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Plan de riposte anti-COVID-19 : L’allègement fiscal a-t-il eu un impact sur les prix des denrées ?

Dans le but de lutter contre le coronavirus qui continue de ravager le monde entier, tout en fragilisant  les économies moins résiliantes aux chocs endogènes et exogènes, le gouvernement a annoncé plusieurs mesures pour soulager les entreprises et les opérateurs économiques frappées par la crise.

C’est ainsi que dans le domaine des denrées de première nécessité, l’Etat a fièrement affirmé avoir réduit la TVA à quatre-vingt-onze milliards de francs guinéens  (91.000.000.000 GNF) en faveur des grands importateurs.

La mesure d’allègement fiscal annoncée par le gouvernement dans le secteur de l’alimentation aurait été très salutaire si elle avait un impact direct sur les prix à la consommation ou sur le panier de la ménagère. Car toutes mesures (impôts et/ou subventions) doit avoir un effet de redistribution et dans ce cas présent celle des gros importateurs vers les consommateurs. Par conséquent, cet allègement fiscal aurait dû s’accompagner par une baisse automatique des prix des denrées de première nécessité.

Pour connaître l’utilité marginale d’une telle mesure, Guinéenews© l’avis d’un économiste senior

« Selon les données sur l’Indice Harmonisé des Prix à la Consommation (IHPC) de l’institut national de la statistique en Guinée, les prix de manière globale ont augmenté de 4,7 points durant la période de février à mai 2020. Plus particulièrement, les prix des produits alimentaires ont augmenté de 3,9 points au cours de la même période », a entamé Saikou Amadou Diallo, économiste guinéen basé à Washington DC, États Unis d’Amérique.

« Donc, dans l’état actuel des choses où les recettes de l’Etat ont beaucoup baissé compte tenu du ralentissement économique à cause du coronavirus, deux options  se présentent alors au gouvernement : (i) soit l’Etat aurait dû récupérer cette manne des mains des grands importateurs et la redistribuer aux producteurs locaux à la base qui sont frappés de plein fouet par le non écoulement de leurs produits agricoles ; ou (ii) répercuter proportionnellement cette subvention fiscale sur les prix des denrées de premières nécessité. L’on se rappelle également que dans le plan de riposte initial, l’été gouvernement avait prévu la mise en place du fonds de garantie des prêts bancaires aux petites et moyennes entreprises (PME) de plus de 50 milliards de nos francs. Par conséquent, une dernière option aurait été éventuellement de récupérer cette TVA (taxe sur la valeur ajoutée) et de renforcer cette cagnotte. En outre, on ignore les résultats de la mesure dans le plan de riposte qui consistait à racheter les pommes de terre  et autres produits locaux du pays. Qu’en est-il exactement ? Une autre question à se poser », poursuit M. Diallo.

« A long terme, l’une des problématiques majeures des décisions de politiques publiques et fiscales en Guinée est qu’elles sont pour la plupart du temps basées sur des perceptions et non sur des évidences (faits et/ou données). A moyen terme, l’Etat guinéen, dans sa stratégie de promouvoir les produits locaux doit utiliser les leviers fiscaux à sa disposition afin de subventionner l’offre avec les producteurs locaux; ou alors à inciter les importateurs locaux de se rabattre sur les produits « Made in Guinea ». Tout ceci doit être en parfaite harmonie dans une stratégie nationale de l’agriculture et à mon humble avis, doit constituer l’un des piliers du prochain plan national de développement économique et social (PNDES) », a-t-il ajouté !

« Bref, il est inconcevable, voire très impopulaire que l’Etat continue à faire des “cadeaux” fiscaux à des importateurs de denrées ayant des stocks suffisants pour couvrir la demande durant la période de crise (frontières fermées). Ces différentes mesures ne contribuent nullement ni à améliorer le niveau des vies de la population, ni à réduire les inégalités et la pauvreté », a-t-il conclu.

Le gouvernement a annoncé les premières mesures d’accompagnement des consommateurs et des entreprises au début du mois de mars. Par conséquent, pendant que l’Etat renonçait aux différentes taxes indirectes (TVA et autres), inversement, les prix à la consommation ne faisaient qu’augmenter.

L’on sait que l’Etat essaye tant bien que mal à s’assurer que les prix n’augmentent pas sur le marché en multipliant les rencontres et les appels de pied au niveau des opérateurs et autres commerçants. La dernière sortie du ministre du commerce Boubacar Barry, en est une parfaite illustration, car il soutient que l’Etat a dépensé plus 15 milliards pour pouvoir geler les prix des denrées de première nécessité dans les marchés.

« Justement, les exonérations sont un levier fiscal extrêmement efficace et permettent d’avoir un pouvoir de négociation non négligeable dans ce genre de situation. Par contre, pour qu’elles soient efficientes, elles doivent être accompagnées de manière générale de dispositifs de contrôle efficaces et pertinents qui font fi du lobby puissant des importateurs et autres commerçants en Guinée », a pour sa part affirmé un haut commis de l’Etat qui a strictement requis l’anonymat.

En somme, ces mesures auraient dû avoir un meilleur impact si à l’instar de plusieurs autres pays, l’Etat allait au bout de sa logique en fixant lui-même les prix comme il le fait avec le carburant, ou autres produits subventionnés.

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