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Pour un usage rentable du bail emphytéotique administratif

Auteur: Youssouf Sylla, juriste, analyste.

Originellement, ce type de bail a été conçu pour permettre aux grands propriétaires fonciers qui n’avaient pas les moyens de de faire exploiter, contre redevance, leurs propriétés par d’autres opérateurs financierement aptes à le faire. Au terme du contrat, la propriété désormais aménagée revenait au bailleur. Le succès du bail emphytéotique dans le monde des affaires a justifié son importation dans le secteur public. Ainsi, est né le bail emphytéotique administratif (BEA) comme un excellent moyen de valorisation du parc immobilier étatique et de protection du domaine public par des règles propres.

En Guinée, ce bail est défini par les articles 186 du code de la construction et de l’habitation (CCH) et 17 du code foncier domanial (CFD) en des termes identiques : « Le bail emphytéotique est une convention de longue durée, comprise entre quinze et quatre-vingt-dix-neuf ans, qui confère au preneur un droit réel immobilier susceptible d’hypothèque. Ce droit peut être saisi et cédé ». En effet, ce bail ne peut porter que sur les biens qui relèvent du domaine privé de l’État. Il s’agit en réalité de biens que l’Etat peut aliéner, acquérir et gérer comme le ferait un particulier. Les biens qui relèvent en revanche du domaine public de l’Etat échappent complètement au champ d’application du bail emphytéotique. Car ces biens sont régis par un régime juridique spécifique. Selon l’article 101 du CFD, « les biens du domaine public sont inaliénables et imprescriptibles ».

L’intérêt de la distinction entre les domaines privé et public de l’Etat est d’une importance fondamentale pour caractériser les marges de manœuvre de l’État et du particulier dans la gestion du domaine public. L’administration publique et le particulier bénéficiaire d’un droit d’occupation ont des pouvoirs strictement limités dans la gestion des biens qui relèvent du domaine public de l’Etat. L’administration ne peut pas aliéner ce domaine et le droit d’occupation du particulier est précaire et révocable à tout moment. L’extreme fragilité des droits de l’occupant dans le domaine public de l’Etat est apparu comme un véritable frein au développement de l’investissement privé dans ce domaine.

Pour ce qui est en revanche des biens qui relèvent du domaine privé de l’Etat, les marges de manœuvre de l’administration publique et du particulier bénéficiaire d’un droit d’occupation sont importantes. C’est ici que le bail emphytéotique administratif (BEA) prend tout son sens. Dans son article sur « les outils des collectivités pour valoriser leur domaine », l’avocat francais, Me Alexandre Vandepoorter, spécialiste en droit immobilier indique que le BEA permet de « confier à un opérateur privé le soin de réaliser des équipements lourds qui vont servir l’intérêt général, voire qui seront le siège d’une activité de service public. Et il permet de donner à l’opérateur les moyens de mobiliser les fonds nécessaires pour y parvenir, par la voie des droits réels qu’il peut donner en garantie aux établissements bancaires sollicités ».

En autorisant par voie législative une durée d’occupation qui ne peut être inferieure à 15 ans et superieure à 99 ans, le législateur guinéen accorde à l’opérateur privé une période confortable lui permettant d’amortir ses investissements et de réaliser des économies sur le domaine public occupé. Face à la rareté de ses recettes, l’Etat peut peut utiliser le BEA pour augmenter les revenus tirés de l’exploitation de son parc immobilier par les professionnels du secteur privé. Ce n’est pas avec ses hauts cadres exploitants que de tels résultats seront obtenus.

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