard des réalités actuelles. « A cela s’ajoute la non maîtrise des statistiques (quantités) des produits chimiques et substances dangereuses importés par année en République de Guinée. Cela constitue une source évidente de manœuvres et de déperdition de ressources. Par ailleurs, les redevances sur les installations classées sont payées par les assujetties sur la base des surfaces équipées et de chauffe et non en fonction du degré de pollution qu’elles émettent. Ce qui constitue, au-delà d’une sous- évaluation de la redevance à payer, une négligence considérable en termes de développement durable », lit-on dans le rapport.
Toujours au Fonds de l’Environnement et du Capital Naturel, la déperdition des ressources est aussi due à la non exhaustivité du répertoire des sociétés assujetties.
A l’Administration et Contrôle des Grands Projets (ACGP), il n’existe même pas de pièces comptables relatives aux recettes. « La mission n’a reçu aucune pièce comptable relative aux recettes perçues par l’ACGP pour la période sous revue. Il faut préciser que l’ACGP dispose des recettes parmi lesquelles, on peut citer les produits issus des co-traitances. Il a été révélé à la mission l’encaissement en 2020 d’une recette pour un montant de cinq milliards de francs guinéens (5 000 000 000 GNF) dans un compte ouvert à la Banque Centrale. Toutefois, aucune preuve de la gestion de ce montant n’a été mise à la disposition de la mission », révèle le rapport.
Le cas Résidence 2 000
L’IGE note qu’en dépit du décret annulant l’attribution de la cité ‘’résidence 2000’’ à la Société d’Investissement des Projets Domiciliaires et Constructifs (SIPDC) et son retour dans le portefeuille de l’Etat, celle-ci a toujours continué à percevoir les loyers auprès des locataires. Alors que, normalement, les loyers dus après le 05 avril 2022 devraient être encaissés par le Patrimoine Bâti Public. « Constatant cette situation lors de la reconstitution des recettes locatives, la mission a jugé important de calculer l’ensemble des loyers encaissés par la SIPDC après le retour de la cité ‘’Résidence 2000’’ dans le portefeuille de l’Etat. Ce calcul a été fait sur la base des reçus de paiements des loyers des 2ème et 3ème trimestres mis à la disposition des IGE par les locataires. Le montant total des loyers indûment encaissés s’élève à GNF 5 201 172 250 et 85 350 euros », indique le rapport.
Des créances non recouvrées
Le cas de l’ARPT est l’illustration parfaite des créances non recouvrées par les organismes publics. A travers les balances des exercices 2019, 2020, 2021, l’IGE a constaté que le volume de créances douteuses de l’ARPT est important, entraînant des provisions pour dépréciations de créances douteuses, voire des pertes de créances. En moyenne, note le rapport, plus de 35% des créances sont constituées en créances douteuses par l’ARPT. En outre, plus de 99% de ces créances douteuses sont, à leur tour, provisionnées, entraînant des charges importantes pour l’ARPT.
Par ailleurs, poursuit le rapport, en 2019 l’ARPT a consenti des pertes de créances de l’ordre de deux milliards (GNF 2 000 000 000) en faveur de certains de ses clients, notamment certaines radios et télévisions. A cela, s’ajoute une autre perte de créances consentie en 2020 en faveur de la SOTELGUI pour un montant de soixante-douze milliards deux cent soixante-douze millions vingt-huit mille trois cent quarante-huit francs guinéens (GNF 72 272 028 348), alors que le patrimoine de la Société des Télécommunications de Guinée (SOTELGUI) a été transféré à la société GUINEE TELECOM S.A. « L’IGE n’a reçu aucune justification valable relative à la constitution de ces créances en créances douteuses qui ont été provisionnées. En outre, elle n’a reçu aucune preuve matérielle justifiant ces pertes de créances en faveur des clients. Certaines créances déclarées par l’ARPT sont différentes de celles déclarées par ses débiteurs », fait savoir le rapport.
Le rapport signale également que l’exploitation des licences et autorisations expirées a entraîné des pertes de ressources à l’Etat et à l’ARPT. Là-dessus, presque toutes les compagnies de téléphonie et entreprises de fourniture d’internet sont concernées.