L’ancien Premier ministre Sidya Touré était, ce lundi 16 septembre, l’invité de nos confrères de radio Espace. S’exprimant sur l’actualité politique, le président de l’Union des Forces Républicaines (UFR) a fait des révélations troublantes sur le fonctionnement actuel de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) quant aux préparatifs des élections législatives en vue.
Parlant des consultations engagées par le Premier ministre avec les acteurs sociopolitiques pour favoriser la tenue des élections législatives avant la fin de l’année, le président de l’UFR estime que les élections communales doivent prendre fin avant d’aborder une autre. « Il y a des maires qui n’ont pas été installés, des conseils de quartier et de district, mais également régionaux. On ne fait pas une élection sur une autre. On évacue la première. Les institutions sont faites pour être respectées, les institutions font l’ossature d’un Etat. Avant qu’on aille aux législatives, il y a cette question qui n’a pas été réglée. Et nous l’avons exigé, mais ils n’en sont pas là. En réalité on est en train de mettre devant nous un écran de fumée », a-t-il expliqué.
Sidya Touré va plus loin pour parler de l’existence de deux CENI : « la réalité c’est que nous avons aujourd’hui deux CENI. Nous sommes en train de travailler d’un côté avec une CENI et de l’autre côté, vous avez une autre CENI qui est gérée par le MATD (ministère de l’Administration du territoire et de la décentralisation) et un certain Kakoro qui travaille directement avec Alpha Condé. Cela fait trois mois qu’ils le font. Nous sommes très loin de ce qu’on nous présente aujourd’hui » a-t-il indiqué.
S’agissant des législatives, le président de l’UFR est revenu sur les conclusions de l’audit du fichier électoral qui ont révélé l’existence d’un million 574 mille électeurs fictifs. Chose que la CENI ne reconnait pas. A propos, l’ancien Premier ministre a cru devoir éclairer la lanterne des uns et des autres en revenant textuellement sur les recommandations de l’audit : « La recommandation une de l’audit à court terme était ceci : priorité forte, au vue des doublons persistants du nombre de citoyens sans données biométriques et des décédés qui figurent dans la base des données, un contrôle physique de l’ensemble des électeurs s’impose. Chaque citoyen revient confirmer ou compléter ses données alpha numériques ou biométriques pour qu’il soit maintenu dans la base ».
Deuxième chose, le président de l’UFR a révélé l’existence de près de 3 millions de personnes concernées par les cas de doublon sur le fichier actuel. « Dans les mêmes textes, vous avez 1 336 bureaux de vote fictifs, c’est-à-dire qui ne sont répertoriés nulle part. Quand vous prenez cela avec 500 électeurs, vous avez près de 650 000 électeurs qui sont utilisés pour toutes ces raisons. Nous sommes dans un problème extrêmement sérieux. Tout ceci a été mis en place en dehors de nous. Et quand on vient aux réunions de la CENI et que nous demandons l’application de la loi, on dit que nous sommes en train de faire du blocage », a-t-il poursuivi.
Plus loin, Sidya Touré a donné d’autres détails sur société Innovatrics choisie par la CENI. « Avant qu’on ne fasse l’appel d’offres et qu’on nous donne les résultats, on a commencé à travailler avec Innovatrics. Ça fait trois mois. Ce document que je détiens, qui est le formulaire individuel d’identification, on le fait à la villa 33. On en a fait près de 6 millions. Et c’est fait par cette société innovatrics. On a fait un appel d’offres, on a donné à innovatrics le marché. Et innovatrics est une société unipersonnelle qui a été créée en 2006. Nos avocats m’ont envoyés ce document. Enregistrée en 2006, Innovatrics a un capital qui est de 5 000 Euros. C’est une société écran. La première société 5 000 euros, la deuxième 6 640 euros. Cette société est un écran pour laisser Zemalto continuer à faire ce qu’on faisait avant. Ce que je suis en train de vous dire, c’est que pour préparer de fausses élections, on a fait ces documents. On en a fait près de 6 millions, ils vont être empaquetés et distribués à travers la Guinée. Nous n’accepterons pas cela, parce qu’en plus, il y a en cours une préparation. L’écran de fumée, c’est d’envoyer le Premier ministre rencontrer les gens. A un mois, on va vous dire, on a consulté les gens, ils sont d’accord, on va coupler le vote sur la constitution avec les législatives. C’est cela l’objectif fondamental. Donc tout ceci est totalement inacceptable », a-t-il martelé.
Parlant de la tenue des législatives annoncées par le président de la CENI pour le 28 décembre, la réponse de Sidya Touré est sans ambages : « Nous ne participerons pas aux élections dans ces conditions-là. On nous a mis un écran de fumée pour parler de référendum. L’objectif fondamental d’Alpha, c’est de rester au pouvoir. Toutes ces élections conditionnent le 3ème mandat. Ce n’est pas uniquement les élections législatives. Et je dis, le travail qu’on est en train de faire, c’est de coupler cela avec le référendum. Nous allons nous lever, il n’y a pas d’autres solutions que cela », annonce Sidya Touré.